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Marin de Gascogne

Marin de Gascogne

Titel: Marin de Gascogne Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Robert Escarpit
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Guillotin. A nous deux, maintenant !  
    — Il ne faudrait pas qu’il essaie de nous entraîner vers l’escadre anglaise de surveillance, commandant, remarqua Violet. Elle ne doit pas être très loin.  
    — A une dizaine de milles au moins. La vigie nous signalera les voiles et nous aurons tout le temps de filer par le chenal de Helle.  
    Avec deux fois moins de canons et quatre fois moins de poids de fonte à tirer, le Hotspur n’avait aucune chance. C’était un fruit mûr à cueillir pour un marcheur comme l’ Argonaute.  
    Soudain, Guillotin s’écria :  
    — Attention ! il pare à virer ! Nous allons être plus rapides que lui ! A changer les voiles, bâbord amures ! La barre dessous !… Non ! annulez cet ordre ! C’était une feinte ! Tribord amures ! La barre à rencontrer !  
    Mais la manœuvre avait déjà commencé. Guirrec s’égosillait pour inverser le mouvement. Demaison, étrangement silencieux, regardait sans réagir les équipes qui se bousculaient sur le pont d’un bord à l’autre. Courant sur son erre, le navire avait amorcé la courbe et refusait de se redresser. Hazembat sentit le gouvernail devenir mou. Levant les yeux, il vit les voiles plaquées contre les mâts.  
    — Nom de Dieu de putain de foutre ! hurla Guillotin, nous allons faire chapelle ! A culer ! La barre dessous !  
    L ’Argonaute était comme cloué dans le lit du vent. De fortes lames embarquaient par l’avant et balayaient le pont jusqu’à la dunette.  
    Entre-temps, l’Anglais, au lieu de s’enfuir, amorçait un virement lof pour lof qui l’amena dangereusement près de la côte ouest d’Ouessant, mais le capitaine anglais connaissait son affaire et il parvint à décrire un cercle parfait en se tenant à un demi-mille de l’ Argonaute.  
    Guillotin fit tirer une bordée de la batterie inférieure, mais il était déjà trop tard : les boulets plongèrent à une bonne encablure dans le sillage de la frégate. Ayant tranquillement complété son cercle, le Hotspur fonça vers la poupe de l’ Argonaute paralysé.  
    Un vaisseau de ligne était fait pour se battre de flanc. En le prenant par l’arrière, l’Anglais n’avait à craindre que les canons de retraite, deux pièces de 9 situées au-dessus de la galerie. Il lui serait relativement peu dangereux de passer à portée de pistolet et de prendre le navire en enfilade avec toutes ses pièces de tribord.  
    De son poste, Hazembat ne voyait pas l’ennemi, mais il sut qu’il était proche quand les canons de retraite se mirent à tonner au rythme accéléré de trois coups par minute, éveillant un tonnerre dans la timonerie. Il vit le hunier de misaine se gonfler légèrement, amorçant un timide pivotement du navire, et il se prit à espérer. C’est alors que l’Anglais tira sa première bordée. Le fond de la timonerie vola en éclats dans un fracas assourdissant. Ce devait être de la charge à mitraille, car les hommes tombaient autour de lui, fauchés net. Devant ses yeux, il vit Verdier, coupé en deux, perdre ses tripes. Ils n’étaient plus que trois à la barre.  
    Il entendait le vacarme et les hurlements comme à travers du coton. Toute son attention était concentrée sur l’évolution du navire qui reprenait pesamment sa route au plus près. Le gouvernail commençait à mordre.  
    Guillotin devait être indemne, car il l’entendit gueuler :  
    — Demaison, nom de Dieu ! bordez les écoutes plus serré ! Qu’est-ce que vous branlez, bordel ? Des hommes à étarquer, putain de Dieu !  
    La deuxième bordée vint par le travers arrière. Cette fois, c’était du boulet. Au milieu du crépitement rageur de la mousqueterie des soldats de marine, Hazembat sentit les impacts sur le bordage juste avant qu’une douleur fulgurante lui laboure le dos. Il eut le temps de crier : « Un homme à la barre ! » avant de sombrer dans le noir.  
    Il se réveilla le nez dans une toile rêche qui sentait la sueur et la crasse. Lentement, il prit conscience de ce qui l’entourait. Il était nu, étendu sur le ventre, dans une pénombre nauséabonde. Les bruits s’identifièrent un à un : gémissements, craquements, cris étouffés. Il ne se rappelait pas comment il était arrivé là. Sa dernière vision était celle des voiles commençant à s’emplir dans le ciel bleu pâle.  
    Rassemblant son énergie, il essaya de lever la tête, mais ses muscles ne répondaient pas et, quand il voulut les

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