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Marin de Gascogne

Marin de Gascogne

Titel: Marin de Gascogne Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Robert Escarpit
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capitaine Mac Nabb.  
    Bernard salua la compagnie.  
    — Ah, citoyen Hazembat ! s’écria O’Quin, quel bon vent t’amène ?  
    — Je voudrais vous parler, monsieur.  
    Levant les yeux de ses cartes, O’Quin lui lança un regard aigu.  
    — Je vois à ta mine que la chose est grave. Laisse-moi terminer ce rob de whist qui nous fera, Mac Nabb et moi, plus riches de cent dollars.  
    Il fit un signe au domestique.  
    — Porte un julep à ce garçon, Samuel. Tu goûteras cela en attendant, Hazembat. C’est une boisson de la Nouvelle-Orléans : rhum et menthe fraîche. Cela t’ouvrira l’appétit, car tu prendras bien le petit déjeuner avec moi ?  
    Entre le poulet frit et les bananes au crabe, Bernard raconta ses aventures sans en omettre le moindre détail. O’Quin, qu’il considérait comme le représentant attitré de son père, était le seul homme au monde avec qui il pût se montrer d’une pareille franchise.  
    D’abord surpris, le citoyen Coquin ne parut pas du tout choqué, mais plutôt amusé. Il finit par éclater de rire à s’en étrangler, secoué par des hoquets de plus en plus violents à mesure que Bernard avançait dans son récit.  
    — Mon garçon, dit-il en essuyant ses larmes, je te félicite. Ce n’est pas tout le monde qui peut se vanter d’avoir été dépucelé par la fille d’un conseiller à la Cour des Aides, sœur et belle-sœur de conseillers au Parlement de Bordeaux ! Je savais que Suzanne avait la cuisse légère dans son jeune temps, mais je croyais que l’âge et la dévotion l’avaient assagie ! Elle doit approcher de la quarantaine ! S’en tire-t-elle bien, au moins ?  
    — Je n’ai guère eu l’occasion de comparer, mais je crois que oui.  
    Quand il en arriva à l’épisode de Flora et de son châtiment, O’Quin redevint sérieux. Il mit la main sur le bras de Bernard.  
    — J’imagine ce que tu peux ressentir, mais il faut t’habituer à accepter le monde tel qu’il est. Alexis est un homme libéral et juste. Il ne pensait certainement pas à mal quand il a condamné la malheureuse à ce traitement barbare. Quant à Suzanne, tu n’imagines pas à quels excès de cruauté la jalousie peut conduire une femme dépitée.  
    — Je ne peux plus rester chez ces gens-là !  
    — Si tu étais anglais, je te dirais de prendre les choses avec humour. Ton histoire ressemble de manière étonnante à un roman de Fielding. Tu n’as jamais lu Joseph Andrews ?  
    —  Je ne connais de Joseph que le vieil esclave de M. Prunes Duvivier.  
    — Si tu étais protestant, tu aurais lu la Bible et tu aurais entendu parler d’un autre Joseph dont les démêlés avec la femme de Putiphar ressemblent un peu à ceux que tu as eus avec Suzanne, à cette différence près qu’il ne s’est pas laissé dépuceler et que c’est lui qui a été puni.  
    — J’aurais mieux aimé être puni à la place de Flora !  
    — Voilà bien le Gascon ! Ne dis pas de sottises. Tu t’en sors avec le bénéfice d’une éducation que beaucoup de gens t’envieraient. Aucune femme ne te résistera, maintenant ! Mais il n’est d’éducation qui ne doive s’achever. Je suis d’accord avec toi : il vaut mieux que tu t’en ailles.  
    — Sam Billings m’a dit que l’ Abigail allait bientôt appareiller.  
    — C’est exact et elle touchera à la Guadeloupe. Tu pourras y rester, si tu veux, puisque les Français y sont revenus.  
    — Et Flora ?  
    — Je suis sentimental comme toi, Hazembat. Je vais m’arranger pour l’acheter à Alexis. Ensuite, je l’affranchirai et je la marierai à un honnête nègre du port.  
    Le fou rire le reprit.  
    — Je pense à ton roman : ce sera une fin tout à fait édifiante. Quant au reste, je ne crois pas que Fielding serait allé aussi loin dans le détail libertin. Il est vrai qu’il n’était pas catholique. Ce mélange de dévotion et de polissonnerie me fait plutôt penser à Thérèse philosophe.  
    —  Qu’est-ce que c’est ?  
    — Oh ! c’est un livre qui raconte les aventures lascives d’une petite demoiselle hypocrite et passablement raisonneuse. C’est le genre de littérature qui a beaucoup fait pour dépraver trois générations de jeunes gens bien nés en leur donnant le goût de ces poisons aimables que sont la débauche et la philosophie. Les bourgeois sont plus malins : ils sont bêtes et vertueux, ou du moins ils font semblant, car c’est le meilleur

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