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Même les oiseaux se sont tus

Titel: Même les oiseaux se sont tus Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Arlette Cousture
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réchauffement. Élisabeth joua pendant plus de dix minutes. Ni les parents ni les fils ne bougèrent. Ces derniers qui, Jan le comprit, ne connaissaient rien à la musique hors les refrains mécaniques, étaient renversés. Il se demanda néanmoins s’ils étaient hypnotisés par le rythme lui-même ou plutôt par le mouvement du bras de sa sœur, qui entraînait le sein dans le rythme.
    – C’est vrai que vous enseignez la musique?
    – Oui, depuis des années.
    – Mais juste aux débutants?
    – Ici, oui. Je pourrais enseigner aux plus avancés si je voulais, mais j’aime bien les débutants.
    – Aht
    M me Dupuis s’était tue. Élisabeth lui en imposait vraiment. Elle jeta un regard d’appréciation à Jan qui sentit sa poitrine se rétrécir. S’il s’était écouté, il aurait bondi au cou de sa sœur et l’aurait embrassée.
    – Jan jouait mieux que moi jusqu’à ce qu’il soit blessé. Maintenant, il a troqué le violon contre les oignons.
    Élisabeth éclata d’un rire si drôle qu’elle entraîna toute la maisonnée derrière elle.
    – Les deux font pleurer.
    Jan l’avait relancée, Michelle pliée en deux à ses côtés. Il y avait longtemps que Jan espérait voir un fou rire dans cette famille et sa sœur le lui avait donné. Il pensa à Jerzy et regretta l’humour de son frère qui aurait certainement alimenté le feu par des dizaines d’autres ripostes.
    Michelle les raccompagna à la porte, l’air radieux. Elle expira un bon coup comme si elle venait d’échapper à une peur terrible. Jan l’embrassa deux fois et partit en courant pour rejoindre sa sœur qui avait pris les devants.
    – Merci, Élisabeth.
    – Pourquoi?
    – Pour la belle mise en scène.
    Élisabeth regarda son frère en souriant. Elle ne pouvait s’empêcher de lui envier son bonheur.
    – S’ils ne sont pas convaincus que tu ne démordras pas, ils ne comprendront jamais le cœur des Pawulscy.
    Ils entrèrent en ricanant, repensant à la déconfiture de M me Dupuis quand elle avait entendu la «vraie» musique que jouait Élisabeth.
    – J’espère qu’elle ne s’est pas sentie trop humiliée.
    – Tu ne l’as pas humiliée.
    – Les gens sont parfois étonnants.
    Jan entra dans le logement, se précipita dans la cuisine, décrocha le calendrier du mur et tourna les pages.
    – Il paraît qu’ici le mois de juin c’est le mois des mariages. Quel jour préférerais-tu?
    – Il paraît qu’ici on se marie le samedi.
    Jan voulut choisir le 23 juin pour célébrer aussi le premier anniversaire de son arrivée à Montréal. Élisabeth s’objecta, préférant le deuxième samedi de juin, espérant ainsi que Jerzy et Anna pourraient se déplacer entre les semis et les premières récoltes. Jan regarda sa sœur et voulut s’objecter, mais elle ne le lui permit pas.
    – C’est à prendre ou à laisser, Jan. Jerzy doit être là avec Anna et ton filleul. Je suis même prête à payer une partie du voyage.
    Jan savait qu’Élisabeth avait son ton d’aînée et il préféra feindre la soumission plutôt que de l’affronter. Il espéra sincèrement que les Dupuis choisiraient une autre date uniquement pour l’agacer. Ils l’ennuyèrent davantage par leur accord.
    Le mois de mai avait tellement excité les bourgeons qu’en trois jours le mont Royal et l’île Sainte-Hélène avaient verdi. Les arbres de la rue Saint-André s’étaient habillés eux aussi, au grand plaisir de Jan et de Michelle. Jan ressentit quand même une légère déception en se familiarisant avec le rituel du mariage à la canadienne, regrettant de ne pouvoir inviter lui-même les convives au bras de Michelle. Il obtint quand même l’accord des Dupuis pour passer le soulier et récolter un peu d’argent et les convainquit aussi de le laisser apporter les boissons. Cependant, il ne réussit jamais à convaincre Michelle de marcher de chez elle à l’église et de rentrer à pied.
    – Mais vous habitez tout près de l’église! C’est tellement beau de voir défiler toute la noce, les mariés devant.
    – Pas question. Ça porte malheur de voir la robe de la mariée avant le mariage.
    – Mais voyons donc! Tous les Polonais ont vu la robe de leur femme avant la bénédiction.
    – Et tu trouves qu’il n’y a pas de malheur en Pologne?
    Jan s’esclaffa devant ce sophisme et Michelle enchaîna en parlant des préparatifs que sa famille avaità faire, dressant liste sur liste d’articles à acheter. Elle avait gentiment fait

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