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Moi, Claude

Moi, Claude

Titel: Moi, Claude Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Robert Graves
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connaissance, il sentit quelque chose remuer sous son oreiller. Effrayé, il se tourna sur le côté et chercha son Hécate. Elle avait disparu, et il n’y avait personne dans la chambre.
    Le lendemain, il réunit ses amis ; il leur dit qu’il se mourait et que Pison et Plancine étaient ses assassins. Il les chargea de rapporter à Tibère et à Castor comment on l’avait traité et les supplia de venger son horrible mort. « Dites au peuple de Rome, ajouta-t-il, que je lui confie ma chère femme et mes six enfants. Qu’on ne croie pas Pison et Plancine s’ils prétendent qu’on leur avait ordonné de me tuer – ou du moins, si on les croit, que ce ne soit pas une raison de leur pardonner. » Il mourut le jour où la lettre G apparut seule sur le mur de sa chambre, en face de son lit : c’était le 9 octobre et le dix-septième jour de sa maladie.
    Son corps fut exposé sur la place du Marché d’Antioche pour que chacun pût voir les ongles bleuis et l’éruption rouge qui couvrait le ventre. On mit ses esclaves à la torture ; on questionna aussi ses affranchis à tour de rôle, chacun pendant vingt-quatre heures d’affilée et toujours avec des juges d’instruction nouveaux ; à la fin ils étaient si épuisés que s’ils avaient su quelque chose ils l’eussent certainement révélé, ne fût-ce que pour avoir la paix. Tout ce qu’on put découvrir fut qu’une sorcière, appelée Martine, avait été vue fréquemment en compagnie de Plancine et qu’elle était entrée dans la maison avec celle-ci pendant qu’il n’y avait personne, sauf Caligula. Un après-midi, juste avant le retour de Germanicus, tout le personnel était allé voir un combat donné par Pison à l’amphithéâtre, et la maison était restée sous la seule surveillance d’un vieux concierge sourd. Mais rien de tout cela n’expliquait ni le coq, ni les inscriptions des murailles, ni la disparition du talisman.
    Tous les chefs militaires et les notables romains de la province se réunirent pour nommer un gouverneur temporaire : leur choix tomba sur le commandant du 6 e régiment. Celui-ci fit immédiatement arrêter Martine et l’envoya à Rome sous escorte. Si Pison était jugé, on aurait là un des témoins les plus importants du procès.
    À la nouvelle de la mort de Germanicus, Pison, loin de cacher sa joie, offrit dans les temples des sacrifices d’actions de grâces. Plancine, qui venait de perdre une sœur, envoya promener son deuil et remit ses vêtements les plus voyants. Pison écrivit à Tibère que s’il avait été dépossédé des fonctions auxquelles celui-ci l’avait personnellement désigné, c’était seulement pour s’être opposé avec trop de hardiesse aux desseins perfides de Germanicus contre l’État ; maintenant il retournait reprendre son commandement en Syrie. Il faisait aussi allusion au « luxe et à l’insolence » de Germanicus. En effet, il essaya bien de retourner en Syrie et réunit même quelques troupes, mais le nouveau gouverneur assiégea le château de Cilicie dont il avait fait sa place forte, l’obligea à se rendre et l’envoya à Rome répondre aux accusations qu’on ne manquerait pas de porter contre lui.
    Pendant ce temps, Agrippine s’était embarquée pour l’Italie avec les deux enfants et l’urne qui contenait les cendres de son mari. À Rome, la mort de Germanicus avait causé une douleur immense : on eût dit que chaque famille avait perdu le plus aimé de ses membres. Bien que ni le Sénat ni les magistrats n’eussent donné aucun ordre à cet effet, la vie s’interrompit pendant trois jours entiers : boutiques fermées, tribunaux déserts, toutes affaires cessantes et le peuple entier en vêtements de deuil. J’entendis un homme dire dans la rue que c’était comme si le soleil s’était couché pour ne plus jamais se lever. Quant à ma douleur à moi, je n’ai pas le courage d’en parler.
     

20
     
     
    Agrippine aurait dû voyager par voie de terre, car l’hiver était venu et la saison de la navigation terminée. Mais elle prit la mer en dépit des tempêtes et arriva rapidement à Corfou, d’où elle n’était qu’à une journée de voile, par brise favorable, du port de Brindisi. Elle envoya de là des messagers annoncer qu’elle venait se mettre sous la protection du peuple d’Italie. Je me portai à sa rencontre avec ses quatre enfants et Castor, qui était maintenant de retour à Rome. Livie et Tibère s’étaient enfermés

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