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Moi, Claude

Moi, Claude

Titel: Moi, Claude Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Robert Graves
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pavanant au milieu de la foule hostile qui s’était aussitôt assemblée. Une voiture décorée, attelée de deux chevaux blancs bien appareillés, les attendait sur la voie Flaminia. La maison de Pison, qui surplombait la place du Marché, était également décorée. Il invita ses parents et ses amis à un banquet et mena grand tapage à seule fin de montrer au peuple de Rome qu’il ne le craignait pas et comptait sur Tibère et Livie.
    Tibère pensait faire juger Pison aux assises ordinaires et désigner pour l’accuser un certain sénateur sur lequel on pouvait compter pour le faire avec tant de maladresse que le procès se terminerait forcément par un acquittement. Mais les amis de Germanicus – en particulier les trois sénateurs qui l’avaient suivi en Syrie et étaient revenus avec Agrippine – firent opposition à ce choix. Finalement Tibère dut juger l’affaire lui-même, et, qui plus est, devant le Sénat, dont les amis de Germanicus pouvaient attendre tout l’appui dont ils auraient besoin. Le Sénat avait voté à la mémoire de Germanicus une quantité d’honneurs exceptionnels – cénotaphes, arcs de triomphe, rites semi-divins – auxquels Tibère n’avait pas osé s’opposer.
    Pison avait demandé à quatre sénateurs de prendre sa défense. Trois d’entre eux se récusèrent pour cause de maladie ou d’incapacité ; le quatrième, Gallus, répondit qu’il ne défendait jamais un accusé d’un crime capital dont il paraissait coupable, à moins d’avoir par là une occasion de plaire à la famille impériale. Calpurnius Pison, qui s’était dispensé d’assister au banquet de son oncle, s’offrit alors pour défendre l’honneur de la famille. Trois autres se joignirent à lui parce qu’ils étaient sûrs que Tibère acquitterait Pison et les récompenserait plus tard de leur complaisance. Séjan avait promis à Pison que Tibère, après avoir fait montre d’une extrême sévérité, ajournerait le procès sine die jusqu’à nouvelles preuves. On s’était déjà débarrassé de Martine, le principal témoin, en la faisant étouffer par les hommes de Séjan, et les accusateurs se trouvaient en mauvaise posture.
    On n’avait accordé à l’accusation que deux jours. L’homme qui devait primitivement la saboter au profit de Pison monta à la tribune et s’efforça de perdre du temps en allant rechercher contre celui-ci de vieilles histoires de corruption en Espagne au temps d’Auguste. Tibère le laissa parler pendant des heures ; à la fin le Sénat l’avertit par des toussotements, des bruits de pieds et des claquements de tablettes qu’il était temps d’entendre les principaux témoins ou que les choses risquaient de se gâter. Les quatre amis de Germanicus avaient préparé avec soin leur réquisitoire. Ils l’accusèrent d’avoir assassiné Germanicus en employant le poison et la sorcellerie, d’avoir offert des sacrifices d’actions de grâces en apprenant sa mort, enfin d’avoir attaqué la province à main armée avec des troupes levées d’une manière illégale.
    Pison protesta avec indignation contre l’accusation d’empoisonnement et de sorcellerie. Les plaignants n’avaient pas parlé des événements surnaturels survenus à Antioche de peur de provoquer des rires sceptiques ; ils ne pouvaient pas non plus accuser Pison de s’être entendu avec les serviteurs ou les esclaves de Germanicus, puisqu’on avait déjà établi que ceux-ci n’avaient rien eu à voir avec le meurtre. Aussi prétendit-on que Pison avait empoisonné Germanicus à un banquet où il était assis près de lui à sa propre table. Pison tourna l’accusation en ridicule. Comment l’aurait-il fait sans que personne s’en aperçût, alors que toute la table, sans parler des serviteurs, surveillait jusqu’à son moindre geste ? Par magie, peut-être ?
    Il tenait à la main un paquet de lettres que toute l’assistance – à leur dimension, à leur couleur, à la manière dont elles étaient attachées – reconnaissait comme étant de Tibère. Les amis de Germanicus proposèrent qu’il fût donné lecture de toutes les instructions que Pison avait reçues de Rome. Pison s’y refusa, sous prétexte que les lettres étaient revêtues du sceau du Sphinx – l’ancien sceau d’Auguste – qui les rendait inviolables sous peine de haute trahison. Tibère repoussa la proposition : ce serait, dit-il, une perte de temps que de lire ces lettres, qui ne contenaient

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