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[Napoléon 3] L'empereur des rois

[Napoléon 3] L'empereur des rois

Titel: [Napoléon 3] L'empereur des rois Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Max Gallo
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alors qu’il chassait en avant de la troupe de ses invités, les femmes pelotonnées dans leurs calèches, il s’est tout à coup retrouvé dans une clairière, seul, ne sachant plus où il était. Forêt de Pologne ou d’Allemagne ? Forêt de Fontainebleau ?
    Il est resté plusieurs minutes ainsi, emporté par ses souvenirs puis par l’imagination.
     
    Comment répondre aux Anglais qui, après avoir bombardé durant cinq jours Copenhague, ont obtenu la capitulation danoise et se sont emparés comme des pirates de la flotte danoise ?
    Maudite Angleterre ! Il faut lui serrer le cou .
    Il a dicté ce matin un décret renforçant le blocus. Il doit être effectif de la Hollande au Portugal, de la Baltique à l’Adriatique.
    Il a dû écrire à Louis pour qu’il fasse enfin fermer les ports de Hollande aux marchandises anglaises. « On n’est point roi quand on ne sait pas se faire obéir chez soi ! » lui a-t-il dit.
    Quant au Portugal, « je me regarde comme en guerre avec lui », a-t-il expliqué à Champagny, qui n’a pas les habiletés de M. de Talleyrand mais qui est sans doute moins vénal que lui.
    La guerre à nouveau ?
     
    Son cheval piaffe dans la clairière. Napoléon a un moment de désespoir, imaginant des forêts nouvelles, au Portugal, peut-être en Espagne, où tant d’hommes pourront être fauchés, qu’il va avoir à parcourir par tout temps.
    Mais peut-il laisser les Anglais dicter leur loi ? La Hollande, le Portugal doivent fermer leurs ports. L’Adriatique doit devenir un lac français. La Russie doit être une alliée dans ce conflit entre la terre et la mer.
    Il se répète alors que la meute se rapproche, emplissant de ses aboiements la forêt : « Je me suis décidé à ne plus rien ménager envers l’Angleterre ; cette puissance étant la souveraine des mers, le moment est venu où je dois être le dominateur du continent. D’accord avec la Russie, je ne crains plus personne. Le sort en est enfin jeté. »
    Le cerf passe, poursuivi par les chiens, qui reviennent bientôt dans la clairière, la langue pendante, bredouille.
    La colère saisit Napoléon.
    Que vaut donc cette meute ? Que sont donc ces rabatteurs ?
    Il se dirige seul vers le pavillon de chasse qu’il a fait meubler douillettement.
    Mme de Barrai l’attend.
    Il faut une femme pour le distraire quelques minutes. Elle est là, avec sa silhouette massive. Il rit. Elle s’étonne. Peut-il lui dire qu’il pense, en la voyant, qu’il ne lui manque qu’un gilet de fer pour ressembler à un cuirassier, mais qu’elle ne sait pas résister à la charge ?
     
    Elle est l’une des femmes qui sont ce soir à l’entrée du salon de l’Impératrice. Elle se tient proche de Pauline, dont elle est dame de compagnie.
    Il ignore le regard complice de Pauline. Ses soeurs Pauline, Caroline, mais aussi Talleyrand ou Fouché, ont pour lui des femmes plein leurs manchons ou leurs poches. Et même Joséphine est complaisante, dès lors qu’il ne s’agit que de brèves étreintes.
    Elle ne craint qu’une chose – la répudiation, le divorce. Et elle vit dans cette hantise depuis que Léon, mon fils, est né, depuis que Napoléon-Charles, le fils d’Hortense, est mort .
    Elle sait que je pense à l’avenir de l’Empire et de la dynastie .
    Alors, elle pousse vers le lit impérial l’une ou l’autre, qui ne pourront la remplacer sur le trône.
    Elle a favorisé l’installation, dans l’un des appartements du château, de Carlotta Gazzani, qui fait partie de sa suite. Mais ce qu’elle a à craindre de cette belle Génoise ne l’inquiète pas. Joséphine n’a jamais eu le culte de la fidélité !
    Et elle n’ignore pas combien l’ennui naît vite de la rencontre de deux corps qui ne recherchent que le plaisir !
    Et elle sait que Napoléon ne supporte ni l’ennui ni la sensation de vide.
     
    Il fait quelques pas dans le salon de l’Impératrice. Il voit Talleyrand dans son costume d’apparat de vice-Grand Électeur. Le visage du prince de Bénévent paraît encore plus pâle, contrastant avec son habit de velours rouge aux parements d’or, les manches couvertes de broderies d’or, du poignet à l’épaule, le cou caché par une cravate de dentelle.
    Napoléon le prend par le bras, l’entraîne dans un coin du salon.
    — C’est chose singulière, dit-il. J’ai rassemblé à Fontainebleau beaucoup de monde…
    Il se tourne, il montre d’un geste cette famille de rois qu’il a constituée.

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