Bücher online kostenlos Kostenlos Online Lesen
Nice

Nice

Titel: Nice Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Max Gallo
Vom Netzwerk:
demandait-il, tu as froid ?
    Il s’approchait, il touchait ses épaules. Elle frissonnait,
elle disait :
    — Non, non, ça va !
    Elle sortait la première, allant jusqu’à la place Garibaldi
où le vendeur de journaux s’installait vers six heures, au moment où passaient
les premiers tramways. En rentrant, avant même d’enlever son châle, elle posait
le journal sur la table, le dépliait lentement, lisait, ses lèvres remuant,
épelant les lettres. Si Vincente s’approchait de la table, elle s’en éloignait.
    — J’arrive pas à lire quand tu es là, disait-elle.
    Il retournait à la cuisinière, la regardant, la ride qui
partageait son front, profonde, il écoutait ce murmure, ces phrases que peu à
peu elle comprenait et relisait à haute voix « le Gouvernement ne quitte
Paris qu’après avoir assuré la défense… ».
    Elle interrogeait Vincente, répétait « le Gouvernement
ne quitte Paris »…
    — Ça veut dire qu’ils s’en vont ou qu’ils restent ?
    Rares étaient les nouvelles de la guerre en Méditerranée.
Elle repliait le journal.
    — Je vais le lire à Madame Gancia. Pour Dante, ils ne
disent jamais rien.
    Quand elle revenait de chez Madame Gancia, Lisa commençait à
attendre le facteur. Souvent, elle rentrait du marché en courant, craignant
qu’il ne soit déjà passé, interrogeant une voisine qui lavait son linge dans la
cour, laissant la porte ouverte pour entendre les pas dans l’escalier,
descendant vers midi sous le porche pour le guetter. C’était un remplaçant,
maladroit, timide, qui ne connaissait pas les familles du quartier. Il
s’excusait, « ils sont tous au front », disait-il. Lisa impatiente,
saisissait le paquet de lettres, qu’il n’osait refuser.
    — Faites voir, disait-elle autoritaire. Je vais vous
dire.
    Mais elle ne reconnaissait pas l’écriture de Dante, elle
n’avait plus envie de remonter chez elle, toutes ces choses à faire jusqu’au
lendemain matin.
    — Je n’ai pas le droit de vous laisser voir, répétait
le facteur.
    Lisa se tournait vers Madame Gancia.
    — Dites, est-ce qu’ils ont le droit de nous les prendre ?
Vous croyez qu’ils ont le droit ? Vous n’avez rien, vous non plus.
     
    Dante, pourtant avait écrit. Deux lettres postées au
cinquième dépôt des équipages de la flotte à Toulon alors qu’il attendait son
embarquement, lisant dans un coin de la chambrée, cependant que d’autres
matelots jouaient aux dés sur les couvertures grisâtres, qu’un second maître
entrait lançant des noms et au début d’août, ç’avait été « Quartier-maître
électricien Revelli Dante… »
    Son sac sur l’épaule gauche, Dante avait franchi la
passerelle du Cavalier, le destroyer sur lequel il venait d’être
affecté. Un factionnaire, baïonnette au canon, lui indiquant d’un mouvement du
menton le poste du « Bidel » – le capitaine d’armes – un
premier maître breton, Guichen, qui feuilletait l’ordre d’embarquement, le
livret militaire.
    — Encore un Niçois, grandes gueules les Niçois, fais
attention.
    Il rendait à Dante son livret militaire.
    — Ici, c’est tout bien ou tout mal, travaille comme un
Breton et tout ira bien.
    Un second maître, Giocondi, un Corse, conduisait Revelli
jusqu’à la batterie, lui montrait son hamac, sa caisse, s’asseyait pendant que
Dante vidait son sac.
    — Le Pacha, De Jarrivon, il n’est pas méchant, tu viens
d’un gros-cul ? C’est calme ici, meilleur que sur les cuirassés.
    Sur le pont, des hommes faisaient la chaîne jusqu’à la
cambuse pour embarquer les boules de pain, les sacs de pommes de terre. Des « bouchons
gras », ces matelots de la machine qui ne connaissaient de la mer que le
roulis, étaient groupés à l’arrière, hissant à l’aide d’un palan, la partie
supérieure d’une bielle, la graisse noire qui entourait l’acier coulant sur
eux, maculant le pont.
    — Traîne pas, dit Giocondi, ils vont t’embaucher.
    Dante repéra les moteurs du monte-charge à torpilles, les
dynamos d’éclairage dont il avait la responsabilité. Il faisait équipe avec
Raffin, un quartier-maître mécanicien mobilisé depuis trois semaines et qui
entraînait Dante vers les soutes, lui tendait une cigarette quand ils s’étaient
planqués près des ventilateurs.
    — Ils viendront pas nous chercher ici.
    Raffin était mécanicien de locomotive.
    — C’est pas un mauvais rafiot, mais comme partout, te
fais pas

Weitere Kostenlose Bücher