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Noir Tango

Noir Tango

Titel: Noir Tango Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Régine Deforges
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discret que le « Plaza ». J’ai
eu soif, je suis entré dans ce café, des marins, des gens du port déjeunaient…
    — Je n’ai vu personne !
    — Ils se seront enfuis. Je n’étais là
que depuis quelques instants quand j’ai été attaqué par derrière. Ils ont dû me
croire mort, ce qui expliquerait pourquoi ils ont tous disparus. Tu m’as trouvé
ici ?
    — Non, dans la cuisine.
    — Je ne comprends pas… Ne restons pas
là, ils peuvent revenir, à moins qu’ils n’aient été prévenir la police, ce qui
ne vaudrait pas mieux.
    — Tu ne peux pas sortir comme ça, il te
faut un médecin.
    — On verra plus tard. Viens.
    Rue Necochea, à part quelques chiens, ils ne
virent personne ; le quartier semblait vidé de ses habitants.
    — Allons vers l’avenue Don Pedro de
Mendoza, elle longe le fleuve Miachulo, on y trouvera un moyen de transport.
    Sur l’avenue, un autobus brinquebalant
tentait d’éviter les nids-de-poule de la chaussée. Tavernier lui fit signe de s’arrêter.
Le véhicule ralentit dans un grincement de ferraille.
    — Monte, dit-il en poussant Léa.
    Des fanfreluches ornaient le pare-brise, des
breloques, des images de saints, de la Vierge, de vedettes de football, des
photos d’enfants, de pin-up , s’entrechoquaient au rythme des cahots.
    —  ¡ Che ! ¿ Señor,
fue su mujer que lo puso en tal estado ? [20]
    —  Es muy celosa. [21]
    —  Ya veo, [22] fit le conducteur d’un air compréhensif, en vendant les tickets sans
cesser de conduire.
    Ils allèrent s’installer dans le fond de l’autobus,
coincés entre deux matrones encombrées de paquets. Durant tout le trajet, ils n’échangèrent
pas un mot. Blottie contre lui, Léa sentait la peur la quitter peu à peu.
    Le chauffeur s’arrêta devant un grand
bâtiment et cria dans leur direction, en montrant le bâtiment du doigt.
    —  Señor, tendría que es a curarse
al hospital [23] .
    —  Gracias. Es una buena idea [24] .
    François et Léa descendirent.
    — Hep, taxi !
    — Et l’hôpital ? dit Léa.
    — Une autre fois, monte… à l’ambassade de France.
    — Tavernier, vous
êtes sûr que vous ne me cachez rien ?
    — Monsieur l’Ambassadeur !…
    — Bon d’accord, gardez vos secrets, mais
ne comptez pas sur moi pour vous venir en aide si vous vous mettez la police
péroniste sur le dos. Le général Velazco n’est pas un rigolo. Si vous et vos
amis tombiez entre leurs mains, je ne pourrais rien faire. Les instructions du
Quai sont formelles : pas d’anicroches avec les Argentins.
    — Rassurez-vous, monsieur l’Ambassadeur,
nous n’avons rien contre le gouvernement argentin…
    — Je ne veux pas savoir contre qui vous
en avez…
    — Mais, cher ami, contre personne.
    — Ne me prenez pas pour un idiot, Tavernier,
j’ai mes informateurs, moi aussi. Et cette jeune fille qui est actuellement
chez ma femme ?…
    — Mademoiselle Delmas ?… C’est une
amie de Sarah, d’une excellente famille bordelaise…
    — Bordelaise ?… Bon… Mais que
faisiez-vous avec elle dans ce quartier louche ?
    —  à cette heure de la journée, la Boca est plutôt calme. Je voulais lui montrer un
quartier pittoresque de Buenos Aires.
    — Pittoresque, pittoresque… la place de
cette jeune fille est plutôt dans les magasins de la rue Florida que dans la
Boca, même à une heure de l’après-midi… Qu’est-elle venue faire seule, ici, en
Argentine, sans chaperon ?…
    — Vous êtes démodé, Vladimir, les
jeunes filles voyagent sans chaperon de nos jours, dit Tavernier en éclatant de
rire.
    — C’est une erreur. Quoi qu’il en soit,
dites-lui de se montrer prudente. Elle est descendue chez madame Ocampo, m’a-t-on
dit ?
    — Oui, elles se sont connues à
Nuremberg.
    —  à Nuremberg ?… Mais que diable une jeune fille comme mademoiselle Delmas
faisait-elle à Nuremberg ?
    — Elle assistait au procès des criminels
nazis.
    — Des criminels !… les bras m’en
tombent !… Ne me dites pas qu’elle a été déportée ?… Pauvre enfant.
    — Non, elle était dans la Croix-Rouge. Si
cela vous intéresse, vous n’aurez qu’à le lui demander.
    — Je m’en voudrais de ranimer de
mauvais souvenirs. Ce sont des moments terribles que je n’aime pas évoquer.
    — Ils me semblent plutôt difficiles à
oublier.
    Le ton sec avec lequel François Tavernier
prononça ces mots fit hausser d’étonnement les sourcils de Vladimir d’Ormesson.
    — Ce

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