Oeuvres de Napoléon Bonaparte, Tome I.
Masséna, qui est partie ce matin de Vicence et file sur Villa-Nova, et la division du général Augereau, qui est partie de Padoue et va sur Porte-Legnago.
Wurmser, échappé de Bassano, s'est rendu à Citadella, de là à Vicence et à Montebello rejoindre ses troupes, et a essayé de forcer Verone ; mais Kilmaine que j'y avais laissé, prévoyant son projet, l'a repoussé. J'apprends à cette heure qu'il longe l'Adige et tâche de gagner Mantoue. Il est possible que ce projet lui réussisse : alors, moyennant deux demi-brigades de plus que je donnerai à Sahuguet, je suis maître de l'Italie, du Tyrol et du Frioul.
BONAPARTE.
Au quartier-général à Milan, le 5e jour complémentaire an 4 (21 septembre 1796).
À sa majesté le roi de Sardaigne.
Les officiers préposés par votre majesté pour commander en la partie de ses états qui lui a été restituée par le traité de paix, voient, sinon avec plaisir, au moins avec indifférence, les assassinats et les brigandages qui se commettent contre les Français.
Par le traité de paix conclu entre votre majesté et la république française, la république devait continuer à occuper la partie de ces états qui avait été laissée à l'armée par le traité d'armistice : croyant faire quelque chose d'agréable à votre majesté, je lui ai rendu non-seulement le gouvernement civil, mais encore le gouvernement militaire, avec la clause spéciale que les routes seraient gardées, et que même nos convois seraient escortés par ses troupes.
Je prie donc votre majesté de vouloir bien ordonner que l'on tienne un corps de troupes respectable aux villages de Limon et de Limonais, lequel ferait des patrouilles jusqu'à Lacas, escortant les convois, et prenant toutes les mesures nécessaires pour maintenir cette route sûre, ainsi que Vadier, et généralement dans tous les pays voisins de Demont, formant la communication de Coni à Barcelonnette.
Je demande également à votre majesté que les cinq individus qui ont été arrêtés à Borgo-San-Dalmazzo par les Français, soient remis entre les mains du commandant militaire à Coni.
Je la prie également de donner les ordres à ses différens gouverneurs, pour qu'ils s'emploient avec loyauté à faire arrêter les brigands, dans quelques endroits qu'ils soient trouvés.
Indépendamment de l'intérêt de l'humanité et de la justice, votre majesté donnera, par cette conduite, une preuve de sa loyauté, et contribuera à éteindre ces germes de discorde, qui finiraient par se propager dans l'intérieur de ses états.
BONAPARTE.
Au ministre des affaires étrangères du roi de Sardaigne.
Je ne suis point diplomate, Monsieur, je suis militaire : vous pardonnerez ma franchise. Sur différens points des états de sa majesté, les Français sont assassinés, volés. Par le traité de paix, le roi qui est tenu de nous accorder le passage sur ses états, doit nous le donner sûr, et ce n'est même que pour cet effet que, contre la teneur du traité de paix, j'ai pris sur moi de restituer à sa majesté non-seulement le gouvernement civil, mais même le gouvernement militaire dans la partie de ses états qui lui a été restituée par la république. À Viné, à Limon, sous les yeux de la garnison de Demont, sous ceux des corps de troupes que M. Franchar commande à Borgo-San-Dalmazzo, l'on se porte tous les jours à des excès qui paraissent non-seulement tolérés, mais même encouragés par le gouvernement.
Je vous demanderai donc une explication simple :
1°. Le roi ne doit-il pas être tenu d'indemniser et de réparer les pertes faites en conséquence des délits qui se commettent sur son territoire contre les Français, lorsque ces délits se commettent en plein jour et par des corps soldés de deux ou trois cents personnes ?
2°. Le roi a-t-il, avec vingt-cinq mille hommes qu'il a sous les armes, assez de forces pour contenir dans ses états des brigands, et faire respecter les lois de la justice, de l'humanité et des traités ?
On ne juge les hommes, monsieur, que par leurs actions : la loyauté du roi est généralement connue ; cependant on se trouve bien forcé de penser qu'il est des raisons de politique qui portent à encourager, ou du moins à tolérer des atrocités aussi révoltantes.
J'ai écrit à sa majesté elle-même, je vous prie de lui présenter ma lettre.
Le gouvernement français ne fera rien ouvertement ni secrètement, qui tendrait à détruire ou à affaiblir l'effet du gouvernement du roi
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