Oeuvres de Napoléon Bonaparte, TOME III.
neuf cents hommes faits prisonniers et deux mille hommes tués, avait fait diriger deux colonnes par des gorges difficiles pour tourner les Français.
Aussitôt que le maréchal Mortier s'aperçut de cette manoeuvre, il marcha droit aux troupes qui l'avaient tourné, et se fit jour au travers des lignes de l'ennemi, dans l'instant même où le neuvième régiment d'infanterie légère et le trente-deuxième régiment d'infanterie de ligne, ayant chargé un corps russe, avaient mis ce corps en déroute après lui avoir pris deux drapeaux et quatre cents hommes.
Cette journée a été une journée de massacre. Des monceaux de cadavres couvraient un champ de bataille étroit ; plus de quatre mille Russes ont été tués ou blessés ; treize cents ont été faits prisonniers. Parmi ces derniers se trouvent deux colonels.
De notre côté, la perte a été peu considérable ; le quatrième et le neuvième d'infanterie légère ont le plus souffert. Les colonels du centième et du cent-troisième ont été légèrement blessés ; le colonel Wattier, du quatrième régiment de dragons, a été tué. S. M. l'avait choisi pour un de ses écuyers : c'était un officier d'une grande valeur. Malgré les difficultés du terrain, il était parvenu à faire, contre une colonne russe, une charge très-brillante, mais il fut atteint d'une balle, et trouva la mort dans la mêlée.
Il paraît que les Russes se retirent à grandes journées. L'empereur d'Allemagne, l'impératrice, le ministère et la cour sont à Brünn en Moravie. Tous les grands ont quitté Vienne ; toute la bourgeoisie y est restée. On attend à Brünn l'empereur Alexandre, à son retour de Berlin.
Le général comte de Giulay a fait plusieurs voyages, portant des lettres de l'empereur de France et d'Allemagne. L'empereur d'Allemagne se résoudra sans doute à la paix lorsqu'il aura obtenu l'assentiment de l'empereur de Russie.
En attendant, le mécontentement des peuples est extrême.
On dit à Vienne, et dans toutes les provinces de la monarchie autrichienne, que l'on est mal gouverné ; que, pour le seul intérêt de l'Angleterre, on a été entraîné dans une guerre injuste et désastreuse ; que l'on a inondé l'Allemagne de barbares mille fois plus à craindre que tous les fléaux réunis ; que les finances sont dans le plus grand désordre ; que la fortune publique et les fortunes particulières sont ruinées par l'existence d'un papier-monnaie qui perd cinquante pour cent ; qu'on avait assez de maux à réparer, pour qu'on ne dût pas y ajouter encore tous les malheur de la guêrre.
Les Hongrois se plaignent d'un gouvernement illibéral qui ne fait rien pour leur industrie, et se montre constamment jaloux de leurs priviléges, et inquiet de leur esprit national.
En Hongrie, comme en Autriche, à Vienne comme dans les autres villes, on est persuadé que l'empereur Napoléon a voulu la paix ; qu'il est l'ami de toutes les nations, et de toutes les grandes idées.
Les Anglais sont les perpétuels objets des imprécations de tous les sujets de l'empereur d'Allemagne et de la haine la plus universelle. N'est-il pas temps enfin que les princes entendent la voix de leurs peuples, et qu'ils s'arrachent à la fatale influence de l'olygarchie anglaise.
Depuis le passage de l'Inn, la grande armée a fait, dans différentes affaires d'avant-garde, et dans les différentes rencontres qui ont eu lieu, environ dix mille prisonniers.
Si l'armée russe, avait voulu attendre les Français, elle était perdue. Plusieurs corps d'armée la poursuivent vivement.
Du château de Schoenbrünn, le 23 brumaire an 14 (14 novembre 1805).
Vingt-troisième bulletin de la grande armée.
Au combat de Diernstein, où quatre mille Français attaqués dans la journée du 11 par vingt-cinq à trente mille Russes, ont gardé leurs positions, tué à l'ennemi trois à quatre mille hommes, enlevé des drapeaux et fait treize cents prisonniers, les quatrième et neuvième régimens d'infanterie légère et les centième et trente-deuxième regimens d'infanterie de ligne se sont couverts de gloire. Le général Gazan, y a montré beaucoup de valeur et de conduite ; les Russes, le lendemain du combat, ont évacué Krems et quitté le Danube, en nous laissant quinze cents de leurs prisonniers dans le plus absolu dénuement. On a trouvé dans leur ambulance beaucoup d'hommes qui avaient été blessés et qui étaient morts dans la nuit.
L'intention des Russes paraissait être d'attendre
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