Oeuvres de Napoléon Bonaparte, TOME III.
l'Ukraine, du Kamtschatka, de la Grande-Tartarie, et les Normande, les Gascons, les Bretons et les Bourguignons en venir aux mains et s'égorger, sans cependant que leur pays ait rien de commun, ou qu'il y ait entre eux aucun intérêt politique immédiat ; et ils ont assez de bon sens pour dire, dans leur mauvais bohémien, que le sang humain est devenu une marchandise dans les mains des Anglais. Un gros fermier morave disait dernièrement à un officier français, en parlant de l'empereur Joseph II, que c'était l'empereur des paysans, et que, s'il avait continué a vivre, il les aurait affranchis des droits féodaux qu'ils payent aux couvens de religieuses.
Nous avons trouvé à Brünn soixante pièces de canon, trois cents milliers de poudre, une grande quantité de blé et de farine, et des magasins d'habillement très-considérables.
L'empereur d'Allemagne s'est retiré à Olmutz. Nos postes sont à une marche de cette place.
Brünn, le 30 brumaire an 14 (20 novembre 1805).
Vingt-huitième bulletin de la grande armée.
L'empereur est entré a Brünn le 29, à dix heures du matin.
Une députation des états de Moravie, à la tête de laquelle se trouvait l'évêque, est venue a sa rencontre. L'empereur est allé visiter les fortifications, et à ordonné qu'on armât la citadelle, dans laquelle on a trouvé plus de six mille fusils, une grande quantité de munitions de guerre de toute espèce, et entre autres quatre cents milliers de poudre.
Les Russes avaient réuni toute leur cavalerie, qui formait un corps d'environ six mille hommes, et voulaient défendre la jonction des routes de Brünn et d'Olmutz. Le général Walther les contint toute la journée, et, par différentes charges, les obligea à abandonner du terrain. Le prince Murat fit marcher la division de cuirassiers du général d'Hautpoult et quatre escadrons de la garde impériale.
Quoique nos chevaux fussent fatigués, l'ennemi fut chargé et mis en déroute. Il laissa plus de deux cents hommes, cuirassiers ou dragons d'élite, sur le champ de bataille : cent chevaux sont restés dans nos mains.
Le maréchal Bessières, commandant la garde impériale, a fait, à la tête de quatre escadrons de la garde, une brillante charge qui a dérouté et culbuté l'ennemi. Rien ne contrastait comme le silence de la garde et des cuirassiers et les hurlemens des Russes.
Cette cavalerie russe est bien montée, bien équipée : elle a montré de l'intrépidité et de la résolution ; mais les hommes ne paraissent pas savoir se servir de leurs sabres ; et, à cet égard, notre cavalerie a un grand avantage. Nous avons eu quelques hommes tués et une soixantaine de blessés, parmi lesquels se trouvent le colonel Durosnel, du seizième de chasseurs, et le colonel Bourdon, du onzième de dragons.
L'ennemi s'est retiré de plusieurs lieues.
Brünn, le 2 Frimaire an 14 (23 novembre 18o5).
Vingt-neuvième bulletin de la grande armée.
Le maréchal Ney a fait occuper Brixen, après avoir fait beaucoup de prisonniers à l'ennemi, il a trouvé dans les hôpitaux un grand nombre de malades et blessés autrichiens. Le 26 brumaire, il s'est emparé de Clauzen et de Bolzen.
Le général Jellachick, qui défendait le Voralberg, était occupé.
Le maréchal Bernadotte occupe Iglau. Ses partis sont entrés en Bohême.
Le général de Wrede, commandant les Bavarois, a pris une compagnie d'artillerie autrichienne, cent chevaux de troupe, cinquante cuirassiers et plusieurs officiers. il s'est emparé d'un magasin considérable d'avoine et autres grains, et d'un grand nombre de chariots attelés, chargés du bagage de plusieurs régimens et officiers autrichiens.
L'adjudant-commandant Maison, a fait prisonniers, sur la roule d'Iglau à Brünn, deux cents hommes des dragons de la Tour et des cuirassiers de Hohenlohe. Il a chargé un autre détachement de deux cents hommes, et a fait cent cinquante prisonniers.
Des reconnaissances ont été portées jusqu'à Olmutz. La cour a évacué cette place et s'est retirée en Pologne.
La saison commence à devenir rigoureuse. L'armée française a pris position. Sa tête est appuyée par la place de Brünn, qui est très-bonne, et qu'on s'occupe à armer et à mettre dans le meilleur état de défense.
Au bivouac d'Austerlitz, le 10 frimaire an 14 (1er décembre 1805).
Proclamation à la grande armée.
Soldats,
L'armée russe se présente devant vous pour venger l'armée autrichienne d'Ulm. Ce sont ces mêmes bataillions, que vous
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