Oeuvres de Napoléon Bonaparte, TOME III.
autre époque les lois attendues avec tant d'intérêt par la nation. Mais il s'est convaincu que le temps n'est pas venu où l'on portera dans ces grandes discussions le calme et l'unité d'intention qu'elles demandent.
Le premier consul, BONAPARTE.
Paris, 16 nivose an 10 (6 janvier 1803).
Au citoyen Reding.
Citoyen Reding, depuis deux ans vos compatriotes m'ont quelquefois consulté sur leurs affaires. Je leur ai parlé comme l'aurait fait le premier magistrat des Gaules dans le temps où l'Helvétie en faisait partie.
Les conseils que je leur ai donnés pouvaient les conduire à bien, et leur épargner deux mois d'angoisses ; ils en ont peu profité. Vous me paraissez animé du désir du bonheur de votre patrie ; soyez secondé par vos compatriotes, et que l'Helvétie se replace enfin parmi les puissances de l'Europe.
Les circonstances de la guerre ont conduit les armées françaises sur votre territoire : le désir de la liberté a armé vos peuples, et surtout ceux des campagnes, contre les priviléges. Des événemens de différente nature se sont succédés en peu d'années ; vous avez éprouvé de grands maux ; un grand résultat vous reste : l'égalité et la liberté de vos concitoyens.
Quel que soit le lieu où naisse un Suisse aujourd'hui, sur les bords du Léman comme sur ceux de l'Aaar, il est libre : c'est la seule chose que je vois distinctement dans votre état politique actuel.
La base des droits publics de l'Europe est aujourd'hui de maintenir dans chaque pays l'ordre existant. Si toutes les puissances ont adopté ce principe, c'est que toutes ont besoin de la paix et du retour des relations diplomatiques et commerciales.
Le peuple français ne peut donc reconnaître qu'un gouvernement qui serait fondé sur les principes qui vous régissent aujourd'hui.
Vous êtes sans organisation, sans gouvernement, sans volonté nationale...
Pourquoi vos compatriotes ne feraient-ils pas un effort ? Qu'ils évoquent les vertus patriotiques de leurs pères ! Qu'ils sacrifient l'esprit de système, l'esprit de faction, à l'amour du bonheur et de la liberté publics !
Alors vous ne craindrez pas d'avoir des autorités qui soient le produit de l'usurpation momentanée d'une faction ; vous aurez un gouvernement, parce qu'il aura pour lui l'opinion et qu'il sera le résultat de la volonté nationale. Toute l'Europe renouvellera avec vous ses relations ; la France ne sera arrêtée par aucun calcul d'intérêt particulier ; elle fera tous les sacrifices qui pourront assurer davantage votre constitution, l'égalité et la liberté de vos concitoyens ; elle continuera par-là à montrer pour vous ses sentimens affectueux et paternels qui, depuis tant de siècles, forment les liens de ces deux parties indépendantes d'un même peuple.
BONAPARTE.
Lyon, 6 pluviose an 10 (26 janvier 1802).
Discours prononcé par le premier consul au sein de la consulte ou assemblée italienne convoquée par lui à Lyon. [Bonaparte voulant donner à la république cisalpine, fondée par lui en 1796, une dernière organisation, avait convoqué à Lyon les membres les plus influent de cette république. Une constitution avait été créée, et Bonaparte nommé président de la république régénérée. M. de Melzi, l'un des Italiens les plus distingués, fut choisi par loi pour vice-président.].
La république cisalpine, reconnue depuis Campo-Formio, a déjà éprouvé bien des vicissitudes.
Les premiers efforts que l'on a faits pour la constituer ont mal réussi.
Envahie depuis par des armées ennemies, son existence ne paraissait plus probable, lorsque le peuple français, pour la deuxième fois, chassa, par la force de ses armes, vos ennemis de votre territoire.
Depuis ce temps on a tout tenté pour vous démembrer : mais la protection de la France l'emporte, et vous avez été reconnus à Lunéville.
Accrus d'un cinquième, vous existez plus puissans, plus consolidés, avec plus d'espérance ! !
Composés de six nations différentes, voas allez être réunis sous le régime d'une constitution plus adaptée que toute autre à vos moeurs et à vos circonstances.
Je vous ai réunis à Lyon autour de moi comme les principaux citoyens de la Cisalpine. Vous m'avez donné les renseignemens nécessaires pour remplir la tâche auguste que m'imposait mon devoir, comme premier magistrat du peuple français et comme l'homme qui a le plus contribué à votre création.
Les choix que j'ai faits pour remplir vos premières
Weitere Kostenlose Bücher