Oeuvres de Napoléon Bonaparte, Tome IV.
embrassa dans sa jeunesse le parti des armes. Il faisait partie de la confédération de Bar, fut fait prisonnier par les Russes et conduit à Kasan. Ayant perdu le peu de fortune qu'il avait, il se livra à l'agriculture, et fut employé comme fermier des biens d'un curé. Il se maria en premières noces à l'âge de soixante-dix ans, et eut quatre enfans de ce mariage. A quatre-vingt-six ans il épousa une seconde femme, et en eut six enfans, qui sont tous morts : il ne lui reste que le dernier fils de sa première femme. Le roi de Prusse, en considération de son grand âge, lui avait accordé une pension de vingt-quatre florins de Pologne par mois, faisant quatorze livres huit sous de France. Il n'est sujet à aucune infirmité, jouit encore d'une bonne mémoire, et parle la langue latine avec une extrême facilité ; il cite les auteurs classiques avec esprit et à propos. La pétition dont la traduction est ci-jointe, est entièrement écrite de sa main. Le caractère en est très-ferme et très-lisible.
Pétition.
Sire,
Mon extrait baptistaire date de l'an 1690 ; donc j'ai à présent 117 ans.
Je me rappelle encore la bataille de Vienne, et les temps de Jean Sobieski.
Je croyais qu'ils ne se reproduiraient jamais, mais assurément je m'attendais encore moins à revoir le siècle d'Alexandre.
Ma vieillesse m'a attiré les bienfaits de tous les souverains qui ont été ici, et je réclame ceux du grand Napoléon, étant à mon âge plus que séculaire, hors d'état de travailler.
Vivez, sire, aussi long-temps que moi ; votre gloire n'en a pas besoin, mais le bonheur du genre humain le demande.
Signé
NAROCKI.
De notre camp impérial de Varsovie, le 29 janvier 1807.
Cinquante-cinquième bulletin de la grande armée,
Voici les détails du combat de Mohringen :
Le maréchal prince de Ponte-Corvo arriva à Mohringen avec la division Drouet, le 25 de ce mois, à onze heures du matin, au moment où le général de brigade Pactod était attaqué par l'ennemi.
Le maréchal prince de Ponte-Corvo fit attaquer sur-le-champ le village de Pfarresfeldehen par un bataillon du neuvième d'infanterie légère. Ce village était défendu par trois bataillons russes, que l'ennemi fit soutenir par trois autres bataillons. Le prince de Ponte-Corvo fit aussi marcher deux autres bataillons pour appuyer celui du neuvième. La mêlée fut très-vive. L'aigle du neuvième régiment d'infanterie légère fut enlevée par l'ennemi ; mais à l'aspect de cet affront, dont ce brave régiment allait être couvert pour toujours, et que ni la victoire, ni la gloire acquise dans cent combats n'auraient lavé, les soldats, animés d'une ardeur inconcevable, se précipitent sur l'ennemi, le mettent en déroute et ressaisissent leur aigle.
Cependant la ligne française, composée du huitième de ligne, du vingt-septième d'infanterie légère, et du quatre-vingt-quatorzième, était formée. Elle aborde la ligne russe, qui avait pris position sur un rideau. La fusillade devient vive et à bout portant.
A l'instant même le général Dupont débouchait de la route d'Holland avec les trente-deuxième et quatre-vingt-seizième régimens, il tourna la droite de l'ennemi. Un bataillon du trente-deuxième régiment se précipita sur les Russes avec l'impétuosité ordinaire à ce corps ; il les mit en désordre et leur tua beaucoup de monde.
Il ne fit de prisonniers que les hommes qui étaient dans les maisons. L'ennemi a été poursuivi pendant deux lieues. La nuit a empêché de continuer la poursuite. Les comtes Fabien et Gallitzin commandaient les Russes. Ils ont perdu trois cents hommes faits prisonniers, mille deux cents hommes laissés sur le champ de bataille, et plusieurs obusiers. Nous avons eu cent hommes tués et quatre cents blessés.
Le général de brigade Laplanche s'est fait distinguer. Le dix-neuvième de dragons a fait une belle charge sur l'infanterie russe. Ce qui est à remarquer, ce n'est pas seulement la bonne conduite des soldats et l'habileté des généraux, mais la rapidité avec laquelle les corps ont levé leurs cantonnemens, et fait une marche très-forte pour toutes autres troupes, sans qu'il manquât un seul homme sur le champ de bataille ; voilà ce qui distingue éminemment des soldats qui ne sont mus que par l'honneur.
Un Tartare vient d'arriver de Constantinople, d'où il est parti le 1er janvier. Il est expédié à Londres par la Porte.
Le 30 décembre la guerre contre la Russie avait été solennellement
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