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Par ce signe tu vaincras

Par ce signe tu vaincras

Titel: Par ce signe tu vaincras Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Max Gallo
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premier livré aux bourreaux.
    Il est mort sans un cri : de son corps dont il ne restait plus que le tronc et la tête, les membres avaient été tranchés lentement comme on scie les branches d’un arbre.
    Puis Montoya a été conduit au supplice. J’ai fermé les yeux lorsque les bourreaux ont approché des siens les pointes rougies de leurs coutelas.
    Montoya a hurlé ; ce n’était plus le cri de l’homme qu’il avait été, mais le hurlement d’une bête qu’on écorche vivante.
    J’attendais mon tour. On était à la fin du jour.
    Dragut s’est approché de moi, toujours à genoux, les mains liées dans le dos.
    — Toi, Thorenc…, a-t-il dit.
    Avançant les lèvres, il a eu une expression dédaigneuse.
    — On me supplie de te laisser en vie.
    Il a ri.
    — Est-ce que je dois obéir à une épouse ?
    Il s’est penché.
    — Ou bien la punir, la tuer pour s’être souciée de ton sort, avoir sollicité ta grâce ?
    Il a croisé les bras.
    — Si je la tue, si je la punis, c’est moi qui souffre. Si je te laisse en vie, elle sera plus douce encore. Tu comprends, j’hésite entre deux tentations…
    Il a regardé le ciel qui s’obscurcissait.
    — Je nous laisse une nuit encore, à toi, à moi… et à elle. Si…
    Il s’est à nouveau approché.
    — Tu n’imagines pas ce que peut une femme comme elle. Elle fait de moi un roi.
    Tout à coup, d’un violent coup de pied dans la poitrine, il m’a renversé avant de s’éloigner.
    J’ai attendu plusieurs jours, dans une sorte d’hébétude, la décision de Dragut-le-Brûlé.
    Au matin de la première nuit, j’étais sûr que les bourreaux allaient venir me saisir par les bras et les jambes et me jeter aux pieds de Dragut comme un animal qu’on livre au boucher.
    Mais les bourreaux ne s’étaient pas montrés.
    Ils s’étaient emparés d’un homme déjà vieux dont sans doute plus personne ne voulait verser la rançon et qui n’était plus capable de ramer dans une chiourme.
    On l’avait tué vite fait, sans que Dragut manifestât le moindre intérêt pour cette pendaison qui n’avait été précédée que de la mutilation du nez et des oreilles – autant dire rien, presque les marques d’une attention bienveillante.
    Puis les nuits s’étaient succédé sans jamais qu’à l’aube on vînt me conduire à la potence.
    Chaque soir, Michele Spriano s’agenouillait près de moi.
    — Il faut prier, disait-il.
    Il ajoutait, mais d’une voix si faible que je devinais ses propos plus que je ne les entendais :
    — Implorons le pardon pour celle qui a risqué sa vie en demandant ta grâce.
    Je me suis obstiné, Seigneur, je n’ai jamais prié pour Mathilde de Mons.
    Je n’avais rien sollicité d’elle. Elle voulait me sauver la vie pour se racheter. Et j’avais honte de ce marché dont j’étais pourtant le bénéficiaire.
    Car, un matin, j’ai découvert que le fauteuil pourpre était vide. Aucun janissaire ne le gardait. Et le bruit s’est répandu que Dragut-le-Cruel, Dragut-le-Débauché avait quitté Alger en compagnie de ses épouses et de ses trésors pour gagner Constantinople où il avait été désigné vizir du sultan.
    Il m’avait donc épargné.
    Mais je devais la vie au plaisir que Mathilde de Mons donnait à Dragut-le-Débauché, à la passion luxurieuse qu’elle lui inspirait.
    Je me sentais boueux, puant, coupable.
    J’avais entraîné dans ma fuite quatre hommes qui avaient succombé alors que je leur survivais.
    Quel était le dessein de Dieu ? Quelles voies mystérieuses empruntait la Justice ?
    Je me suis interrogé, Seigneur, en proie à un grand trouble.
    Je Vous ai supplié afin que Vous m’éclairiez, que Vous m’indiquiez le chemin.
    Vous êtes resté silencieux.
    J’ai pensé que Vous aviez préservé ma vie pour que je la misse tout entière à Votre service.
    J’ai juré sur cette vie sauvée d’extirper des âmes la foi des infidèles et de châtier ceux qui la servaient, la protégeaient ou s’y soumettaient.

18.
    Ce serment que j’avais fait de pourchasser les sectateurs d’Allah n’était, selon Michele Spriano, que le fruit empoisonné de mon désir de vengeance.
    Les infidèles m’avaient ravi Mathilde de Mons, disait-il, et je les poursuivrais de ma haine.
    À l’entendre, je menais une guerre personnelle et non, comme je le prétendais, le combat de la sainte Église.
    Le chrétien, répétait-il, devait s’en remettre au jugement de Dieu.
    Spriano

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