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Paris Ma Bonne Ville

Paris Ma Bonne Ville

Titel: Paris Ma Bonne Ville Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Robert Merle
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davantage à proportion que je l’avais
davantage navré.
    Miroul qui
cheminait à ma dextre, la face fort inquiète levée vers moi, voyant que j’étais
quelque peu m’adoucissant, me dit en oc :
    — Moussu,
avez-vous eu de fâcheuses paroles avec ce muguet ?
    — Nenni,
dis-je du ton le plus bref. Des regards seulement.
    — Dieu
soit loué ! dit Miroul avec gravité. J’augurais pis.
    — Parole
ne peut être pis que cette sorte de regard.
    — Mais,
Moussu, dit Miroul avec un sourire, vous avez rendu œil pour œil. Restons-en
là ! Vous êtes en cette Paris pour demander au Roi votre grâce d’un duel.
Irez-vous, ce faisant, vous en mettre un autre sur le dos ? Ce serait
folie. Et d’autant que cette fois, vous pourriez y laisser la vie. Le bélître
tire émerveillablement.
    — Ha !
Miroul ! dis-je. C’est là tout justement le point. Si ce coquelet ne
tirait pas si bien, il n’oserait point faire à tous vents l’insolent. Et pour
moi, si je baisse la crête devant ses humiliants regards, il me tiendra pour
faible de cœur et couard.
    — Moussu,
que vous importe son pensement ? Couard vous n’êtes. Ce fat va-t-il vous
pousser au champ clos rien que par la peur que vous aurez qu’il vous croie
lâche ? N’est-ce pas lâcheté aussi que de se laisser gagner à la main par
le déprisement d’un homme ?
    — Qu’est
cela ? dit Samson qui oyait bec bée cette disputation. Monsieur mon frère,
vous a-t-on offensé ?
    — Nenni,
dis-je avec quelque impatience. Il ne s’agit que de regards.
    — Moussu,
reprit Miroul avec gravité, peux-je vous ramentevoir que Monsieur votre père
vous a fait commandement de prendre mes avis dans les extrémités ?
    — Miroul,
dis-je en souriant d’un seul côté de la face, je les prends. Que me
conseilles-tu ?
    — Moussu,
si vos yeux et les yeux de ce coquardeau continuent à se contr’insulter à
chaque encontre, les paroles vont suivre. Et elles seront irrémédiables. Je
vous conseille donc, tant qu’il en est temps encore, de cesser de l’envisager
si derechef il vous envisage, feignant d’ignorer l’affront, afin de ne pas
avoir à le relever, comme on dit que s’avisa le Maréchal de Tavannes, lequel
contrefit le sourd quand Coligny, en son emportement, osa mettre son courage en
doute.
    — Miroul,
dis-je l’œil sur le pavé, je me persuade à la fin que ton avis est bon. Je le
vais suivre.
    — Ha !
Moussu ! dit Miroul d’une voix fort alarmée, vous en aurez l’occasion de
présent ! Et bien plus tôt que je n’aurais cru ! Voici ce batteur de
fer qui tout droit vers nous se dirige, flanqué du Marquis d’O et de Maugiron.
De grâce, Moussu, gardez l’œil fiché au sol, ou sur moi, ou sur Samson et jasez
en oc comme devant, sans faire mine du tout de le voir !
    — Il faut
bien avouer, Miroul, dis-je en oc, la tête baissée mais par-dessous mes cils
envisageant en tapinois le Baron de Quéribus qui s’avançait, magnifique en sa
vêture et superbe en sa hautaine face et le cœur me battant tout ensemble de la
haine et de l’admiration qu’il me donnait – il faut bien avouer, dis-je,
que ces mignons de couchette sont la plus exécrable race de vermine à qui le
ciel ait jamais permis de ramper sur la surface de la terre.
    — Ha !
Moussu ! dit Miroul terrifié, que dites-vous là ? Le périgordin
est-il à ce point déconnu ?...
    Mais il ne put
parler plus outre, car Quéribus nous croisant flanqué de ses acolytes, et
tournant la tête de notre côté par-dessus son épaule, dit d’une voix forte et
claire :
    — Ces
rustres parlent d’oc.
    Lâchant le
bras de Samson, je me retournai comme si aspic m’avait au talon piqué, et
tremblant en mon ire de la tête à l’orteil, je dis d’une voix furieuse mais
cependant contenue :
    — Rustres,
Monsieur ?
    — Ha !
Moussu ! cria Miroul au désespoir.
    — Rustres,
Monsieur ! dit Quéribus avec un profond salut. Rustres, du latin rus,
ruris, campagne.
    — Monsieur,
dis-je en le saluant à mon tour, il y a offense !
    — J’opine
qu’il n’y en a point ! dit le Marquis d’O dont les regards étonnés
allaient de Quéribus à moi et posant impérieusement la main sur le bras de
Quéribus, il ajouta :
    — Le
Baron de Quéribus a dit : ce rustre parle d’oc. Il désignait le valet et
non le maître.
    — Je
désignais les deux, dit Quéribus avec la dernière nonchalance.
    — Quéribus !
dit le Marquis d’O sourcillant,

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