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Paris Ma Bonne Ville

Paris Ma Bonne Ville

Titel: Paris Ma Bonne Ville Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Robert Merle
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vertu d’être fécond. Raison pour quoi le
Fontenac était chez nous tant déprisé, n’ayant pas plus de respect pour son
propre sang que pour le sang des autres, et jetant hors ses murs les enfants
qu’il avait conçus hors mariage.
    — Mais Monsieur mon père,
dis-je voyant qu’à la fin le silence durait plus que je n’aurais voulu,
avez-vous dit à François ce qu’il en est de la Gavachette ? Peut-être la
cuide-t-il à vous-même réservée ? À vos fils interdite ?
    À quoi mon père, m’envisageant œil
à œil, se mit à rire.
    — Voilà, mon Pierre, une
question que je dirais habile et chattemite et qui, visiblement, fait d’une
pierre deux coups.
    À mon interrogation pourtant il ne
répondit mie et, se levant d’une façon abrupte et militaire, il fit signe à
Miroul de saisir le chandelier et de nous éclairer.
    — Monsieur mon fils, dit-il
du ton le plus bref, allons au lit !
    Je le suivis, la crête bien
rabattue, rien n’étant résolu, ni ce jour ni demain quant à l’aigreur de ma
solitude. Cependant, comme on atteignait la chambre où le Baron de Mespech
dormait avec Franchou, tout soudain se tournant vers moi qui le suivais, et
m’envisageant avec un brillement de l’œil et un souris, il me donna une forte
brassée et me claquant de fortes poutounes sur les deux joues, il me dit à
l’oreille :
    — Vale, mi fili ; et
sicut pater tuus, ne sit ancillae formosae amor pudori [3] .
    — Ha ! Monsieur mon
père, criai-je, mais je ne dis rien d’autre, ayant la gorge serrée par mon
émeuvement.
    L’huis refermé sur Jean de Siorac,
j’embrassai mon gentil Miroul qui, tout endormi qu’il fût, me sourit, ayant
fort bien entendu ce que Moussu lou Baron avait dit, combien qu’il ne sût pas
le latin. Il voulut me donner le chandelier mais je le refusai, désirant mes
deux mains garder libres et la lune par les fenêtres étant si brillante. Miroul
départi, je tirai vers la chambre de la tour ouest où dormaient, dans un lit,
Barberine, et dans l’autre Anet Jacquou et la Gavachette. Celle-ci, nue qu’elle
était, je saisis dans mes bras et sans qu’elle se réveillât du tout, l’emportai
comme larron en ma chambre, le cœur me toquant fort les côtes, et sur mon lit
la posant, incontinent, la rejoignis. Et certes, elle dormait d’un tant profond
sommeil, le vent et haleine si paisibles, que je fus fort tenté d’essayer de
passer pour un rêve. Mais à y penser deux fois, je ne le fis pas, ne voulant
pas la réveiller par le pâtiment que je devrais de force forcée lui faire pour
qu’elle fût mienne. Me bridant alors, quoi qu’il m’en coûtât, je pris sur moi
d’espérer la pique du jour pour qu’elle ouvrît les yeux de soi. La tenant close
entre mes bras, mince, polie et pommelante, son enfantine face éclairée par un
rayon de lune, ce fut une longue attente, sommeilleuse et songearde qu’à ce
jour bien je me ramentois en son incommode délice et davantage même que ce qui
suivit, tant est strident l’appétit du fruit, et bref, son dévorement.
    Et certes que ce fût gros péché,
comme le murmura tout haut Alazaïs, Sauveterre sourcillant et mon père
secrètement ébaudi, je n’en disconviens pas. Mais quoi ! N’est-ce pas
chattemitesse ruse que dire qu’on se repent sans pour autant
discontinuer ? Et comment peux-je de mon créateur mon pardon requérir,
quand tant de liesse quotidiennement m’habite qu’il ait baillé à l’homme cette
mignarde et fondante compagne en son Jardin d’Éden ?
    L’ardent pensamor que j’avais de
mon Angelina, le pâtiment que me donnait son absence n’en furent pas diminués,
et Mespech qui me retenait loin d’elle m’était toujours une sorte de geôle,
mais une geôle à quoi je trouvai plus facile de m’accommoder. Non que j’aimasse
la Gavachette de la tendre amitié que j’avais nourrie en mes enfances pour la
petite Hélix. Bien me plaisait, pourtant, cette fille de Roume, souple, sauvage
et ondulante chatte, ses petits crocs pointus prompts à mordre, la griffe plus
vive encore, l’œil noir fendu noircissant encore en ses colères et piaffante à
n’y pas croire tant elle redressait la crête d’être ma garce ; fétote,
espiègle, plus acaprissat que chèvre, elle aimait à s’apparesser (au lit
surtout) et dans le ménage de la maison, elle fuyait à se donner peine, musant
prou, labourant peu, rebiquée et rebelle face à Alazaïs, affrontant cette
montagne de femme comme un

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