Bücher online kostenlos Kostenlos Online Lesen
Paris Ma Bonne Ville

Paris Ma Bonne Ville

Titel: Paris Ma Bonne Ville Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Robert Merle
Vom Netzwerk:
d’un grand secours d’avoir là ma Pompée, si
du moins j’eusse pu trouver l’occasion de l’enfourcher avant que ne se
refermassent sur les persécutés les portes de la capitale – bon heur qui
fut celui de mon cousin Geoffroy de Caumont, seigneur de Castelnau et des
Milandes, lequel s’en sauva à brides avalées, gagna Montfort, et de Montfort,
Chartres, où le vidame le mit en sûreté. Mais les portes de Paris closes et
verrouillées, et les chaînes mises au travers des ponts, plus d’un huguenot,
saisi dans la nasse, eût été bien avisé mêlé à la populace, de gagner les
faubourgs à pied car les archers de garde, aux portes et aux ponts, avaient
l’œil davantage aux cavaliers qu’aux pédestres manants.
     
     
    Avant que de
quitter Paris avec Dame Gertrude du Luc, le 12 au matin, Maître Recroche tirant
une longue face de ne me plus pouvoir saigner de quatorze sols le jour pour ma
chevalerie, Alizon, sur ma secrète prière, me mena voir un honnête juif avec
qui je troquai mes perles vraies contre autant de fausses (lesquelles étaient
imitées à ravir et qu’Alizon, incontinent, cousut à mon pourpoint, ayant
décousu les premières). Ce barguin où il fallut de la salive assez me garnit de
trois cents écus, qui, joints aux deux cents que m’avait baillés le Duc
d’Anjou, me fit une assez rondelette bourse dont je confiai la plus grosse
bosse à mon Samson en Montfort, sachant bien qu’il serait plus facile au
Seigneur de partager à nouveau les eaux de la mer pour qu’on y passât à sec que
d’amener mon bien-aimé frère à délier les cordons de son escarcelle. Quant à
moi, j’étais bien aise qu’il acceptât la garde de mon petit trésor, ayant en la
matière plus fiance en lui qu’en moi-même, étant de ma complexion bien moins
serré que lui, tant dans mes dépenses que dans mes charnelles conduites, encore
que je me trouvasse bien chaste et bien peu content de l’être, depuis que
j’étais en Paris : pensée qui me ramentut d’acheter à la Gavachette la
petite bague en or que je lui avais promise tant à la légère de mon département
de Mespech. Je renvoyai Miroul au logis sous le prétexte d’aider Samson à faire
ses paquets, ne voulant pas que mon gentil valet me picaniât derechef sur
l’excès de mes largesses pour une garce si fuyante à se donner peine au logis
qu’à son opinion elle n’en valait pas la chandelle. J’allai donc avec la seule
Alizon chez l’orfèvre qu’elle me recommanda, mais tombai, ce faisant, de
Charybde en Scylla, car ma petite mouche d’enfer, m’ayant assailli de questions
en son parler si vif et si précipiteux, s’offusqua fort que je voulusse offrir
à une simple chambrière de ma maison une si coûteuse superfluité.
    — Quinze
écus ! dit-elle comme je saillais de la boutique, le bijou en mon
escarcelle, quinze écus pour une garce dont tout le labour est de s’ouvrir à un
beau gentilhomme ! Quinze écus, par ma fé, c’est tout juste ce que je
donne l’an à la nourrice pour nourrir mon petit Henriot, et vous savez ce qu’il
m’en coûte, après l’atelier, ès étuves avec des gautiers qui me ragoûtent peu
et me rognent mes nuits. Quinze écus ! Benoîte Vierge, est-ce
justice ?
    — Paix
là, Alizon ! dis-je. Je dois quelque complaisance à une garce qui à’steure
est peut-être occupée à me façonner un enfant.
    — Quoi ?
dit-elle, Révérend docteur médecin ! Et les herbes que vous me baillâtes
et que vous promîtes à Babette, n’en a-t-elle pas l’usance aussi ?
    — Que si,
mais elle se veut grosse pour ne rien faire à Mespech que nourrir son
enfantelet.
    — Quoi !
dit-elle comme courroucée, celui-là sera-t-il élevé aussi au château ?
    — Comme
mon demi-frère Samson. Voudrais-tu qu’on le jette hors murs et sa mère aussi,
alors qu’il est de notre sang ?
    — Ho que
nenni ! dit-elle. C’est agir à l’honneur ! Mais je ne peux que je ne
pense avec aigreur à son sort et au mien, moi si tuée de labour et de sommeil,
et cette fille de Roume, heureuse comme vache au soleil du Périgord avec de
l’herbe jusqu’aux pis ! Benoîte Vierge ! Je dis mon chapelet chaque
jour que Dieu fait pour qu’il me dégrisaille mes jours, mais je ne vois rien
luire au bout de l’an que l’aiguille et l’aiguille encore, le salaire de ce
chiche-face et les étuves ! Baba ! Comme dit Recroche ! Tout va
aux unes et rien aux autres ! Et si c’est hérésie ce que

Weitere Kostenlose Bücher