Bücher online kostenlos Kostenlos Online Lesen
Paris Ma Bonne Ville

Paris Ma Bonne Ville

Titel: Paris Ma Bonne Ville Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Robert Merle
Vom Netzwerk:
vous ! À quels dépens vous
seriez !
    — Nenni !
dit Dame Béqueret, aucun, foi de Normande ! (car elle était de ces
provinces), votre frère serait de grande aide et service en l’officine de mon
mari, celui-ci ayant grand-peine à suffire à la demande, la presse étant si
grande de présent à Montfort et pour tout le mois d’août.
    À cette
requête, je vis un grand brillement dans l’œil de mon Samson mais combien que
j’eusse aimé obliger Samson et mes hôtes, comment eussé-je pu consentir à ce
qu’il restât enterré en ces bocaux alors que la fortune lui baillait l’occasion
de visiter la plus belle ville du royaume, ou même du monde, à ce que M. de
Montaigne avait dit. Et encore que mon hôte fût à’steure tant renâclant à nous
voir nous ensauver qu’il l’avait été d’abord à nous accueillir, je fixai au
lendemain notre département. Oyant quoi, Miroul qui aidait la chambrière de
Béqueret à servir à table, laquelle chambrière était une gentille et frisquette
friponne, avec qui il avait barguigné œillades et contr’œillades tout le long
du repas, me dit :
    — Ha !
Moussu, cela ne se peut ! Votre Pompée est déferrée des deux fers de
devant ! Il faudra y pourvoir ; vous ne pouvez ainsi chevaucher.
    — Nous y
pourvoirons donc demain ! dis-je, fort rebroussé.
    — Cela ne
se peut, dit Miroul, donnant de son œil marron à la mignonne chambrière, demain
est dimanche. Le maréchal-ferrant ne voudra point labourer.
    — D’autant,
dit Maître Béqueret, qu’avec tous ces gentilshommes normands qui vont galopant
sur Paris, il a plus de pratique qu’il n’y peut suffire. Cela serait miracle
s’il vous ferrait mardi.
    À quoi, l’œil
marron de Miroul s’égaya fort.
    Ha !
pensai-je, fort picanié, trois nuits encore à délayer céans quand Paris est si
proche ! Et courroucé de cette traverse-là, je baillai du méchant sourcil
à Miroul, comme si le déferrage eût été de son fait. À cet instant, Giacomi lui
jetant aussi un œil, mais plus doux, puis à la chambrière, puis à moi, et
entendant bien que ce retardement n’allait accommoder que le seul Miroul –
ce dont il voyait bien que j’étais fort dépit, ne pouvant disputer la portion
du valet, maintenant qu’il l’avait quasi entre les dents –, m’adressa son
délectable souris et me dit en son italien :
    — Il
saggio sopporta pazientemente il suo dolore [17] .
    — E
vero dio [18] ! s’écria Maître Béqueret, qui se piquait de parler italien, lequel était
en Paris à la mode qui trotte depuis que la Florentine régnait sur le royaume.
    J’étais le
lendemain en la chambre qu’on m’avait baillée, vêtu de mes seules chausses et
sans chemise, quand on toqua à l’huis et Maître Béqueret, entrant et me saluant
de façon fort civile, me dit :
    — Ha !
Monsieur de Siorac, que je suis conforté d’envisager sur votre poitrine cette
médaille de la benoîte Vierge ! À certains signes, je m’étais mis dans
l’entendement que vous étiez huguenots et je ne savais point comment m’y
prendre pour vous prier d’ouïr la messe en ma compagnie ce matin, pour ce qu’il
y aurait grand péril pour moi et les miens en Montfort si on pouvait suspecter
que j’héberge des hérétiques, ceux-ci étant céans, comme à Paris, furieusement
haïs.
    — Révérend
Maître, dis-je, vous aviez bien dès l’abord deviné : hors le maestro
Giacomi, nous sommes tous trois, maîtres et valet, de la religion. Et quant à
moi, je n’ai sur moi cette médaille que sur le commandement de ma défunte mère,
laquelle en mourant m’a fait pléger de la porter au col jusqu’au bout de ma
vie. Cependant, Révérend Maître, vous fûtes avec nous tant aimable et serviable
que je ne voudrais point vous être à dommage, et j’irai à messe pour vous
servir.
    — La
merci Dieu et à vous ! s’écria Maître Béqueret. Je suis ôté d’un grand
poids ! Combien que je sois catholique sincère, je n’y mets point, à vrai
dire, tant de zèle et ne rêve point, comme d’aucuns, d’étriper ou brûler ceux
de la nouvelle opinion. Mais vous l’allez voir, hélas, à Paris les furieux ne
manquent point et c’est grande pitié que votre joli frère et vous, vous alliez
donner du nez dans ces toiles ! Vous y risquez la vie !
    — Mais,
Révérend Maître, dis-je, n’est-il pas constant que notre chef Coligny soit de
présent en grande faveur auprès du Roi ?
    À quoi,

Weitere Kostenlose Bücher