Bücher online kostenlos Kostenlos Online Lesen
Paris Ma Bonne Ville

Paris Ma Bonne Ville

Titel: Paris Ma Bonne Ville Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Robert Merle
Vom Netzwerk:
le petit valet me voulût claquer l’huis au bec, M.
Béqueret étant fort importuné par les voyageurs en quête d’un gîte, je fis tant
par la douceur de mon adresse (et aussi par quelques pécunes dont je lui
graissais le poignet) qu’il finit par quérir son maître : celui-ci, à la
fin, nous admit non point dans son logis mais dans son officine, laquelle, sans
être aussi grande que celle de Maître Sanche en Montpellier, était si neuve et
si belle qu’elle ne laissa pas d’ensorceler incontinent mon joli Samson.
Ouvrant tout grands ses yeux azuréens, il les ficha avec le plus émerveillable
appétit sur les bocaux à lettres dorées qui de haut en bas décoraient les murs.
    Maître
Béqueret, qui était grand assez, l’œil noir, le poil brun, la manière douce,
m’ouït courtoisement lui dire qui j’étais et ce que je requérais de lui. Après
quoi, fort civilement, mais la crête redressée, il repoussa de clic et de clac
ma requête, disant qu’étant maître apothicaire et bourgeois étoffé en la ville,
il tenait au-dessous de sa dignité de tenir boutique et marchandise de chambres
garnies, ni de les donner à louer, fût-ce aux fils cadets du Baron de Mespech,
lesquels il était, au demeurant, fort honoré de saluer.
    Sur quoi, en
effet, assez roidement, il me salua. Je le saluai aussi, mais sans rompre les
chiens, et l’air tout aussi riant que s’il ne m’avait pas rebuffé, je jasai
plus outre, sans faillir toutefois à lui apprendre que j’étais docteur médecin
de l’École de Montpellier, mais encore que cela, comme bien j’y comptais,
l’adoucît quelque peu, il ne céda point sur le principal, et la pluie à cet
instant redoublant aux vitres, à peu que le cœur ne me descendît aux talons
tant le pensement de passer dehors la nuit avec mes compagnons me faisait le
poil dresser.
    J’en étais à
prendre congé, assez déconfit, de Maître Béqueret, quand Samson qui, tout à son
avide contemplation, n’avait rien ouï de notre entretien, ne faisant pas plus
de cas de son objet que de son premier hochet, s’écria en fleur et le bec
bée :
    — Ha !
Maître Béqueret, quelle belle officine vous avez là ! Et quels nobles
corps et substances vous détenez en ces bocaux ! On voit que vous ne
lésinez point à la qualité pour façonner vos médecines !
    — Et à
quoi voyez-vous cela, Monsieur ? dit Maître Béqueret en haussant le
sourcil.
    — À ce
que votre séné vient d’Alexandrie et non de Seyde, lequel, combien qu’il soit
moins coûteux, mon maître Sanche tenait pour vil, rude chargé de boue et de
graveau, et indigne d’être administré même à un âne.
    — Quoi ?
dit Béqueret, auriez-vous labouré sous le très illustre maître de
Montpellier ?
    — Cinq
ans, dit mon Samson, avant que d’être reçu moi-même maître apothicaire le
24 août de l’an du Seigneur 1571.
    — Quoi !
dit Béqueret, vous êtes de mon état ! Et l’élève de Maître Sanche !
Que ne le disiez vous d’abord au lieu de vous parer de vos titres de
noblesse ! Vous êtes céans chez vous, mon compère ! Et vous aussi,
révérend docteur médecin, ajouta-t-il en me jetant un œil, mais sans autant de
chaleur car encore que je fusse d’une famille voisine, je n’étais pas tout à
plein du même sang.
    Et quel
accueil nous fit alors le bonhomme, je vous le laisse à penser, parlant, dès
que l’on fut à table, de nous garder tous quatre ainsi que nos cinq chevaux en
ses écuries tout le mois d’août, pour ce qu’à Paris assurément, nous ne
trouverions point de gîte, y ayant à la capitale telle grande et monstrueuse
affluence pour les noces de la Princesse Margot, laquelle veuille la benoîte
Vierge tenir à jamais en sa sainte garde. À quoi, je dis amen et Giacomi aussi
mais non point Samson, mon joli frère étant fort rebroussé en sa huguenote
raideur par cette idolâtre invocation. Je rendis mille grâces et merciements à
Maître Béqueret mais je lui remontrai que je ne pouvais délayer à Montfort,
devant être à Paris, non point passagèrement – le jour des royales
noces –, mais tout le mois, présent au Louvre en ma personne, aux fins de
présenter une requête au Roi dont mon avenir dépendait.
    — Ha !
Monsieur ! dit Dame Béqueret, laquelle était brune comme son époux et
comme lui l’œil bénin, cependant aigu et ferme, laissez-nous du moins votre
aimable compère.
    — Ha !
Madame ! dis-je, Samson tout un mois chez

Weitere Kostenlose Bücher