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Paul Verlaine et ses contemporains par un témoin impartial

Paul Verlaine et ses contemporains par un témoin impartial

Titel: Paul Verlaine et ses contemporains par un témoin impartial Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Fernand Clerget
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le ciel chanteur qui te réclame.
     
    Ô pâlis et va-t’en, lente et joignant les mains !
    Si ces hiers allaient manger nos beaux demains ?
    Si la vieille folie était encore en route ?
     
    Ces souvenirs, va-t-il falloir les retuer ?
    Un assaut furieux, le suprême, sans doute !…
    Ô va prier contre l’orage, va prier !
     
    Et à travers toutes ces fabuleuses fatigues de Sisyphe ou d’Hercule sous la perpétuelle chute du roc charnel, il y avait de triomphales heures d’embellie, des aurores dans cette nuit… Il s’émerveillait chèrement, comme au retour dans le port, devant ce quelque chose de sacré que recèle en leur beauté la faiblesse des femmes… Il avait aussi des enthousiasmes juvéniles, des pitiés nobles pour tous ceux que décorait un sceau d’héroïsme et de malheur.
     
    *
    * *
     
    « Comme Verlaine, en ce livre, a donné la plus forte expression de trouble moderne qui fût en lui, nous en avons dû scruter surtout le fond. Avec Jadis et Naguère [12] , il convient de préférer la forme… Pour Verlaine, le vers demeure le Vers, l’être intangible et frémissant dont il avait appris des maîtres-forgerons, Leconte de Lisle et Banville, et Baudelaire lui-même, à forger l’armure, et quelques-uns des plus célèbres alexandrins qu’on citera dans vingt ans seront de Sagesse . Mais bien plus hardiment que Sainte-Beuve, dans le même but et avec un plus profond sens de modernité, il l’assouplit, le détaille, ce vers, quand il faut, selon les nuances de sentiment à rendre et selon de logiques lois nouvelles. »
     
    Suivent des pages, aux détails finement ciselés, sur l’Art poétique de l’auteur de Sagesse, de Jadis et Naguère  ; ces pages sont assez touffues pour que je ne puisse les résumer ici, et n’en dire qu’une partie serait trahir la logique du littérateur : elles lui servent d’ailleurs pour des dissertations personnelles, commentant Verlaine, ne le montrant plus. Avant de quitter Morice (non pour la dernière fois, car il apparaît constamment, à cette époque, dans l’ombre du Maître), voici un remarquable parallèle de Lamartine et de Verlaine, qui peut suffire à expliquer l’attachement du critique pour le poète [13]  :
     
    « Lamartine signala son passage dans le monde par des poèmes brillants, envolés légers comme des oiseaux, et sa vie elle-même demeure la tradition légendaire d’un merveilleux poème, la seule vie idéale de poète heureux – sauf les tristes derniers jours, aux mains besogneuses – qu’enregistre l’histoire de la littérature française. – Eh bien, à ce poète heureux et fêté, Verlaine, triste et méconnu, donne seul, si je puis dire, la réplique dans cette comédie symétrique du siècle : c’est la même âme en deux carrières orientées, l’une vers le signe Vénus et l’autre vers le signe Saturne. Lamartine commença par des hymnes évangéliques : il devait s’en détourner plus tard vers le rationalisme. Verlaine devait continuer par les hymnes après avoir commencé par un scepticisme de virtuose. Cette différence comme toutes les autres, les dates l’expliqueraient : Quand Lamartine, vieillissant, penchait vers les doctrines, sinon tout à fait ennemies, au moins très éloignées de ses premières ferveurs, c’est par la fatalité des dates que Verlaine, jeune alors, débutait dans l’insouci des crédos qu’il devait réciter plus tard. – Il lui fallait attendre, pour parvenir au catholicisme, que fût accompli le demi-cycle de négation que ne manque jamais de décrire l’esprit humain quand il vient d’achever le demi-cycle d’affirmation… Lamartine et Verlaine ont surtout cette capitale ressemblance : tous deux, touchés par les puretés et les douceurs de la religion chrétienne, les adorent avec les mêmes yeux enchantés des beautés humaines, et tous deux sont les seuls poètes de ce siècle que l’idéal chrétien ait séduits, en chrétiens épris ou tourmentés du dessein de « faire leur salut ». Si le mysticisme de l’un se meut plus volontiers et plus à l’aise dans plus de bleu, tandis que le mysticisme de l’autre, assombri, se concentre plus amer et plus rouge, c’est encore aux deux contraires colorations du siècle, à son aube et à son déclin, qu’il faut attribuer ces divergences. Tous deux ont un très vif et très profond frisson de corporalité, pour tous deux le paradis est un jardin de bonheur humain ; mais Lamartine est pris

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