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Paul Verlaine et ses contemporains par un témoin impartial

Paul Verlaine et ses contemporains par un témoin impartial

Titel: Paul Verlaine et ses contemporains par un témoin impartial Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Fernand Clerget
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surtout d’adoration devant les splendeurs de la beauté physique, il en voit surtout la mystérieuse puissance, tout est pour lui lumière, la femme est un éclair vivant  : Verlaine est surtout pris de pitié, d’étonnement. Qu’on vive lui semble une merveille,
     
    Tant notre appareil est une fleur qui plie !
     
    Et devant cet appareil, si faible et tant aimé, il médite :
     
    La tristesse, la langueur du corps humain
    M’attendrissent, me fléchissent, m’apitoient.
     
    Et toujours à propos des choses corporelles, vous trouverez en lui cette même tristesse apitoyée, – sans jamais aucun dégoût. Tout ce qui est humain lui est sacré, mais il aime à plaindre ce qu’il adore, comme Lamartine à l’admirer. »
     

Le Poète, le Bohème.

    De Henry Fouquier [14]  :
     
    « Doué d’une forme élégante, classique – oui, classique, – très français, ne cachant pas sa haine de l’internationalisme, le poète des Fêtes galantes appartient non à l’école, mais au groupe de ce qu’on pourrait appeler les poètes lunaires… je ne suis pas fermé au charme des poètes plus recherchés, plus subtils, plus curieux des formes nouvelles ou renouvelées, et qu’on lit per amica silentia lunæ [15] , sans toujours les comprendre bien, mais en se laissant aller, comme au charme d’une lointaine musique, à l’harmonie de leurs vers. Je ne déteste pas, si Latin que je sois, l’inachevé, l’inexpliqué, l’entrevu. Mais foin des pédants qui veulent leur retirer le charme en les achevant, les expliquant, les montrant ! Besogne pleine de périls plus encore pour celui qui en est l’objet que pour celui qui l’entreprend. Qui veut préciser et faire logique le rêve en fait un cauchemar. »
     
    Ceci s’adressait à Michel Abadie, qui, dans la Revue indépendante , analysant un sonnet de Verlaine, répondait surtout, en critique jeune et de foi vive, à l’article paru dans la Revue bleue en 1888 avec la signature d’un autre critique dans toute sa maîtrise rigoureuse, Jules Lemaître. Le débat portait sur le sonnet commençant par ce vers, un des plus cités de Verlaine :
     
    L’espoir luit comme un brin de paille dans l’étable.
     
    En réalité, M. Lemaître avait, pour les lecteurs de la Revue bleue , traduit de préférence l’aspect descriptif, la scène réaliste du poème ; M. Abadie [16] y recherchait plutôt le sens caché : mais il y mettait une vivacité toute juvénile, un peu rude, en certain passage, pour M. Fouquier. Dans sa riposte, M. Fouquier ne montre pas que son sentiment sur Verlaine en ait souffert ; il dit même en une phrase cordiale comment et pourquoi son esprit latin aime se reposer dans la lecture des poètes du charme et de l’harmonie ; il semble un autre ami, plus tiède certes que Morice, et sachant voir les défauts ; un ami raisonnable, c’est-à-dire un camarade du poète-bohème. Mais consultons le Figaro , un an plus tard [17]  :
     
    « M. Verlaine fut un lettré de distinction, un assez bon poète de troisième plan peut-être, dont le talent naturel fut gâté par la préciosité et l’obscurité voulues, et qui, trouvant qu’on était trop lent à rendre hommage à son talent, sauta le pas et se proclama du génie. »
     
    Que s’était-il passé ?
     
    Dans l’intervalle, Paul Verlaine étant mort, des amis songeaient à lui élever un monument, quand « l’avidité boutiquière d’un bibliopole inconscient » [18] lança en librairie un livre posthume : Invectives . Cet opuscule portait en couverture le nom de Verlaine ; il s’y trouvait des passages malsonnants adressés à quelques contemporains, dont Fouquier, qui combat dès lors le projet du Monument :
     
    « Voici que ce littérateur, dont on pouvait avec pitié oublier la vie décousue, à qui on pouvait faire grâce de ses erreurs renouvelées, jette à la face de la foule, en s’en allant, comme un défi, un livre où il les rappelle en injuriant ceux qui eurent le triste devoir de les punir. Et on choisit cette heure pour demander que le buste devienne statue, que la glorification, de provinciale, se fasse nationale, et que l’immortalité du Luxembourg soit assurée à qui l’oubli eût été un bienfait !… Qui dit statue dit exemple. Et je m’adresse à M. Poincaré, dont on cite le nom parmi les promoteurs de cette glorification de M. Verlaine. Il occupe, dans le monde politique, une place à part et heureuse. Grand maître de

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