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Petite histoire de l’Afrique

Petite histoire de l’Afrique

Titel: Petite histoire de l’Afrique Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Catherine Coquery-Vidrovitch
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se répandirent alors dans tout l’Ouest africain, une indéniable poussée démographique, due probablement à des conditions climatiques relativement favorables, on l’a vu, dans la première moitié du XIX e  siècle. L’essor de la population était aussi le fruit d’une augmentation de la production de vivres rendue possible par la main-d’œuvre esclave désormais en surplus. Les grands djihads furent, en même temps que des aventures de conquête, des entreprises de colonat, les peuples conquis devenant (comme naguère) autant d’esclaves, cette fois-ci utilisés non comme marchandise de traite, mais comme main-d’œuvre agraire. Que faire, enfin, des autres ? Des soldats, qui venaient grossir des armées conquérantes amenées ainsi à ambitionner de conquérir toujours davantage.
    Ce schéma culmina, à l’Ouest, avec le dernier des grands chefs de guerre, Samori, né vers 1830, qui utilisa l’islam plus qu’il ne le prôna (1860-1898). À la différence des précédents chefs, il n’était pas, à l’origine, réformateur religieux mais dioula , c’est-à-dire marchand musulman, qui avait élargi son domaine d’intervention à partir de l’arrière-pays de la Guinée côtière. Mais il était trop tard : dans les années 1865, la conquête du Sénégal avait déjà été entreprise sous la direction de Faidherbe. Les Britanniques en faisaient autant en remontant la Casamance et le long de la côte de l’Or, de même que les Portugais. Comme ses prédécesseurs, Samori n’eut à sadisposition que deux moyens pour résister à l’intrusion européenne : l’islam — il se déclara sur le tard chef de djihad — et la guerre — il se mua en chef militaire esclavagiste. Cela le conduisit à sa perte ; les Français le capturèrent en 1898, comme l’avait été cinq ans auparavant Ahmadou, fils d’El-Hadj Omar, qui avait repris le combat de son père. Ainsi les peuples soumis d’ouest en est, transformés en esclaves cultivant la terre pour leurs conquérants colonisateurs, furent délivrés moins de cinquante ans après la mise en place de ces constructions étatiques, soit par la révolte directe, soit par les Européens qui surent momentanément se présenter en libérateurs. La colonisation européenne était désormais à l’ordre du jour.
    Les mouvements religieux tardifs ne furent pas propres au seul Ouest africain. Au sud de la Libye actuelle et en liaison avec ses foyers musulmans, une vaste confrérie mahdiste (le mahdi étant en quelque sorte un envoyé du Prophète) se propagea sous le nom de Senoussiya depuis la Libye jusqu’au nord du Tchad central dans la seconde moitié du XIX e  siècle ; plus commerçant que militaire, ce mouvement n’en fut pas moins diabolisé aussi bien par les Français que par les Italiens, qui ambitionnaient de conquérir la zone. Un autre mouvement mahdiste, au cœur de l’État du Soudan actuel, à Ondurman, face à Khartoum, rallia massivement, à partir de 1885, les populations à la restauration de l’islam des origines. Il fallut treize années aux Britanniques pour venir à bout de cette hégémonie militaire et religieuse ; en effet, durant cette phase de transition, ce furent cesmouvements et non les empires animistes séculaires qui s’opposèrent avec le plus de vigueur aux puissances coloniales. Dans le même temps, ces formations nouvelles, à certains égards modernisantes, contribuèrent à désorganiser les anciens modes de vie en amorçant une véritable révolution politique et culturelle.
    Ce qui interpelle ici, c’est que cette transformation politique majeure due à la constitution d’empires de conquête ne fut pas le propre du sahel africain islamisé. Elle eut lieu de façon comparable un peu partout en Afrique, à ceci près que la motivation religieuse en était généralement absente.
    Économie et politique en Afrique orientale
    Le rôle moteur de l’économie esclavagiste dans le façonnement de l’État est évident en Afrique orientale. Davantage liée à l’histoire égyptienne, l’épopée de Rabah est exemplaire sur ce plan. Ce dernier était esclave à l’origine, probablement originaire du Bahr el-Ghazal (État du Soudan actuel), et il apprit le métier militaire dans l’armée égyptienne. Entré en rébellion à la suite de guerres intestines, il décida de prendre le maquis à partir du Darfour avec une petite troupe de soldats aguerris. De proche en proche, il allait conquérir à

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