Remède pour un charlatan
part de l’évêque, annonça-t-il. Vous devez venir immédiatement.
— J’arrive.
Mais devant la porte, Berenguer s’avançait déjà vers lui, suivi d’un Nicholau Mallol essoufflé, d’un jeune homme et de deux femmes voilées.
Dans l’espace entre le haut de l’escalier et l’entrée de service menant à la grand-salle de la maison de Marieta, maître Pons Manet grogna et roula sur le sol. Sa tête lui faisait mal comme si elle allait exploser, et il ne savait ni où il se trouvait ni comment il était arrivé là. Il cligna des yeux et tenta de fixer son attention sur son environnement. Puis quelques images jaillirent de sa mémoire et se présentèrent à lui : il se vit marcher le long de la rivière puis traverser une cour où régnait une odeur d’écurie. La dernière chose qui lui revint fut une porte qui s’ouvrait trop facilement et permettait d’entrer dans une maison sombre qu’il connaissait, mais ne pouvait identifier. Il jura à voix basse.
Il s’assit. Quelqu’un avait allumé une bougie alors qu’il était inconscient ; il voyait l’escalier et la porte et, devant lui, un rideau qui le séparait du reste de la maison. Il passa doucement les doigts sur sa tête. Il localisa un endroit sensible, derrière l’oreille, mais ses cheveux semblaient propres, et ses doigts n’étaient pas poissés. Il avait dû se cogner et tomber à terre. Quoi qu’il en soit, il n’avait pas saigné. Encouragé par cette idée, il s’agrippa au cadre de la porte et parvint à se relever.
Les bruits en arrière-plan n’avaient d’abord fait aucune impression sur lui, mais voici que des mots et des sons filtraient à travers la douleur. Une voix inconnue, toute proche, criait quelque chose qui n’avait aucun sens pour lui et ne faisait qu’aggraver les battements du sang dans sa tête. Puis il y eut un craquement, un peu plus loin, et cela réveilla un écho douloureux dans son crâne.
— Yusuf, appela une voix pressante, où es-tu ? M’entends-tu ?
Cette voix familière lui fit l’effet d’une lampe dans une pièce sombre : dès qu’il l’entendit, la confusion se dissipa et les souvenirs affluèrent. C’était celle du médecin, ils se trouvaient chez Marieta et quelqu’un l’avait frappé à la tête. Sans réfléchir davantage, il écarta le rideau qui le séparait du couloir et regarda. Une bougie brûlait dans la pièce opposée et quelqu’un bataillait avec les volets. L’autre extrémité du couloir était plongée dans l’obscurité. Il prit la bougie et marcha sans la moindre hésitation en direction de la voix d’Isaac.
Un homme gisait à terre. Comme Pons s’approchait de lui, il gémit, roula sur le côté et tenta de se mettre à genoux, titubant comme s’il avait été blessé. À côté de lui était étendu le jeune garçon nommé Yusuf. Isaac se tenait entre eux. Il avait à la main un banc trapu et penchait la tête comme quelqu’un qui tend l’oreille. Pons posa la bougie dans une torchère.
— Maître Isaac, dit-il, c’est Pons. Pourquoi ne reposez-vous pas ce banc ?
— Je ne voudrais pas faire du mal à Yusuf, répondit-il. Où est-il ? Vous pouvez le voir ?
— Oui, j’ai apporté de la lumière. Mais donnez-moi ce banc, maître Isaac, afin que je le repose, dit-il en le prenant des mains du médecin. Qu’est-il arrivé à cet individu ?
— Il est tombé, je pense. Vous ne le connaissez pas ? s’enquit Isaac.
— Non, je ne crois pas. Non, je ne l’ai jamais vu auparavant.
Il se pencha vers l’enfant blessé.
— Yusuf, est-ce que tu m’entends ?
— Oui, maître Pons.
Yusuf tenta de se relever, mais retomba en arrière.
— Yusuf semble beaucoup souffrir, remarqua Pons. Je pense qu’il a reçu une blessure au bras. Qui lui a fait cela ? Cet homme ?
— Oui, dit Isaac d’une voix étrange. Mais vous-même, maître Pons, vous êtes blessé ?
— Ma malheureuse tête a reçu un vilain coup, mais je survivrai, c’est certain.
Lup essayait toujours de se redresser. Il s’agrippa au banc et s’en servit pour se mettre debout.
— C’est une vieille blessure, dit-il en portant la main à sa tempe. J’ai reçu un coup sur une vieille blessure qui n’a jamais guéri. Cette douleur m’est insupportable…
— Dieu du Ciel ! s’écria Pons Manet, horrifié, en rattrapant l’homme qui s’effondrait. C’est la voix de mon frère !
Il l’assit sur le banc.
— Ferran ? demanda-t-il en
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