Remède pour un charlatan
répondit promptement l’orateur. Elle vous apprendra à trouver la grâce. Maintenant, je vous demande très humblement, si vous souhaitez apprendre ces choses, lorsque mon ami et assistant, Lup, viendra vous solliciter, de lui donner ce que vous pouvez, pour nous aider à acheter notre pain et venir en aide aux pauvres.
— J’imagine quel genre de pauvres ils secourent, dit un homme à l’air prospère à son voisin.
— Des taverniers et des filles des rues ? suggéra son compagnon.
— J’ai déjà rencontré des individus de cet acabit. Mais ils seront bientôt partis. Les officiers les ont déjà flairés.
De la tête, il indiqua les deux cavaliers qui approchaient au galop.
Comme ils s’engageaient sur la route de Gérone, à la lueur du soleil couchant, ils entendirent des cris et des huées s’élever de la petite foule ainsi que la voix pénétrante de maître Guillem.
— Nous nous reverrons demain ! clamait-il. Vous êtes insensés de tenter de me réduire au silence alors que je peux apporter santé et prospérité aux habitants de cette ville.
Les deux hommes d’allure aisée échangèrent un sourire avant de se séparer.
Les officiers avaient l’air ennuyé.
— Nous ne voulons pas vous imposer le silence, maître Guillem, dit l’un d’eux. Nous voulons que vous demandiez une licence pour avoir le droit de parler.
— Mais nous sommes bien en dehors des limites de la ville, fit remarquer l’orateur.
— Néanmoins il vous faut une autorisation écrite.
— Pour que vous touchiez votre commission, murmura Lup en cachant sous sa tunique le sac destiné à faire la quête.
Il regarda maître Guillem et indiqua de la tête les trois jeunes gens, de seize ou dix-sept ans, avant de se tourner vers le reste de la foule.
— Vous avez entendu ces messieurs ! cria-t-il. Rentrez chez vous !
Comme la foule commençait de se disperser, privée par les officiers de la maigre distraction de la soirée, maître Guillem s’avança vers les trois garçons.
— Bonsoir, messires, dit-il simplement. Je regrette que notre réunion soit ainsi interrompue. Les braves gens qui dirigent cette ville souffrent d’une certaine étroitesse d’esprit, dirons-nous.
— Ils ne sont pas d’ici, fit observer l’un des garçons.
Maître Guillem ne releva pas cette remarque.
— Cela vous intéresse-t-il d’acquérir la sagesse ?
— Certainement, dit le jeune homme qui paraissait être le meneur du trio et portait, lui aussi, la tunique noire des lettrés. Mais nous ignorons si vous êtes à même de nous enseigner d’aussi solennels sujets.
— Moi-même je l’ignore, dit Guillem avec une humilité accomplie. Il se peut, jeunes maîtres, que votre savoir surpasse déjà mes capacités. Êtes-vous familiers des herbes mystiques qui ouvrent la voie de la connaissance ?
— Nous ne savons rien, n’est-ce pas, Lorens ? dit le plus petit des trois.
— Tais-toi, Marc, répondit Lorens. Laisse-moi faire. Nous sommes de pauvres étudiants, poursuivit-il. Nous ne pouvons payer beaucoup. Un sou dans le sac de la part de nous trois pour entendre quelques mots sur l’importance du savoir, c’est une chose, mais que demanderez-vous pour transmettre un véritable enseignement ?
— Pour vous, dix sous chacun, répondit Lup. Et c’est uniquement parce que le maître a su lire le vif intérêt et l’intelligence que reflète votre visage. En temps normal, c’est beaucoup plus. Car il y a des frais, vous savez. Des herbes rares et des onguents sont nécessaires, et de l’encens doit être brûlé à chaque occasion pour obtenir le succès. Nous ne gardons rien pour nous avec dix sous, mais le maître est un homme bon et généreux, qui cherche à apporter la connaissance à ceux qui sont capables d’en profiter.
— Et si nous décidons d’accepter votre offre généreuse, dit Lorens sur un ton sec, où pourrons-nous nous retrouver ? Nous ne sommes pas rentiers, notre temps ne nous appartient pas.
Maître Guillem adressa à son serviteur un regard quelque peu paniqué.
— Vous comprendrez, mes bons seigneurs, que nous faisons appel à la bonne nature d’autrui pour nos lieux de réunion privés…
— Mais si vous pouvez vous présenter à nous à la deuxième heure après complies, quand la ville dort, l’interrompit Lup, nous aurons tout loisir de vous recevoir.
— Où devrons-nous vous chercher ? Mais peut-être vivez-vous dans ce pré ?
— Cela
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