Révolution française Tome 2
qu’il existe
trois cent mille républicains qui sont prêts à marcher pour écraser ces
misérables. Nous avons soumis toute l’Europe et un feu de vingt-quatre heures
ne laissera pas un seul de ces brigands en France ! Nous connaissons notre
force ! »
Porté par cette indignation de l’armée d’Italie qu’il a
suscitée, Bonaparte écrit aux Directeurs :
« Il est imminent que vous preniez un parti ! Je
vois que le club de Clichy veut marcher sur mon cadavre pour arriver à la
destruction de la République. On dit “nous ne craignons pas ce Bonaparte, nous
avons Pichegru”. N’est-il plus en France de républicains ? Il faut
demander qu’on arrête ces émigrés, qu’on détruise l’influence des étrangers. Il
faut exiger qu’on brise les presses des journaux vendus à l’Angleterre, plus
sanguinaires que ne le fut jamais Marat. »
Et il est vrai que depuis la Suisse où depuis plusieurs
années il a pris ses quartiers, l’agent anglais Wickham augmente les subsides
qu’il verse aux royalistes, aux députés du Ventre. Il propose une somme de un
million deux cent mille francs, immédiatement, à laquelle s’ajouteront deux
cent cinquante mille francs attribués chaque mois. Mais Pichegru, approché, refuse,
n’acceptant que quatre rouleaux de cinquante louis d’or.
Il estime que rien ne presse, qu’on peut attendre les
prochaines élections qui balaieront naturellement les républicains.
Pichegru et les clichyens ne mesurent pas la détermination
de Barras et de Bonaparte.
Les ministres clichyens ont été chassés du gouvernement, remplacés
par des ministres républicains, issus du Cercle constitutionnel.
Talleyrand, qui le fréquente, devient ministre des Affaires
étrangères, malgré les réserves de Barras qui s’inquiète déjà de voir « Talleyrand
mettre au Luxembourg son pied boiteux ».
Il sait que l’ancien évêque qui avait célébré sur le
Champ-de-Mars la messe lors de la fête de la Fédération, le 14 juillet 1790,
« a tous les vices de l’ancien et du nouveau régime », comme le dit
Madame de Staël.
Mais l’homme corrompu est habile, mêlant la prudence à l’audace,
fourmillant d’idées comme celles qu’il soumet le 3 juillet (15 messidor) à l’institut
de France, proposant qu’on prépare la conquête de l’Égypte pour remplacer
Saint-Domingue qui est en pleine insurrection.
Et Talleyrand, fervent partisan de Bonaparte, insiste auprès
de Barras pour que l’on fasse appel à lui, puisque Hoche a dû quitter son poste
et Paris.
Mais Bonaparte ne veut pas que son nom soit souillé par
cette « guerre de pots de chambre » qui se déroule à Paris.
Les affrontements dans les salons entre clichyens et
constitutionnels ne sont pas dignes de lui. De même les rixes qui, chaque jour,
opposent au Champ-de-Mars les militaires aux jeunes gens qui portent un collet
noir ne peuvent que ternir sa légende.
Le vainqueur de Lodi, d’Arcole, de Rivoli, le général
victorieux, faiseur de paix, peut-il être mêlé à la « querelle des collets
noirs » ?
« J’ai vu les rois à mes pieds, dit-il, j’aurais pu
avoir cinquante millions dans mes coffres… »
Devant Berthier, son chef d’état-major et son confident, Bonaparte
ajoute :
« Un parti lève la tête en faveur des Bourbons. Je ne
veux pas contribuer à son triomphe. Les Français, il est vrai, n’entendent rien
à la liberté. Il leur faut de la gloire, des satisfactions de vanité. Je veux
bien un jour affaiblir le parti républicain mais je ne veux pas que ce soit au
profit de l’ancienne dynastie, définitivement, je ne veux pas du rôle de Monk
qui rétablit la monarchie en Angleterre après Cromwell, je ne veux pas le jouer
et je ne veux pas que d’autres le jouent. »
Bonaparte ne joue qu’à son profit.
C’est le général Augereau qui va gagner Paris, à la tête de
cinq mille hommes et dans ses bagages un coffre contenant trois millions pour
Barras.
Le Directoire va nommer ce fils de maçon qui a servi dans
les armées russe et prussienne avant de déserter pour s’enrôler dans la garde
nationale, commandant de la 17 e division militaire dont dépend Paris.
Il arrive dans la capitale le 7 août 1797 (20 thermidor an V).
Et il écrit aussitôt à Bonaparte :
« Je promets de sauver la République des agents du
Trône et de l’Autel. »
Le courrier qui porte ce message à Bonaparte est chargé d’une
missive de La Valette.
L’aide
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