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Ridicule

Ridicule

Titel: Ridicule Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Remi Waterhouse
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Simon, l’autre élève de l’abbé, intervint par des signes véhéments à l’adresse de son maître.
    — « Le peintre Watteau avait plus de plaisir à voir un violon qu’à l’entendre », traduisit l’Épée.
    Un profond silence se fit pendant quelques secondes.
    — C’est un stratagème ! protesta quelqu’un au fond.
    — Cela a trop d’esprit ! renchérit un autre.
    Mais aussi incroyable que cela fût, cela était, là, sous leurs yeux.
    — Souffrent-ils de leur disgrâce ? demanda le chevalier de Milletail avec une gravité telle qu’on pouvait croire que son bonheur en dépendait.
    Le silence fut total pendant que l’abbé traduisait.
    Alors Paul fit quelques gestes vifs, et tous les sourds-muets éclatèrent de rire avec l’abbé.
    Le rire des sourds-muets saisit l’assistance. Jusqu’à ce moment, pas un son n’était sorti de leur bouche, et ils riaient comme des gens du meilleur monde !
    — Qu’a-t-il répondu ? s’impatienta Sabran.
    — Monsieur, cela est impossible à traduire dans notre langue, expliqua l’Épée. C’est un...
    Il hésita.
    — Un geste d’esprit !
    Alors Bellegarde se leva. Son visage était bouleversé comme par une vision.
    — Ainsi j’ai vécu des années avec un homme d’esprit sous mon toit, que je prenais pour un idiot ? dit-il d’une voix étranglée en prenant tout le public à témoin. Mais je suis un âne !
    Puis s’adressant à l’Épée :
    — Comment dit-on « bravo, Paul » dans votre langage ?
    Sans laisser le soin à l’abbé de répondre, Ponceludon se leva et applaudit, Mathilde quitta son siège pour embrasser Paul. Et, pendant que les deux jeunes gens laissaient libre cours à leurs effusions, quelques courtisans se joignirent au nouveau protégé de Mme de Blayac pour applaudir, bientôt suivis, par contagion, de la salle entière. Ponceludon ne chercha pas à approcher Mathilde. Il lui fallait boire sa honte, toute.
    La révolte de Ponceludon contre les procédés déloyaux de sa maîtresse ne dura guère. Le soir même, la comtesse retrouvait un amant aussi empressé qu’au premier jour. Quand, les sens satisfaits, il était en proie à la lassitude et au doute, la mollesse le consolait des déceptions de la luxure.
    Un matin, le soleil était déjà haut, Amélie de Blayac entra habillée d’une robe de soie rouge dans la chambre où son amant dormait encore. Elle avait écourté le purgatoire du demi-deuil, et retrouvait l’éclat dominateur qui lui seyait. Quand elle ouvrit les rideaux, Ponceludon souleva le bandeau de velours dont il s’aveuglait pour dormir plus tard le matin.
    — Debout, mon ami ! claironna-t-elle. Il vous faut un habit de cour !
    La comtesse fit entrer son marchand de mode, suivi de ses commis qui apportaient vestes et culottes de soie brodées.
    — Il signor Panella ! Confiez-vous à lui !
    — Mes habits me vont très bien, grogna Ponceludon. Je n’ai besoin de rien.
    — Demain à onze heures, dit la comtesse avec bonne humeur, vous vous trouverez par hasard en bas de l’escalier de l’Orangerie. Le roi et quelques courtisans vous y surprendront.
    Le jeune homme se redressa subitement dans le lit.
    — Ce sera à vous de jouer ! lui glissa-t-elle tendrement avant de s’éclipser.
    Veste de soie lilas brodée de fils d’or, chapeau noir à bords gansés d’argent, Ponceludon arpentait fébrilement l’allée en contrebas de l’escalier qui descend vers l’Orangerie. Il entendit des bruits de pas et de conversations au-dessus de lui et se porta au-devant du groupe, pour s’accouder négligemment à la balustrade de l’escalier. Il sortit vivement de sa poche son petit volume de Vitruve et fit semblant de s’absorber dans la lecture. Les voix se rapprochaient.
    — Madame de Blayac... n’est-ce pas le jeune homme dont vous m’avez parlé ?
    Ponceludon, feignant d’être surpris dans sa lecture, leva les yeux et vit le roi.
    — Monsieur Grégoire Ponceludon de Malavoy, sire, répondit la comtesse qui marchait aux côtés de la reine, parmi une dizaine de courtisans.
    Le jeune hobereau mit chapeau bas et fit une révérence.
    — Cela est bien, dit le roi avec bonhomie. On dit que vous êtes un homme de beaucoup d’esprit !
    Le jeune homme baissa les yeux avec modestie.
    — Sire... protesta-t-il.
    — Mais si ! La comtesse de Blayac ne tarit pas d’éloges. Montrez-nous un peu cela...
    Son destin et celui de son pays de Dombes étaient entre

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