Bücher online kostenlos Kostenlos Online Lesen
Ridicule

Ridicule

Titel: Ridicule Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Remi Waterhouse
Vom Netzwerk:
incisifs que son irrésistible ascension lui avait valu d’envie, et déjà ses obligés les plus médiocres se permettaient de murmurer. On ne tarderait pas à essayer de prévenir le roi contre elle. Le jour où la comtesse tomberait en cour, ses amis empressés seraient de la curée, elle l’avait toujours su, mais ne s’en choquait pas. C’était la règle.
    Déjà, les visites s’espaçaient, il convenait de réagir, de faire un retour éclatant. Sa lettre à Ponceludon était inexacte. De l’aventure des treize à table, la rumeur, capricieuse, n’avait retenu que « Judas avait d’excellentes fréquentations ». Ce mot avait fait le tour de la cour et beaucoup desservi Mgr d’Artimont (on aurait crié au génie si on en avait connu les dessous). La comtesse comptait donc sur Ponceludon pour l’aider à reprendre l’ascendant sur ses ennemis avant qu’ils ne nuisent. Elle savait, pour s’y être frottée, que l’esprit du jeune homme était d’une rare vivacité. C’était l’homme d’esprit du moment, et il devait être son amant.
    Annoncé par Victor, le valet de la comtesse, Ponceludon fut aussitôt introduit. Il lui fut servi un copieux souper en cuisine, auquel la comtesse assista en écoutant distraitement le récit de la mort de Léonard.
    — C’est donc tellement horrible ? fit-elle avec une moue vaguement dégoûtée.
    Ponceludon saisit la main de la comtesse, et approcha ses lèvres des siennes. Amélie de Blayac ne protesta qu’avec la plus grande indulgence et Ponceludon vainquit sa résistance sans délai. Pour un jeune homme qui n’avait connu que des amours grossières d’étudiant ou des paysannes pauvres et sans apprêt, le corps souple et parfumé de la comtesse était la révélation d’un mystère. Son ardeur ne faiblit qu’au chant du coq et ils avaient été six fois « heureux ».
    À cinq heures, Victor attela la voiture et partit quérir M. de Bellegarde comme la comtesse le lui avait commandé. Vers six heures, Ponceludon descendit au cellier choisir une bouteille de Champagne. Ce vin passait pour réveiller les transports assoupis.
    Le physiologiste, pressé par le valet de la comtesse, embarqua dans la voiture après avoir garni sa trousse de chirurgien, et l’équipage fila dans la campagne que les premières pâleurs de l’aube éclaircissaient déjà. Bellegarde monta les escaliers quatre à quatre pour trouver Mme de Blayac négligemment allongée sur son lit défait, en cheveux, mais en parfaite santé.
    — Vous m’avez fait appeler, madame ? souffla le marquis, hors d’haleine.
    — Un accès de palpitations, répondit négligemment la comtesse en remontant son drap. Pardon de vous avoir fait déranger à cette heure matinale. J’ai eu tellement peur !
    Elle eut ce sourire plein d’une désarmante candeur auquel elle n’avait jamais renoncé malgré les quand le ciel pâlit, années, car son efficacité n’avait jamais été démentie.
    — L’important est que nous soyons rassurés, commenta Bellegarde. Cela vous arrive-t-il souvent ?
    La réponse de la comtesse ne vint jamais, car Ponceludon venait d’entrer, une bouteille de Champagne à la main, seulement vêtu d’une robe de chambre en voile de Tulle. La stupéfaction bâillonna un instant les deux hommes. La comtesse rompit le silence d’un ton badin.
    — Nous sommes entre amis, je crois.
    Le marquis reprit son chapeau et sa trousse avec des gestes militaires.
    — Permettez-moi de me retirer, comtesse, articula-t-il froidement.
    Et se tournant vers Ponceludon, il ajouta d’une voix blanche :
    — Surveillez le coeur de madame. Ces palpitations m’inquiètent.
    Dans la voiture qui le ramenait chez lui, le marquis remâchait son dépit. Il avait toutes les raisons de penser que Ponceludon, après avoir séduit Mathilde, avait trouvé refuge chez la comtesse sans probablement n’avoir jamais regagné la Dombes. Quand il retrouva sa demeure, il était sept heures passées. Tout au long du chemin, Bellegarde s’était juré de se battre avec le jeune homme si Mathilde devait être grosse de lui. Il réveilla sa fille, que son air sombre effraya, et la pria de le rejoindre au salon dès qu’elle serait habillée. Là, il la questionna d’une manière aussi précise que sa pudeur le lui permettait, c’est-à-dire de façon aussi embrouillée qu’il était possible. Mathilde, si elle n’avait jamais connu la volupté d’être aimée, avait en ces matières une

Weitere Kostenlose Bücher