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Rive-Reine

Rive-Reine

Titel: Rive-Reine Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Maurice Denuzière
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ton mari. Ces circonstances atténuantes, que je t’ai longtemps refusées, maintenant, je te les accorde. Guillaume n’est pas l’homme que je croyais. Je fais taire mes amis catholiques quand ils crient : « Protestants sacripants. » Eh bien, ils ont raison ! s’indigna Geneviève Rudmeyer, la première fois qu’elle revit sa fille.
     
    Plus tard, au cours d’une autre conversation, elle alla jusqu’à la plaindre.
     
    – Tu ne peux même pas faire comme Guillaume et te marier une seconde fois, puisque le sacrement de mariage est interdit à une femme divorcée jusqu’à la mort de l’ex-époux !
     
    – Je ne peux tout de même pas tuer Guillaume ! répliqua Charlotte en riant.
     
    – Les réformés ont organisé leur religion de manière à faire croire que le Seigneur accepte toutes les copulations, sans tenir compte du sacré ! Que veux-tu, ma pauvre petite, cette privation de mari, dont j’espère qu’elle ne te pèse pas, c’est le moyen d’expier ta faute, dit la vieille dame, d’un ton sévère.
     
    Et, comme Charlotte soupirait, la bigote ajouta :
     
    » Marie-Blanche, que tu connais, et qui a divorcé parce que son ivrogne de mari la battait et troussait tous les jupons à sa portée, a choisi, maintenant que ses enfants sont établis, d’entrer chez les carmélites d’Annecy. Je n’ai pas de conseils à te donner, mais, quand je ne serai plus de ce monde, tu pourras faire de même. Ce sera pour toi la meilleure façon de regagner l’estime de Dieu, s’il veut bien te l’accorder !
     
    Charlotte sourit et ne prit pas d’engagement avant de regagner Lausanne.
     

    Rien, en ce printemps, ne pouvait réjouir autant Axel Métaz que la décision de Blaise de Fontsalte. Sa mère allait, enfin, connaître l’aboutissement d’une passion amoureuse qui lui avait valu, jusque-là, plus d’humiliations que de bonheur. Elle mènerait, sous un nouveau nom, et avec un titre de marquise, ce qui ne pourrait manquer de plaire à une femme aux goûts aristocratiques, une existence tranquille et une vie sociale et mondaine sans aléas.
     
    C’était compter sans les scrupules religieux de Charlotte, stimulés par les récentes considérations de la veuve Rudmeyer. Trois jours après l’entrevue de Lausanne, Axel reçut un billet de Fontsalte, dont la lecture le laissa d’abord pantois, puis affligé.
     
    « Cher Axel,
     
    » Ma demande n’a pas été agréée par votre mère.
     
    » Je comprends les raisons qui la conduisent à refuser l’union que je lui ai proposée ; elles sont pour moi désolantes mais respectables. Notre mariage ne pourrait pas, en effet, être béni par un prêtre, puisque l’Église catholique refuse les sacrements aux divorcés et considère qu’un mariage ne peut être rompu que par la mort d’un des conjoints. Au regard de l’Église catholique, votre mère est donc toujours l’épouse de M. Métaz. Nous pourrions, certes, aller nous marier en France, où les curés ne font plus fonction d’officiers d’état civil, comme ici, mais votre mère ne saurait se satisfaire d’un mariage purement administratif qui, dans son esprit, équivaut seulement à officialiser le concubinage. La situation est donc sans issue et je me prends à regretter que votre mère n’appartienne pas, comme vous, à l’Église protestante, où l’on fait preuve de plus d’humanité envers les fidèles. Vous pouvez imaginer, cher Axel, ma déconvenue. Elle ne modifie en rien les sentiments et les attentions que je porte à Charlotte ni la forte affection que j’ai pour le fils que vous m’êtes, n’en déplaise, cette fois, à l’administration et à toutes les Églises réunies. Je me rends dans mes terres de Fontsalte – où je compte bien vous accueillir un jour – pour éviter des tracas administratifs. L’exploitation des sources devant bientôt être soumise à une autorisation du ministre de l’Intérieur, la Société royale de médecine exige une analyse physico-chimique des eaux minérales naturelles. Je dois donc me mettre en règle, car le gouvernement prépare, dit-on, une ordonnance 9 qui rendra obligatoire le contrôle des sources. Croyez à la force intacte de mes sentiments pour votre mère et pour vous. Blaise. »
     
    – La peste soit des papistes ! se surprit à crier Axel.
     
    Ainsi, par respect d’un règlement ecclésiastique sans aucun fondement divin, Charlotte se privait d’un bonheur qu’il considérait mérité

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