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Rive-Reine

Rive-Reine

Titel: Rive-Reine Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Maurice Denuzière
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déjà trois jours et ma femme a écrit une longue lettre à M me  Laviron. Mon secrétaire l’a portée lui-même à la diligence de Genève. À l’heure qu’il est, les Laviron, messieurs, connaissent la triste fin de Juliane, que tous les jeunes artistes et les amis de M. Ary Scheffer appréciaient beaucoup. Quelle triste fin pour une si belle et intelligente jeune fille ! Elle nous a souvent parlé de vous en bonne part, monsieur Métaz, conclut le banquier.
     
    Alors qu’Axel quittait peu l’hôtel pour y attendre le passeport spécial nécessaire aux morts, Louis Vuippens explorait la ville et rapportait de ses tournées des informations ahurissantes. Des gens, soupçonnés sans raison d’avoir empoisonné les fontaines, le vin ou le lait, avaient été battus à mort par une foule terrorisée. Une circulaire stupide du préfet de police, adressée aux commissaires de quartier, était à l’origine de ces exactions barbares.
     
    – Écoute ça, dit le médecin, indigné, en brandissant le papier que lui avait remis un confrère parisien :
     

    « Monsieur le Commissaire,
     
    » L’apparition du choléra-morbus dans la capitale, source de vives inquiétudes et d’une douleur réelle pour tous les bons citoyens, a fourni aux éternels ennemis de l’ordre une nouvelle occasion de répandre, parmi la population, d’infâmes calomnies contre le gouvernement : ils ont osé dire que le choléra n’était autre chose que l’empoisonnement effectué par les agents de l’autorité pour diminuer la population et détourner l’attention générale des questions politiques.
     
    » Je suis informé que, pour accréditer ces atroces suppositions, des misérables ont conçu le projet de parcourir les cabarets et les étals de boucherie avec des fioles et des paquets de poison, soit pour en jeter dans les fontaines ou les brocs, ou sur la viande, soit simplement pour en faire le simulacre, et se faire arrêter en flagrant délit par des complices qui, après les avoir signalés comme attachés à la police, favoriseraient leur évasion et mettraient ensuite tout en œuvre pour démontrer la réalité de l’odieuse accusation portée contre l’autorité 7 . »
     

    » Suivent des consignes aux commissaires et c’est signé Henri Gisquet 8 , préfet de police de Paris, acheva Vuippens, pestant.
     
    Cette provocation ajoutait aux victimes du choléra celles d’une colère injustifiée du peuple, qui s’en prenait parfois aux Juifs, aux vagabonds, aux garçons bouchers et même aux médecins, traités d’empoisonneurs publics !
     
    – Il semble que les gens en veuillent, surtout, aux médecins pour leur incompétence. Ils disent : « Dix médecins, dix remèdes ! Et aucun efficace ! » ajouta Axel, qui avait bavardé avec le valet d’étage.
     
    – Il est vrai que les plus grands maîtres de la Faculté sont très indécis quant au traitement du choléra. François Broussais, titulaire de la chaire de thérapeutique générale, surnommé le Napoléon du Val-de-Grâce tant il a d’autorité, ne jure que par les sangsues et la glace, comme les Russes. Le premier chirurgien de l’Hôtel-Dieu, Guillaume Dupuytren, tient pour les saignées et les ventouses. Dominique-Jean Larrey, l’admirable chirurgien en chef de la Grande Armée, qui enseigne au Val-de-Grâce, propose vésicatoires, frictions et ventouses. Quant à Jean-Louis Alibert, de l’hôpital Saint-Louis, il prescrit des vomitifs – à des gens qui vomissent déjà ! – et du quinquina !
     
    – Qui suivre, alors ?
     
    – Tant que ces éminents Diafoirus n’auront pas admis qu’il faut d’abord juguler la contagion, la maladie tuera les trois quarts de ceux qu’elle attrapera ! La mort de M. Casimir Perier, le président du Conseil, fera peut-être réfléchir. Le 1 er  avril, alors qu’il se portait fort bien, il est allé passer plusieurs heures avec le duc d’Orléans, fils de Louis-Philippe, à l’Hôtel-Dieu, pour réconforter les malades. Ils ont serré des mains, distribué des consolations. Une douzaine de cholériques sont morts sous leurs yeux pendant le temps de la visite. Eh bien ! trois jours plus tard, M. Casimir Perier a perçu les premiers symptômes de la maladie. Il a souffert horriblement et mis plus d’un mois à mourir. Et le savant Georges Cuvier, qui est mort le 13 mai, pourrait bien avoir succombé, lui aussi, au choléra. Seulement, on hésite à le dire !
     
    – Que

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