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Sang Royal

Sang Royal

Titel: Sang Royal Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Christopher John Sansom
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souci.
    — Par conséquent, sir Edward est bien traité ? »
    Il inclina la tête. « Il a été quelque peu malmené par les interrogateurs du roi lorsqu’il a été arrêté. Avant que certains éléments soient mis au jour et qu’on décide alors de le transporter à Londres. Il s’agit d’affaires on ne peut plus secrètes. » Il haussa les sourcils, sachant sans doute que la nature de ces éléments ne m’avait pas été révélée, pas plus qu’à lui. Cranmer avait dû l’en informer dans sa lettre.
    « Ainsi donc il a été torturé avant votre arrivée ? »
    Il opina du chef. « Il souffre un peu, on ne peut rien y faire. Mais il se maintient plutôt bien. Il sera bientôt à Londres, où ses souffrances seront alors bien pires. Le roi veut le questionner le plus tôt possible, mais il importe surtout que l’interrogatoire soit conduit par les plus habiles spécialistes, et ceux-ci se trouvent à Londres. »
    Je m’étais efforcé de ne pas penser à ce qui attendait le prisonnier au terme de son voyage. Je réprimai un frisson.
    « Eh bien, monsieur ! s’écria Radwinter d’un ton joyeux. Puis-je vous offrir une bière ?
    — Non merci. Pas pour le moment. Il vaut mieux que je voie tout de suite sir Edward. »
    Il inclina de nouveau la tête. « Bien sûr… Je vais prendre les clefs. » Il se dirigea vers un coffre et l’ouvrit. Je jetai un coup d’œil sur les papiers qui jonchaient son bureau : des mandats d’arrêt et ce qui paraissait être des notes rédigées sur un feuillet d’une petite écriture ronde. Le livre qu’il lisait était un exemplaire de L’Obédience d’un chrétien, un texte réformiste de Tyndale. Le bureau était placé à côté d’une des minces rayères d’où l’on avait une bonne vue sur la ville. J’aperçus de nombreux clochers et une grande église qui ne possédait plus de toit, sans doute un autre monastère dissous. Au-delà s’étendaient des marais et un lac. En plongeant le regard juste en dessous je constatai que la douve s’élargissait de ce côté-là du château pour former un large canal bordé de roseaux serrés. Des gens allaient et venaient à cet endroit, des femmes portaient de gros paniers sur le dos.
    « Elles cueillent des roseaux pour fabriquer des chandelles à mèche de jonc. » La voix douce de Radwinter, qui s’était rapproché, me fit sursauter. « Et vous voyez, là ? » demanda-t-il en désignant une femme en train d’extraire quelque chose de sa jambe. J’entendis un petit cri de douleur lointain. Radwinter sourit. « Elles recueillent les sangsues fixées à leur peau pour les vendre aux apothicaires.
    — Quelle affreuse occupation que de rester enfoncé dans la boue à attendre que ces bestioles vous assaillent !
    — Leurs jambes doivent être couvertes de petites cicatrices. » Il se tourna vers moi et plongea son regard dans le mien. « Comme le corps de l’Angleterre est couvert de celles que la grande sangsue de Rome a laissées… Bon, allons voir notre ami Broderick ! » Pivotant sur ses talons, il se dirigea vers la porte. Je pris la bougie qui se trouvait près de son siège et le suivis.
    Radwinter grimpa rapidement les marches menant à l’étage supérieur et s’arrêta devant une lourde porte munie d’un judas à barreaux. Il jeta un œil à l’intérieur avant de déverrouiller la porte. J’entrai dans la pièce sur ses talons.
    La cellule, petite et sombre, ne recevait de lumière qu’à travers une minuscule fenêtre à barreaux sans vitre. Les volets ouverts laissant pénétrer la bise. L’atmosphère était glaciale, humide, puante, et les joncs sous mes pieds étaient gluants. Un bruit de chaîne attira mon attention vers un coin de la pièce. Une mince silhouette en chemise blanche sale était allongée sur un grabat de bois.
    « Vous avez un visiteur, Broderick, annonça Radwinter de sa voix égale et douce. Il vient de Londres. »
    L’homme enchaîné se redressa, dans un bruit de ferraille. La lenteur et la difficulté de ses mouvements laissaient présager qu’il s’agissait d’un vieillard. Mais, lorsque je m’approchai, je perçus sous la couche de crasse le visage d’un homme de moins de trente ans. Des cheveux blonds poisseux et une barbe hirsute encadraient un long visage étroit qui, normalement, devait être beau. Il n’avait guère l’air redoutable, mais quand il m’examina la colère qui luisait dans ses yeux injectés de sang me

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