Sang Royal
bêtes, dont la plupart étaient déjà sellées. J’aperçus le sergent Leacon au milieu de la foule.
« Vous allez chevaucher aujourd’hui ? demanda-t-il.
— Oui. Si je peux trouver mon cheval. »
Poussé violemment contre une stalle, je me retournai avec colère.
« Dégagez ! Maison de la reine. » Flanqués de serviteurs qui écartaient sans ménagement tout le monde sur leur passage, un groupe de courtisans conduisaient leur monture vers le portail. Je reconnus Francis Dereham, qui m’adressa un sourire sardonique. Les courtisans passés, Barak et moi revînmes vers les stalles.
« Attention, monsieur, attention ! » cria vivement une voix de femme que je reconnus. Jennet Marlin se trouvait à deux pas de moi. Un jeune courtisan tentait de calmer son cheval, qui, effrayé par la foule, renâclait en secouant la tête et menaçait d’aplatir Mlle Marlin contre une stalle. Barak s’avança. « Prenez garde ! s’écria-t-il. Prenez garde à la dame ! » Il aida le jeune homme à calmer le cheval, tandis que j’offrais mon bras à Mlle Marlin pour l’aider à s’éloigner de l’animal. Elle me regarda d’un air surpris.
« C’est vous ? Ah… Merci !
— Vous cherchez votre jument ?
— Oui. Elle doit être quelque part par ici. »
Barak et moi l’aidâmes à retrouver la stalle de sa monture, un palefroi gris, tout sellé.
« Venez avec nous ! lui dis-je. On va juste chercher nos bêtes.
— Non merci, répondit-elle en rougissant. Tout va bien, maintenant. Je vous suis très reconnaissante de votre sollicitude et vous remercie de tout cœur. » Elle saisit la bride de sa jument et s’éloigna.
« Elle n’aime pas qu’on la considère comme une faible femme, déclara Barak.
— À l’évidence, elle a sa fierté. » Nous nous frayâmes un chemin jusqu’aux stalles où nous attendaient Sukey et Genesis, déjà sellés, comme tous les autres chevaux. Nous les fîmes sortir de l’église, non sans difficultés, attendu leur nervosité. Si Sukey, la jument de Barak, avait toujours été rétive, je fus surpris de constater à quel point Genesis, habituellement si calme, était soudain devenu ombrageux.
« Quelle cohue ! m’exclamai-je. Quel manque d’organisation ! Quelqu’un pourrait être facilement piétiné. »
Ce fut un grand soulagement de ressortir de l’église. De petits groupes d’hommes s’étaient formés tout autour du cimetière, certains à cheval, d’autres tenant leur monture par la bride. Il s’agissait des maisonnées de nobles et de personnages officiels et, près de la porte de l’enceinte, se trouvaient celles du roi et de la reine. Il y avait également une bande d’avocats et de clercs entourant un sir James Fealty à la barbe blanche, lequel jeta un coup d’œil vers nous et cocha deux noms sur une liste qu’il tenait à la main.
Parmi les membres de la maisonnée de la reine, Tamasin était montée sur un palefroi gris à côté de Jennet Marlin juchée sur le sien, l’air toujours un peu égarée. Non loin, vêtue d’un manteau prune et chevauchant une grande jument noire, lady Rochford rayonnait auprès de sir Richard Rich, à califourchon sur une belle jument grise. Alors que je me tournais vers la maisonnée du roi, je fus déconcerté de découvrir Maleverer parmi la foule vêtue de ses plus beaux atours. Allait-il faire partie du cortège ? L’idée ne me plaisait guère. C’est alors que je sentis un regard posé sur mon dos ; je jetai un coup d’œil derrière moi, juste à temps pour voir Thomas Culpeper détourner sa belle tête.
Craike se trouvait tout près, monté sur un robuste rouan. Même à cheval il transportait toujours son écritoire attachée autour du cou. Il fouillait dans ses papiers, mais lui aussi croisa mon regard. Je devinai qu’il aurait préféré ne pas avoir à me saluer. Il hésita, puis esquissa un pâle sourire. « Bonjour, confrère Shardlake.
— Confrère Craike ! m’écriai-je d’un ton volontairement joyeux. Quelle cohue dans cette écurie !
— En effet. Moi, je suis allé chercher mon cheval très tôt.
— Tu vas être très occupé maintenant qu’on reprend la route.
— Oui, je pars dans quelques instants. Je dois gagner le château de Holme à l’avance afin de m’assurer que tout est prêt pour accueilli le roi.
— Je suppose que nous devrons attendre avec les autres avocats.
— Oui, vous allez sans doute devoir prendre votre mal en
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