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Sarah

Sarah

Titel: Sarah Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Halter,Marek
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répéta sa demande : que Sililli trouve les tentes des mar.Tu, remercie le potier Terah pour la beauté des statues.
    — Dis-lui que je regrette la brutalité
de Kiddin et l’affront qu’il leur a fait. Dis-lui que moi, la Sainte Servante
du Sang, en compensation, j’invite son fils Abram à partager mon repas de
l’aube, après-demain.
    Sililli roula des yeux.
    — Tu ne peux le faire venir !
C’est un blasphème de faire entrer un mar.Tu ici ! Tu vas souiller
le temple ! Que se passera-t-il si les autres l’apprennent ? Je le
sais : la Grande Prêtresse le dira au roi. Et c’en sera fini, il ne voudra
plus de toi dans la Chambre Sublime.
    — Cesse tes sottises et fais marcher
ta cervelle ! s’exaspéra Saraï. Il est très normal qu’un potier vienne au
temple. Il en est tous les jours qui apportent leurs ouvrages.
    — Mais pas ici, dans le giparù. Pas
pour partager le repas d’une prêtresse. Kiddin a raison, tu vas nous conduire
tout droit au malheur.
    Saraï s’écarta, glaciale, le visage dur et
hautain comme elle l’avait parfois devant le taureau.
    — Très bien. Je me débrouillerai sans
toi.
    D’un geste, elle ordonna à Sililli de la
laisser seule. Mais Sililli ne bougea pas. Ses doigts boudinés essuyèrent les larmes
qui perlaient à ses paupières. D’une voix à peine audible, tremblante et lasse,
elle demanda :
    — Que vas-tu lui dire, à ton mar.Tu  ?
Que le sang ne coule plus entre tes cuisses depuis sept années ? Même les mar.Tu veulent des femmes au ventre plein.
    Saraï rougit comme si la servante l’avait
giflée. Mais Sililli n’avait pas l’intention de se taire :
    — Tu n’as pas encore compris ?
Sainte Servante du Sang, voilà ce que tu es. Et tu le resteras pour toujours.
Ici, on te veut telle que tu es. Ici, on te respecte et on t’envie. Les
guerriers t’aiment car ils espèrent que, grâce à toi, ils ne saigneront pas au
combat. Mais hors de ce temple, Saraï, tu n’es qu’une femme au ventre sec.
    — Tu n’as pas le droit de me parler
ainsi.
    — Je le prends. Je le peux. Je suis
celle qui s’est tue pour toi pendant toutes ces années. Je suis celle qui a
brûlé les herbes de la sorcière. Une fois déjà, les dieux t’ont pardonné.
N’exige pas trop d’eux.
    La douleur déformait les traits de la
servante. La colère de Saraï s’effaça aussi brusquement qu’elle était venue.
Dans un élan oublié depuis longtemps, elle s’accroupit près de Sililli,
l’enlaça et posa sa joue sur son épaule.
    — Je ne demande qu’à le voir et à
l’entendre une seule fois, chuchota-t-elle. Une seule fois. Pour savoir si lui
aussi a pensé à moi durant toutes ces années.
    — Et après ?
    — Après, tout sera comme avant.
    *
    * *
    Saraï crut qu’il ne viendrait pas. Sililli
n’avait rapporté aucune réponse à son message :
    — Il m’a regardée comme si j’étais une
vieille folle. Ce qui signifie que lui au moins est sensé. Il a simplement
attendu que je parte. Son père m’a remercié, et c’est tout.
    Il était convenu que Sililli l’attendrait à
la nuit tombante à la porte ouverte dans le mur d’enceinte, à l’arrière du giparù. C’était un passage étroit et sans faste qu’empruntaient d’ordinaire ceux
qui conduisaient les bêtes, les chariots de grain et toutes les fournitures
nécessaires aux offrandes. Aux premières heures du jour, nul ne remarquerait un mar.Tu parmi la foule affairée des serviteurs et des esclaves.
    Discrètement, dans la nuit et avec l’aide
réticente de Sililli, Saraï avait disposé des lampes, des coussins et des
plateaux de nourriture dans l’une des pièces aveugles où l’on entreposait les
toges et les parures de rechange à l’approche de la grande cérémonie des
semailles. On y accédait par un étroit couloir ouvert dans l’énorme mur
entourant le giparù et que seules les servantes utilisaient. Une fois
qu’Abram serait là, il suffirait à Sililli de se poster dans le couloir, ainsi
personne ne pourrait les surprendre.
    Mais maintenant, alors qu’elle patientait
entre ces murs borgnes, Saraï doutait. Dans le long silence de son attente, il
lui fallait bien reconnaître que Sililli disait la vérité sur bien des points.
Des vérités cruelles qu’elle tentait d’ignorer comme on veut ignorer une
douleur lancinante et sans remède.
    Pourtant, aujourd’hui comme autrefois,
alors qu’elle n’était encore qu’une jeune fille convaincue

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