Septentrion
femelle. On avait la désagréable impression qu’elle se déplaçait dans une flaque de colle et qu’elle ne parviendrait jamais à traverser la largeur de la pièce qui vous séparait d’elle. Elle s’approchait. Puissante. Progressait – non pas précisément vers vous en tant qu’individu constitué, en tant que personne vivante qu’elle ne voyait déjà pratiquement plus, – mais vers ce sexe, ce sexe d’homme, levé, le nœud décapoté, prêt à être utilisé sur-le-champ. Vers lui. Vers lui seul. Cette épine. Ce petit glaive. Fascinée. Somnambule. Médium du sexe mâle. Privée de contrôle comme un personnage de tragédie antique mené par la destinée à l’échéance du sang. Elle roucoulait, gargarisante, la salive chuintée, et s’enfilait enfin, doucement, doucement, se poignardait au ventre, droite, par degrés, sans un mot, sans un cri, hagarde, défaite, vous coiffait de sa vulve excentrique, chapeau molletonné, descendait tout au long, depuis le vit, s’alourdissait, sans heurt, se pénétrait, ascenseur hydraulique surchauffé d’un immeuble insonore. Une fois en place, calée, membrée, elle gigotait à peine, à cheval, tête renversée en arrière, les seins mafflus, bombés, le bout mauve-noir, et se prenait à baragouiner dans sa langue natale, vagissante, à petites phrases assourdies, décolorées. Le foutre commençait à gargouiller sous elle. Filet ruisselant tiède. Vous inondait les couilles, les cuisses, le ventre, les fesses, la raie, vous calcinait la pointe qu’elle maintenait colmatée, étranglée dans sa profondeur ventrale, fesses contractées. Elle coulait régulièrement, comme un robinet. Ces menus exercices préparatoires se déroulant pour ainsi dire devant vous, à l’extérieur de la baraque foraine, sans qu’il y eût d’autre contact entre vous et elle qui demeurait rigide, assise. Simplement assise. Mais il se trouvait que ce fut sur votre pine et pas ailleurs.
Ce faisant, Mlle Nora Van Hoeck estimait qu’il ne s’agissait là que d’un impromptu en lever de rideau, une passe d’armes de complaisance. Et si par chance, l’habitude aidant, on avait réussi à se tirer brillamment de cette première escarmouche, à se retenir jusqu’à la douleur sous la piqûre mortelle des languettes de feu qui s’agitaient tambour battant au fond de son ventre, si par miracle on dominait encore d’assez haut la situation présente grâce à un effort de concentration de toute son attention sur un détail du plafond ou des tentures de velours vert bouteille, elle se mettait ensuite à la besogne proprement dite, jouant du cul, de la bouche et des mains presque simultanément dans une espèce d’extase érotique effrénée, le jus ruisselant d’elle comme d’une fontaine à soda, canule trouée. Elle accomplissait de remarquables pirouettes, prenant de sa propre initiative toutes les positions souhaitables, carrousel fou, vous saisissait, vous attrapait le bout du chose et le serrait dans son poing à vous faire hurler, l’enfournant aussitôt après entre ses lèvres gonflées, mûries par le plaisir, le cajolant de la langue, gentiment, comme pour calmer la douleur, se plaçait d’un bond à califourchon, jambes repliées, le dos tourné, à l’envers, offrant la boule cramoisie de son sexe en fluxion, lâchant souvent un pet involontaire qui fusait en même temps qu’une giclée plus forte ou un soupir d’aise, se retournait, pivotait, volte-face, sans dévulver, ployant, cassant la tige à l’intérieur, vissée, elle s’abattait, lourde, en sueur, la peau plaquée, bruit mou, corps à corps, moulage, soudure, griffant des ongles, des sabots, cavale plantureuse insoumise, muscles noués, elle cherchait votre bouche, en aveugle, palpant des lèvres, langue sortie, langue tirée, petit dard épointé, raidi, s’amollissant, elle suçait, bondissant à nouveau, dressée, mystérieusement battue, rouée, cinglée au fouet, frottant, raclant du sexe, va-et-vient empirique, épuisant, elle poussait un grand cri, un cri seul, pris aux chairs, quand le sexe s’échappait d’elle par mégarde dans l’allure désordonnée du mouvement, tombant, massive, inerte, chute de mort, assassinée, sans souille, cœur en suspens, les yeux bouclés, creux, perdant la bave aux coins des lèvres sur l’oreiller, restant ainsi sans geste, recroquevillée, quelques longues minutes, en silence. Foudroyée.
Par contre, lorsqu’elle reprenait ses esprits, comme
Weitere Kostenlose Bücher