Sépulcre
agir. Une fois de plus, on lui forçait la main, comme cela avait été le cas pour son frère. Julian jeta un coup d’œil au tableau accroché au-dessus de son bureau : un symbole du tarot, offrant des possibilités infinies, alors qu’il se sentait de plus en plus pris au piège.
Sur l’étagère, en dessous du tableau, étaient exposés des objets découverts au cours de ses excavations dans le domaine. Il avait mis du temps à admettre que les ruines du sépulcre n’étaient qu’un tas de vieilles pierres, rien de plus. Mais il avait déniché un ou deux objets intéressants. Une montre de bonne qualité, bien qu’assez abîmée, portant les initiales A.V., et un médaillon en argent contenant deux miniatures, tous deux trouvés dans des tombeaux qu’il avait fouillés, au bord du lac.
Voilà ce qui lui importait : le passé. Trouver les cartes. Et non régler les problèmes du présent.
Julian se dirigea vers le nécessaire à liqueur et se versa un cognac pour se calmer les nerfs. Il l’engloutit cul-sec, puis jeta un coup d’œil à l’horloge.
10 h 15.
Il prit sa veste suspendue derrière la porte, glissa une pastille à la menthe dans sa bouche, saisit les clés de sa voiture et sortit.
87.
Meredith quitta Hal alors qu’il parlait au téléphone, pour tenter d’obtenir un rendez-vous au commissariat de Couiza avant d’aller chercher Shelagh O’Donnell, comme prévu.
Elle l’embrassa sur la joue. Il leva la main et articula en silence qu’il la verrait plus tard, puis revint à sa conversation. Meredith s’arrêta pour demander à la gentille réceptionniste si elle savait où elle pourrait emprunter une pelle. Éloïse ne parut pas étonnée de cette curieuse requête : elle lui suggéra simplement de s’adresser au jardinier.
— Merci, je vais lui poser la question, dit Meredith.
Elle s’enroula son écharpe autour du cou et franchit les portes vitrées donnant sur la terrasse. Les brumes matinales s’étaient presque entièrement dissipées, mais une rosée argentée luisait encore sur la pelouse. Tout était baigné d’une lumière dorée et cuivrée, sur le fond de ciel froid tavelé de nuages blancs et roses.
L’odeur entêtante des feux de jardin embaumait l’atmosphère. Meredith la huma : les senteurs de l’automne lui rappelaient son enfance. Elle et Mary, découpant religieusement des visages dans les citrouilles pour en faire des lanternes de Halloween. Elle, préparant son déguisement pour aller quêter des bonbons chez les voisins. Elle revêtait en général un costume de fantôme : un drap percé de deux trous pour les yeux, avec une bouche effrayante dessinée au feutre noir.
Tout en dévalant d’un pas léger les marches menant au sentier en gravier, elle se demanda ce que faisait Mary en ce moment. Mais il n’était que 5 heures moins le quart, là-bas, à la maison. Mary dormait encore. Elle l’appellerait peut-être plus tard pour lui souhaiter un bon Halloween.
Le jardinier n’était pas là mais il avait laissé sa brouette. Meredith inspecta les environs au cas où il réapparaisse, mais ne vit rien. Elle hésita, puis saisit une petite truelle posée sur un tas de feuilles mortes, la glissa dans sa poche et se dirigea vers le lac en coupant à travers la pelouse. Elle la rapporterait dès qu’elle le pourrait.
C’était une sensation curieuse, mais elle avait l’impression de marcher dans les pas de la silhouette qu’elle avait aperçue plus tôt.
Aperçue ? Imaginée ?
Elle se retourna pour scruter la façade de l’hôtel et tenter de repérer sa fenêtre, en se demandant si elle avait réellement pu voir d’aussi loin ce qu’elle avait cru voir.
Lorsqu’elle parvint au bout du sentier contournant le lac par la gauche, le terrain se mit à monter. Elle escalada une pente herbeuse jusqu’à un petit promontoire qui dominait le lac, juste en face de l’hôtel. Cela semblait insensé, mais elle était convaincue que c’était précisément là que s’était dressée la silhouette qu’elle avait vue ce matin.
Imaginée.
Le banc de pierre en forme de croissant de lune luisait de rosée. Meredith l’essuya avec ses gants avant de s’y asseoir. Comme chaque fois qu’elle était au bord de l’eau, elle pensa à Jeanette et à la façon dont elle avait choisi de mettre fin à ses jours. En marchant dans le lac Michigan, les poches pleines de cailloux. Comme Virginia Woolf. Meredith l’avait appris à l’école bien
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