Sépulcre
la cire d’abeille et des fleurs fraîches posées sur le bar, à côté d’une pile de cartons attendant d’être déballés.
— Merci, dit Hal quand la serveuse posa devant eux un plateau avec le café.
Il y eut un moment de silence tandis qu’il les servait. Shelagh O’Donnell prit un café noir. Meredith remarqua à nouveau les cicatrices rouges sur ses poignets et se demanda ce qui s’était passé.
— Avant toute chose, dit Hal, je tiens à vous remercier d’avoir accepté de me rencontrer.
Meredith fut soulagée de constater qu’il semblait calme, posé, rationnel.
— Je connaissais votre père. C’était un type bien, un ami. Mais je dois vous dire que je n’ai rien de nouveau à vous apprendre, déclara son interlocutrice, visiblement sur la réserve.
— Je comprends, répondit Hal, mais je vous demande un peu de patience. Je sais bien que l’accident s’est produit il y a plus d’un mois, mais certains aspects de l’enquête ne me satisfont pas. J’espérais que vous seriez capable de m’en dire un peu plus sur la nuit de l’accident. D’après la police, vous pensez avoir entendu quelque chose, n’est-ce pas ?
Shelagh regarda Meredith, puis Hal, et détourna les yeux.
— Ils soutiennent toujours que Seymour est sorti de la route parce qu’il était ivre ?
— C’est ça que j’ai du mal à accepter. Ça ne ressemble pas à mon père.
Shelagh retira un fil de son pantalon. Elle semblait tendue.
— Comment avez-vous fait la connaissance du père de Hal ? lui demanda Meredith pour la mettre à l’aise.
Hal sembla surpris de son intervention, mais Meredith hocha imperceptiblement la tête, et il la laissa mener la barque à sa façon.
Shelagh O’Donnell sourit. Son visage en fut transformé et Meredith songea qu’elle aurait pu être séduisante si la vie ne s’était pas acharnée sur elle.
— Ce soir-là, sur la place, vous m’avez demandé ce que le mot « estimé » voulait dire.
— En effet.
— Eh bien, voilà ce qu’était Seymour. Tout le monde l’aimait. Et tout le monde le respectait, même ceux qui ne le connaissaient pas bien. Il était toujours poli, courtois avec les serveurs, les commerçants, il traitait tout le monde avec respect, pas comme…
Elle s’interrompit. Meredith et Hal échangèrent un regard. Ils pensaient tous deux à la même chose – Shelagh comparait Seymour à Julian Lawrence.
— Évidemment, il n’était pas souvent là, reprit-elle rapidement, mais j’ai appris à le connaître quand…
Elle se tut et se mit à tripoter un bouton de sa veste.
— Oui ? l’encouragea Meredith. Vous avez appris à le connaître quand… ?
Shelagh soupira.
— J’ai traversé une… période difficile, il y a environ deux ans. Je travaillais sur un chantier archéologique pas loin d’ici, dans les monts Sabarthès, et je me suis laissé entraîner à faire de mauvais choix. (Elle se tut un moment.) Bref, ça va mal depuis ce temps-là. Ma santé n’est pas très bonne, je ne travaille que quelques heures par semaine : je fais de petites expertises pour les ateliers de Couiza. (Elle se tut à nouveau.) Je suis venue vivre à Rennes-les-Bains il y a environ dix-huit mois. J’ai une amie, Alice, qui vit dans un village pas loin d’ici, Los Seres, avec son mari et sa fille, alors il me semblait logique de m’installer ici.
Meredith reconnut le nom du village.
— C’est bien de Los Seres qu’était originaire l’écrivain Audric Baillard, n’est-ce pas ?
Hal haussa les sourcils.
— Je lisais l’un de ses livres, tout à l’heure, dans ma chambre. L’une des trouvailles de ton père dans le vide-grenier.
Il sourit, visiblement ravi qu’elle se soit rappelé l’anecdote.
— En effet, acquiesça Shelagh. Mon amie Alice l’a bien connu. (Son regard s’assombrit.) Moi aussi, je l’ai rencontré.
Meredith devinait, à l’expression de Hal, que la conversation lui avait rappelé quelque chose à lui aussi, mais il n’en dit rien.
— Tout ça pour dire que j’avais des problèmes d’alcool. (Shelagh se tourna vers Hal.) J’ai rencontré votre père dans un bar à Couiza. J’étais fatiguée, j’avais probablement trop bu. On s’est mis à discuter. Il était gentil, un peu inquiet pour moi. Il a tenu à me raccompagner en voiture jusqu’à Rennes-les-Bains. Sans arrière-pensées. Le lendemain matin, il m’a ramenée à Couiza pour que je reprenne ma voiture. (Elle se tut un
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