Sépulcre

après vous, si jamais vous changez d’avis, nous pourrons toujours continuer. Y a-t-il un problème en particulier que vous aimeriez aborder, ou votre intérêt est-il d’ordre plus général ?
    — Comme je vous l’ai dit, cela participe pour moi d’un travail de recherche. Je rédige actuellement une biographie. Or dans cette rue, à l’endroit précis où nous nous trouvons, se trouvait une fameuse librairie qui a disparu pour faire place à un immeuble. Disons que cette coïncidence m’a intriguée, conclut-elle en souriant pour paraître détendue. Même si-votre fille – car c’est bien votre fille, n’est-ce pas ? – dit que les coïncidences n’existent pas.
    — Je comprends, acquiesça Laura. Vous cherchez comme un écho du passé.
    — Exactement, confirma Meredith avec un soupir de soulagement.
    — Entendu. Certains clients viennent chercher une réponse à une question précise touchant divers domaines comme le travail, une relation, une décision importante à prendre… À peu près tous les aspects de la vie, en fait. D’autres recherchent une approche plus générale.
    — Alors j’opte pour l’approche plus générale.
    — Très bien. Maintenant, il vous faut choisir quel jeu vous voulez utiliser.
    — Je regrette, mais je n’y connais rien. Je préférerais que vous choisissiez pour moi.
    Laura lui désigna différents jeux de cartes, tous face en dessous, alignés sur un côté de la table.
    — Je sais, c’est un peu déstabilisant comme début, mais il vaut mieux que vous choisissiez vous-même. Je vais vous les présenter, et vous verrez si l’un d’eux éveille en vous une sensation particulière. D’accord ?
    — D’accord, acquiesça Meredith en haussant les épaules.
    Laura prit le jeu le plus proche et étala les cartes en éventail sur la table. Elles avaient un dos bleu roi piqueté d’étoiles d’or à longues queues.
    — Elles sont belles, remarqua Meredith.
    — C’est le tarot Rider-Waite, un jeu universel, très populaire.
    Le dos du paquet suivant était orné d’un simple motif rouge et blanc répétitif.
    — Celui-là est par bien des côtés le plus classique, déclara Laura. On l’appelle le tarot de Marseille. Il date du XVI e siècle. Je m’en sers à l’occasion, mais à dire vrai, il est un peu trop simple au goût de nos contemporains. La plupart des consultants préfèrent les jeux modernes.
    — Excusez-moi, mais qu’entendez-vous par « consultant » ?
    — Désolée, répondit Laura avec un sourire. Le consultant est la personne à qui l’on tire les cartes, celle qui pose les questions.
    — Bien.
    Meredith regarda la rangée et désigna un jeu qui était un peu plus petit que les autres. Le dos était d’un beau vert profond filigrané d’or et d’argent.
    — Et celui-ci ?
    — C’est le tarot Bousquet.
    — Bousquet ? répéta Meredith, avec l’impression d’avoir déjà entendu ce nom. C’est le nom de l’artiste ?
    — Non, c’est celui de l’éditeur d’origine. Personne ne connaît l’artiste ni celui ou celle qui lui a commandé les cartes au départ. On sait juste que le jeu vient du sud-ouest de la France où il est apparu vers 1890.
    Meredith sentit soudain des picotements dans sa nuque.
    — Et où précisément dans le Sud-ouest ?
    — Je ne m’en souviens pas. Quelque part dans la région de Carcassonne, je crois.
    — Je connais, répliqua Meredith en se figurant la carte de la région, avec Rennes-les-Bains en son centre.
    — Cela vous évoque quelque chose ? s’enquit Laura en la scrutant d’un air intrigué.
    — Non, ce n’est rien, s’empressa de répondre Meredith. Ce nom m’était familier, voilà tout. Mais je vous en prie, continuez, ajouta-t-elle avec un sourire.
    — Le jeu de cartes d’origine est bien plus ancien, du moins en grande partie. Nous ne pouvons être certains de l’authenticité de toutes les images, car certaines caractéristiques des arcanes majeurs laissent à penser qu’ils furent modifiés par la suite. Les motifs, les vêtements des personnages sur certaines cartes s’apparentent au style fin de siècle, tandis que les arcanes mineurs sont plus classiques.
    — Arcanes mineurs, arcanes majeurs… Je m’excuse, mais vraiment je n’y connais rien. Puis-je vous poser une ou deux questions avant d’aller plus loin ?
    — Évidemment, répondit Laura en riant.
    — Bon, commençons par les bases. Combien de cartes y