Sépulcre
tarot Bousquet respecte aussi les associations traditionnelles. Par exemple, les épées forment la série air, représentant l’intelligence et l’intellect, les bâtons la série feu, énergie et conflit, les coupes la série associée à l’eau et aux émotions. Enfin, dit-elle en tapotant du doigt sur la carte du roi assis sur son trône entouré de ce qui ressemblait à des pièces d’or, les pentacles ou écus constituent la série terre, celle du trésor et de la réalité physique.
Meredith scruta les images pour bien les engranger dans sa mémoire, puis elle hocha la tête pour faire savoir à Laura qu’elle pouvait poursuivre ses explications.
Laura débarrassa la table en ne laissant que les arcanes majeurs, qu’elle disposa face à Meredith en trois rangées de sept cartes, du numéro le plus bas au plus haut. Quant au Mat, Fou ou « Zéro », elle le plaça seul, tout en haut.
— J’aime voir dans les arcanes majeurs les étapes d’un voyage, expliqua Laura. Ce sont les impondérables, les problèmes essentiels de la vie, qu’on ne peut ni changer ni combattre. Étalées ainsi, il apparaît clairement que ces trois rangées représentent les trois niveaux de développement, le conscient, l’inconscient et le supra-conscient.
Meredith sentit son scepticisme inné lui donner une pichenette.
C’est là qu’on quitte le pur domaine factuel pour entrer dans l’irrationnel, se dit-elle.
— Au début de chaque rangée se trouve une image puissante. Le Pagad, ou Magicien, au début de la première. La Force, en tête de la deuxième. Enfin, pour celle du bas, nous avons la carte XV, Le Diable.
L’image du démon grimaçant évoquait quelque chose à Meredith, ainsi que l’homme et la femme enchaînés à ses pieds. Telle une étincelle, cette réminiscence fusa dans son esprit, puis s’évanouit.
— Cette disposition des arcanes majeurs permet de faire apparaître en premier lieu le parcours du Fou, ou Mat, de l’ignorance à l’illumination, mais aussi les connexions verticales entre les cartes, poursuivit Laura. Ainsi, voyez comme La Force est à l’octave du Magicien, et Le Diable à l’octave de La Force. D’autres motifs surgissent également : Le Magicien et La Force ont tous deux le signe de l’infini au-dessus de leurs têtes. Et Le Diable lève le bras en un geste qui rappelle celui du Magicien.
— Comme les deux facettes d’une même personne.
— C’est possible, acquiesça Laura. Les motifs, les relations entre une carte et une autre, voilà ce qui constitue le tarot.
Meredith n’écoutait qu’à moitié. Pourtant une chose que Laura venait de dire la titillait. Mais quoi ? Ah oui, ce terme d’octave qu’elle avait employé.
— Expliquez-vous généralement ces principes en termes musicaux ? demanda-t-elle.
— Cela m’arrive, répondit Laura. Tout dépend du consultant. Il y a bien des langages pour interpréter le tarot. La musique en est un. Pourquoi cette question ?
— Oh, parce que c’est mon domaine, répliqua Meredith avec désinvolture. Je me demandais juste si vous l’aviez deviné… Je ne me souviens pas d’en avoir parlé, voilà tout.
— Cette idée vous trouble ? s’enquit Laura avec un léger sourire.
— Quoi, que vous l’ayez deviné ? Non, mentit-elle.
Décidément Meredith ne se sentait pas à l’aise. Son cœur lui disait qu’elle risquait d’apprendre quelque chose sur elle, sur qui elle était vraiment. Aussi voulait-elle que Laura ait en mains les bons éléments. Mais, en même temps, sa tête ne cessait de lui seriner que tout cela n’était qu’un tissu d’absurdités.
Meredith désigna La Justice.
— Il y a des notes de musique sur le bord de sa jupe. C’est curieux, non ?
— Comme vous l’a dit ma fille, il n’y a pas de coïncidences, remarqua Laura en souriant.
Meredith eut un petit rire. Pourtant elle ne trouvait pas ça drôle.
— Tous les systèmes de divination, comme la musique elle-même, travaillent en usant de motifs, de signes graphiques, continua Laura. Si cela vous intéresse, Paul Foster Case, un cartomancien américain, a sorti toute une théorie liant chacun des arcanes majeurs à l’une des notes de la gamme.
— Oui, je regarderai peut-être à l’occasion, répondit Meredith.
Laura rassembla les cartes en une pile bien nette. Elle soutint son regard et, l’espace d’un instant, Meredith sut qu’elle voyait au fond de son âme l’angoisse, le doute,
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