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Serge Fiori : s'enlever du chemin

Serge Fiori : s'enlever du chemin

Titel: Serge Fiori : s'enlever du chemin Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Louise Thériault
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attaché, mais
il ne l’admirait pas   ; Georges lui apparaissait plutôt comme
son meilleur ami. Ce n’est que plus tard qu’ils partageront
cette vie marginale qui finira par les rapprocher.
    Georges Fiori n’était pas prédestiné à une carrière musicale   : contrairement à son fils, ce n’est qu’à l’âge adulte,
au milieu des années 1940, qu’il décide, en compagnie de
son frère Émile, de se lancer dans l’univers de la musique.
Il s’agit d’un side-line , une jobine de plus pour arrondir ses
fins de mois. Georges sait gratter un peu la guitare et Émile
se débrouille plutôt bien au saxophone. Ils proposent alors
à Frank, le troisième frère, d’apprendre la contrebasse. Pendant les six mois qui suivent cette offre, Frank apprendra à
son tour, à l’oreille, les partitions qu’ils joueront ensemble
pour le reste de leur vie.
    Les premiers contrats des frères Fiori leur permirent de
jouer lors d’occasions comme des anniversaires de mariage, des premières communions, des noces ou encore des
bar-mitsva 1 .

    C’est en 1957 que Georges, qui vient d’obtenir un contrat
dans un bar de Lachine, amène avec lui son fils, alors âgé
de cinq ans.
    Sur la petite scène de ce bar, Serge Fiori chante devant
public pour la toute première fois de sa courte existence.
Dans un italien respectable, pourtant appris à l’oreille, il
exécute son premier Oye Maria, une chanson traditionnelle italienne, sous le regard fier de son père.
    S’accompagnant à l’aide d’une guitare plus grosse que
lui, il doit demeurer debout. Il exécute d’autres chansons
italiennes dont il ne connaît pas du tout le sens des paroles   ; c’est plus tard qu’il réalisera que celles-ci, apprises
en famille durant des soupers italiens très bien arrosés,
s’avéraient des chansons grivoises, hors de portée d’un
petit garçon de son âge   ! Cette constatation amusante lui
permettra de comprendre aussi la réception du public de
l’époque qui, amusé et sous le charme de cet enfant prodige, remplissait d’argent le chapeau qu’il passait de table
en table. Certains soirs, le petit pouvait gagner jusqu’à dix-huit dollars, ce qui était une somme considérable à l’époque. Il conservait précieusement cet argent dans un petit
coffre. Il avait décidé, à l’aide de son petit pécule, de s’offrir des instruments de musique. Adulte, Serge Fiori continuera toujours à s’interroger   : la réponse enthousiaste du
public venait-elle de son talent ou était-elle attribuable à
son innocence et aux paroles osées de ses chansons   ?
    Quoi qu’il en soit, ces premières expériences lui ont per
mis de s’affirmer, de développer une certaine assurance et
une grande confiance qui ne l’abandonneront plus jamais
quand il sera question de musique. Serge se sent à l’aise
sur scène et il reconnaît que même à cet âge, il possédait
le charisme et le leadership qui feraient de lui un grand
rassembleur. D’ores et déjà, il sent qu’il a des choses à faire
et à dire.
    Tout au long de sa carrière, Fiori demeurera étonné par la
profondeur de son engagement politique, par l’émergence
du souverainiste en lui, alors qu’il fut élevé par un père italien, une grand-mère québécoise qui lui a enseigné l’anglais, le tout au sein d’un environnement qu’il qualifie
lui-même de «   bizarre et d’ethnique   ». En dépit de tout, cet
engagement envers le Québec demeurera au centre de son
œuvre. Serge finira par confier que c’est ce père qui se passionne pour la scène et se produit dans des bars, des noces
italiennes, des fêtes juives, divertissant les confréries de
pompiers et de policiers un jour pour aller distraire le milieu mafieux le lendemain, c’est ce père qui lui ouvrira les
portes du monde de la musique et qui l’immergera dans
un univers coloré où toutes les ethnies se côtoient, une
immersion qui constituera le fondement de son identité
politique.

    L’audace et la générosité de Georges ont permis à son
fils de vivre l’un des plus beaux moments de sa relation
avec lui.
    Serge fréquente alors l’école primaire, à Duvernay. Sa
chant l’admiration sans bornes de son fils à l’égard du club
de hockey de Montréal, Georges n’hésite pas à aller frapper
à la porte de Maurice Richard, voisin de la famille, pour
tenter d’organiser une rencontre entre Serge et

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