Serge Fiori : s'enlever du chemin
son idole,
qui est alors l’étoile incontestée du club de hockey Les Canadiens.
Se présentant comme un Italien sans le sou, un homme
ordinaire qui ne cherche qu’à faire plaisir à son fils, Georges
sollicite la participation de Maurice. Il explique au joueur
qu’il veut faire vivre à Serge un merveilleux moment en
compagnie du joueur vedette, même si le tout ne consiste
qu’à le regarder quitter son domicile pour un match.
Charmé par la simplicité et l’honnêteté de Georges,
Maurice Richard accepte de bon gré. Georges retourne vite
chercher son fils qu’il ramène chez son idole, fièrement
vêtu de son chandail des Canadiens, patins en main ; Serge
est prêt à rencontrer son héros.
Ensemble, ils patinent dans la cour arrière du bungalow des Richard, accompagnés des enfants de ce dernier.
Georges deviendra vite le wop 2 préféré de Maurice, et Serge, son protégé. Cette pratique du samedi deviendra bientôt une habitude ; l’après-midi, Serge et Maurice patinent,
puis ils font une sieste. En soirée, ils se rendent ensemble
au Forum de Montréal, où Georges et Serge s’installent
derrière le banc des Canadiens pour assister aux matchs
du Tricolore.
Serge Fiori chérit ces moments exceptionnels. Aujourd’hui encore, dans le hall d’entrée de sa maison, une photo
de lui, enfant, aux côtés de Maurice Richard, occupe fièrement le mur.
Le fait de côtoyer ainsi son idole du hockey amène le
jeune Fiori à envisager de faire carrière dans ce sport. Durant ses jeunes années, il hésite réellement quelque temps
entre le hockey et la musique.
Alors qu’il joue pour le club de Laval, niveau collège A,
il participe à de nombreux tournois. C’est l’un de ces tournois, à Boston, qui met toutefois fin à ses espoirs de faire
une carrière de hockeyeur. Jeune gaillard rapide, il se faufile avec aisance entre les gros gars de l’équipe locale, alors
appelés « les bandits de Boston » ; Serge Fiori tape sur les
nerfs de ses adversaires. L’un d’entre eux finit par l’agresser et lui arrache son casque avant de le frapper à la tête
avec son bâton. Serge perd connaissance ; le cercle de mise
au jeu où il s’est écroulé se couvre de sang et le jeune hockeyeur doit être conduit à l’hôpital.
C’est presque un miracle qu’il n’ait pas perdu son œil :
Fiori arbore encore aujourd’hui une cicatrice bien visible
au sourcil droit.
De retour à Montréal, le jeune homme retrouve son
équipement de hockey accroché sur un cintre, juste à côté
de sa guitare. Décidé, il jette tout l’équipement à la poubelle, empoigne sa guitare et, sans regret, ne remettra plus
jamais en question son choix de carrière.
Pour le plus grand bonheur des Québécois, il vient d’op
ter pour la musique.
La rencontre avec Maurice Richard n’a pas apporté des
bénéfices qu’à Serge Fiori. Elle a aussi permis à son père
de s’immiscer au sein de l’organisation des Canadiens de
Montréal. Lors des événements spéciaux de l’équipe (tombolas, épluchettes de blé d’Inde, etc.), les frères Fiori sont
embauchés pour animer les soirées. C’est de cette manière que Georges tisse peu à peu des liens avec la brasserie
Molson, alors propriétaire du club de hockey. Pendant plusieurs années, il agira comme hôte lors des soirées du Club
Molson, soirées au cours desquelles près de deux cents invités dégustent de la bière et dansent sur la musique ballroom du groupe de Georges, qui se produit du lundi au
vendredi, de vingt heures à minuit. Nommé tout simplement Les frères Fiori, le band se compose alors d’Émile au
saxophone, de Frank à la basse, de Georges à la guitare et,
enfin, d’Alex Iamonico, un ami, qui joue de l’accordéon.
Dès l’âge de onze ans, Serge se joint à l’occasion à cet
orchestre, au sein duquel il apprend les rudiments de la
musique. Comme sa tâche consiste surtout à remplacer
les musiciens absents, le jeune Fiori doit s’adapter à tous
les instruments du band ; un soir, il remplace à l’accordéon, l’autre soir, à la basse. Trop souvent insatisfait de
sa performance, il rentre ensuite chez lui et répète encore
jusqu’au petit matin.
Le jeune artiste est aussi fréquemment invité, avec le
groupe, par la famille Cotroni, où il doit jouer durant des
heures, recevant de généreux pourboires afin d’interpréter
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