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Souvenir d'un officier de la grande armée

Souvenir d'un officier de la grande armée

Titel: Souvenir d'un officier de la grande armée Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Jean-Baptiste Auguste Barrès
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que tous les habitants du Haut-Rhin, des Vosges et de la Meurthe avaient dû donner par réquisition. Après vingt-trois jours, nous arrivâmes devant Strasbourg. Avant d’y entrer, nous fîmes une petite toilette. Nous mîmes nos bonnets d’oursin et nos plumets, et la garde d’honneur vint à notre rencontre. Nous fûmes logés dans le quartier Feinck-Mack.
    26 septembre. – L’Empereur, parti de Saint-Cloud le 24 septembre (2 vendémiaire), arriva à Strasbourg le 26. On avait élevé à la porte de Saverne un arc triomphal, avec des inscriptions présageant ses victoires. Son entrée fut annoncée par des salves d’artillerie et des sonneries de cloches. La garde d’honneur, brillante de jeunesse et de tenue, ouvrait la marche majestueuse. Elle fut accueillie par des acclamations mille fois répétées. Les habitants de l’Alsace s’étaient portés comme un torrent sur son passage. Le soir, au milieu des illuminations, la flèche de la cathédrale était une colonne de feu suspendue dans les airs.
    J’étais de garde au palais impérial. J’eus l’occasion de voir les présents et les curiosités que l’on fit à l’Empereur, notamment une carpe monstrueuse du Rhin.
    Depuis le 20, une partie des troupes du camp de Boulogne, celles venant de l’intérieur, et la garde impériale arrivaient à Strasbourg par toutes les portes, prenaient les approvisionnements qui leur étaient nécessaires et se dirigeaient sur le Rhin, qu’elles passaient à Kehl. Elles s’organisaient définitivement sur la rive droite, en attendant l’ordre de marcher en avant. Les hommes et les chevaux bivouaquaient dans les rues ; les voitures de l’artillerie, des équipages et des approvisionnements les encombraient : c’était un pêle-mêle à ne pas s’y reconnaître.
    27 septembre. – Il ne restait presque plus de troupes, à Strasbourg, que nous. Nous attendions, pour partir, la Garde, qui devait venir de Boulogne. Elle arriva dans la journée du 27 septembre. Ce fut un jour de fête, pour tout le monde, de se revoir après une longue absence, et surtout pour les jeunes gens. On s’occupa tout de suite de nous amalgamer. Tous les vélites changèrent de compagnie. Je regrettai sincèrement la mienne, et j’entrai dans la 9 ème du 1 er bataillon du 2 ème régiment.
    Il fut délivré à chacun de nous cinquante cartouches, quatre jours de vivres et des ustensiles de campagne. J’eus l’extrême avantage d’être désigné le premier pour porter la marmite de mon escouade, comme étant le moins ancien de service.

ENTRÉE EN ALLEMAGNE
     
    29 septembre. – Nous partîmes de Strasbourg avant le jour, et fûmes nous réunir en avant de Kehl. Je vis pour la première fois le Rhin, à 10 heures du matin, et je ne passai point le majestueux fleuve sans éprouver un secret contentement, quand ma mémoire me rappela tous les beaux faits d’armes dont ses rives avaient été témoin. Ces souvenirs belliqueux me faisaient désirer quelques glorieux combats, où je pourrais satisfaire ma vive impatience.
    Toute la Garde arrivée, nous nous mîmes en marche, le maréchal Bessières en tête. Jamais la Garde ne s’était vue aussi nombreuse. La colonne était immense. La journée fut longue et fatigante, à cause du soleil, de la poussière et des munitions qui nous écrasaient, moi surtout avec ma pesante marmite. Si je m’étais laissé tomber, je n’aurais pas pu me relever, tant mes forces étaient anéanties. Je ne marchais plus, je me traînais. Quand on arriva à 10 heures du soir dans un village, près de Rastadt, j’étais si fatigué, que je ne pus ni manger, ni dormir. Je commençais à regretter Paris.
    1 er octobre. – Nous étions sous les armes avant le jour, bien fatigués de la veille. Il nous fut lu, avant de nous mettre en marche, une proclamation de l’Empereur aux soldats. Elle nous annonçait l’ouverture de la campagne contre les Autrichiens, qui venaient d’envahir la Bavière ; elle nous annonçait aussi des marches forcées et des privations de toute espèce ; elle fut accueillie par des cris de « Vive l’Empereur ! » On nous prévint en outre qu’il n’y aurait plus de grande halte, ni de journées d’étape réglées comme en France, et qu’il fallait, en conséquence, conserver des vivres pour la marche. Et puis, défense de manquer aux appels, de rester en arrière, etc.
    Dans la journée, on marchait d’un soleil à l’autre. Nous couchâmes dans un village, à

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