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Staline

Staline

Titel: Staline Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Marie,Jean-Jacques
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attestera en 1934 avoir vu lui-même Staline trafiquer le texte.
Staline fait ainsi d’une pierre cinq coups : il exalte Lénine, oppose la « direction
collective » d’un Bureau politique aux prétentions de Trotsky, réhabilite
le Comité central, pour le moins défaillant en octobre 1917, prend la
défense de ses deux alliés et s’attribue une part directe à la « direction
politique de l’insurrection ». Sa manœuvre réussit. Ce mythique Bureau
politique prend bel et bien forme, urbi et orbi, sous la plume des
historiens.
    Staline utilise sans tarder ce faux devant la fraction
communiste des syndicats, le 19 novembre 1924 : « Il
ressort clairement du procès-verbal que les adversaires d’un soulèvement
immédiat, Zinoviev et Kamenev, entrèrent dans l’organisme chargé de diriger l’insurrection. »
Trotsky les considère comme la droite du Parti en octobre 1917. « Comment
se fait-il alors que ces camarades, en dépit de leurs désaccords […] aient été
élus à la coordination politique de l’insurrection [489]  ? »
    Staline rappelle ici l’ours de la fable, dont il a la
démarche pesante. En défendant ses deux alliés, il rappelle du même coup leur
hostilité à l’insurrection d’octobre 1917 et sape ainsi leur réputation.
    En octobre, le Secrétariat constitue, sous la direction du
secrétaire de Staline, Tovstoukha, une commission qui invite tous les militants
en possession de documents historiques du Parti à les lui faire parvenir. La
commission découvre ainsi la lettre de Lénine, rédigée le 19 octobre 1917,
mais jamais envoyée, dénonçant Zinoviev et Kamenev comme briseurs de grève.
Découverte on ne peut plus opportune au moment où Staline prépare la rupture
prochaine avec ses deux alliés. La commission glisse la lettre dans une
enveloppe cachetée portant la mention : « Ne pas ouvrir avant 1929 »…,
que Staline fera décacheter beaucoup plus tôt.
    Ce jeu avec l’histoire est néanmoins secondaire. En ce mois
de décembre 1924, il publie une édition modifiée des Questions du
léninisme où, contrairement à l’édition antérieure, il affirme possible « l’édification
de la société socialiste intégrale dans un seul pays ». Il a fait la
découverte « idéologique » de sa vie, qui cerne, de façon certes
encore très générale, le contenu politique et social réel du conflit
Trotsky-Staline : « révolution internationale » ou « socialisme
national ». Radek, futur rallié à Staline, raille sa prétention utopique à
« construire le socialisme dans une seule rue », voire, dira-t-il
parfois plus vulgairement, « dans une pissotière ». Riazanov, quoique
nullement « trotskyste », ricane devant Molotov : « Je veux
vivre pour voir comment le socialisme sera construit dans un seul quartier,
dans une seule ville, dans un seul district [490] . »
Mais Staline promet et répète : « Nous avons tout ce qui est
nécessaire pour construire la société socialiste intégrale [491] . » Fort de
ce projet autarcique, il est l’homme de la grande promesse à un appareil du
Parti désireux de jouir enfin des fruits d’une victoire difficilement acquise
et toujours menacée.
    Ce qu’il recherche alors avant tout, c’est une formule choc
contre l’adversaire. Il la trouve bientôt et la publie dans la Pravda du
17 décembre 1924. La révolution permanente, cette « désespérance
permanente », exprime, dit-il, « l’absence de foi dans les
possibilités révolutionnaires du mouvement paysan […] et dans les forces et les
capacités du prolétariat de Russie ». Pour Trotsky, en effet, le
capitalisme, en liant tous les pays entre eux par son mode de production et son
commerce, a fait du monde entier un organisme économique et politique unique,
régi par la division internationale du travail. Le socialisme ne saurait donc
être édifié dans un pays isolé, et le socialisme national autarcique est une
utopie réactionnaire. Instinctivement, Staline le nie parce qu’il sent que tel
est le vœu de l’appareil. Dès lors, comment les déçus de la révolution mondiale
ne se reconnaîtraient-ils pas dans le porteur de cette bonne nouvelle ?
    S’il est le meilleur défenseur des « cadres », il
n’est pas encore leur maître. Un banal règlement le souligne : le 27 janvier 1925,
le Bureau politique dresse la liste, par ordre alphabétique, des dirigeants
dont les discours prononcés à Moscou

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