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Staline

Staline

Titel: Staline Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Marie,Jean-Jacques
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Chaque texte met en scène les fidèles disciples de
Lénine qui vient de mourir confrontés au représentant, sommé de se taire, d’un
courant étranger au léninisme. Coller l’étiquette de trotskysme sur l’analyse
de Trotsky, c’est la présenter comme la suite des âpres luttes fractionnelles
qui, de 1904 à 1917, l’ont violemment opposé à Lénine. Il suffit dès lors de
rendre à nouveau publique la liste des épithètes dont ce dernier a accablé
Trotsky pendant ces treize ans, et la messe est dite. Lénine a alors traité
Trotsky de « vantard », « poseur », « phraseur »,
« menteur », « liquidateur », « diplomate de bas étage »,
et l’a comparé au vaniteux personnage du romancier Saltykov-Chtchedrine « Ioudouchka
(petit judas) Goloviev ». Ces qualificatifs et deux ou trois vieilles
formules de Lénine (comme « Soutenir le groupe Trotsky, c’est aider à
tromper les ouvriers » de 1911) seront, à partir de 1924, inlassablement
répétés comme l’ultime message de l’Embaumé à ses fidèles. La suppression du
nom de famille « Golovlev » après « Ioudouchka » vise à
montrer que Lénine a dénoncé en Trotsky le traître, réincarné, qui avait vendu
le Messie aux impérialistes romains…
    Sur un demi-million d’adhérents du Parti en 1923, moins de 10 000
ont participé à ces débats révolus et en connaissent le sens. Les autres
ignorent tout de cette préhistoire. Ayant ainsi diabolisé un « trotskysme »
mythique, Staline, au fil des ans, le chargera du contenu qui lui plaira et,
par cercles concentriques, l’imputera aux militants et cadres de toutes nuances
qu’il décidera de liquider.
    Le parti bolchevik compte alors 5 % d’illettrés complets ;
75 % de ses membres n’ont qu’une instruction élémentaire (de 4 à 6 ans
d’école primaire), 6,3 % ont une instruction moyenne, et moins de 1 %
une instruction supérieure : en gros, 300 dans tout Moscou, 100 pour toute
la Sibérie. À Boukhara, 70 % des communistes ne savent ni lire ni écrire
en ouzbek, et 98 % ne savent ni lire ni écrire en russe ! Un tiers
des communistes du Turkestan sont totalement analphabètes. En Asie centrale, le
parti bolchevik n’est que le cache-misère des vieux clans féodaux, dont les
membres ne connaissent que la fidélité au chef local. À tous, Staline psalmodie :
notre maître vénéré Lénine a dit que Trotsky est un petit judas. Dès lors, l’invective,
qui s’apprend comme une formule de catéchisme, se substitue à la discussion.
Trotsky rédige un article en réponse, intitulé « Nos divergences »,
mais choisit finalement de se taire. L’avalanche d’épithètes malsonnantes sur
le « trotskysme » dévale dans un silence assourdissant qui semble en
confirmer la légitimité…
    Pour la troisième fois, Trotsky est l’homme qui impose au
Parti une discussion dangereuse pour son unité. C’est un fauteur de divisions.
Staline le dit et le fait dire haut et fort. La conférence du Parti de l’arrondissement
de Bauman, à Moscou, condamne Trotsky pour « sa tentative de plonger le
Parti dans une nouvelle discussion » ; une cellule de Krasnaia
Presnia, plus nette encore, « considère l’organisation de discussions sur
des questions d’histoire comme absolument superflue et inacceptable ». En
même temps, il joue les modérés. Zinoviev et Kamenev veulent exclure Trotsky du
Bureau politique. Halte-là, s’écrie-t-il : « Il faut enterrer le
trotskysme comme courant idéologique », mais « les mesures
répressives, je suis résolument contre [487]  ».
Il fait figure, dans l’appareil, de garant d’unité et de stabilité, lui qui
combat tout à la fois les discutailleries qui divisent et les exclusions qui
appauvrissent.
    Dans cette polémique, il effectue alors une double
falsification de la résolution du Comité central du 10 octobre 1917
sur l’insurrection : il y introduit la décision de créer un Bureau
politique, absente du texte original écrit de la main de Lénine ; il
modifie ensuite les objectifs du compromis ultérieur consistant à « former
un Bureau pour la direction politique dans les jours à venir », qu’il
change en « former un Bureau pour la direction politique de l’insurrection [488]  », ce qui
fait, absurdement, de Kamenev et de Zinoviev des dirigeants de l’insurrection à
laquelle ils étaient farouchement opposés. Le secrétaire personnel de Staline,
Tovstoukha,

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