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Staline

Staline

Titel: Staline Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Marie,Jean-Jacques
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Kremlin ; un repas pour le quinzième anniversaire de la
révolution d’Octobre y réunit les ménages Molotov, Vorochilov et Iegorov.
Staline, éméché, envoie des boulettes de mie de pain à la femme du général
Iegorov, son ancien compagnon de la guerre de Pologne. Ce jeu excite la
jalousie de Nadejda. Énervé, Staline trouve sa femme trop bavarde ce soir-là
et, au milieu du repas, il lui jette au visage une pelure d’orange (à laquelle,
pour rendre la scène plus dramatique, Boukharine ajoute des mégots) en
criant : « Hé, toi ! » Nadejda lui répond : « Je
ne suis pas ton "Hé, toi !" », se lève, quitte la table et
sort [677] .
La femme de Molotov, Pauline Jemtchoujina, son amie intime, sort à sa suite, la
rattrape ; les deux femmes se promènent un moment dans le Kremlin et
bavardent. Nadejda se plaint à Jemtchoujina de la coiffeuse et de son mari,
auquel elle reproche notamment sa conduite de ce soir, puis rentre chez elle et
se couche. Jemtchoujina regagne la salle à manger. Le lendemain matin, la femme
de ménage retrouve le cadavre de Nadejda Alliluieva, la tempe éclatée par une
balle et, dans sa main, le petit revolver Walther que lui avait jadis offert
son frère Pavel. Staline, averti, arrive blême. Ce suicide l’atteint et le
blesse en même temps.
    Trois jours plus tard, lors des funérailles, il arrive le
dernier à la levée du corps. Deux témoins rapporteront la même scène de façons
fort différentes. Molotov dira l’avoir entendu soupirer : « Je n’ai
pas su la protéger. » Selon l’autre, il aurait grincé : « Elle
est partie comme un ennemi », puis aurait tourné le dos au cercueil et,
apercevant son beau-frère Pavel, l’aurait fixé avant de lui demander : « C’est
toi qui lui as offert ce revolver ? — Oui, aurait répondu l’autre. — Tu
as vraiment trouvé un beau cadeau. » En quittant la salle, il aurait dit
sèchement à Enoukidzé : « Puisque c’est toi qui l’as baptisée, c’est
à toi de l’enterrer [678] . »
Et il aurait refusé d’accompagner la dépouille de sa femme au cimetière.
    Selon une rumeur, Nadejda avait laissé sur sa commode une
lettre accusatrice adressée à Staline. Svetlana, sa fille, affirme que « seul
un petit nombre d’intimes eurent le droit de lire cette lettre qui fut vite
détruite [679]  ».
Mais elle avait 6 ans à la mort de sa mère et ne fait que répéter ce que
lui racontèrent, vingt-deux ans après, ses tantes qui « en savaient trop »,
déportées en 1948, et libérées du Goulag en 1954. Or, les tantes en question ne
firent certainement que donner foi à un bruit qui courait alors. Mais comment
imaginer que Staline, entré dans la chambre de sa femme après la femme de
ménage, aurait pris le risque de laisser circuler un acte d’accusation contre
lui, fût-ce dans un cercle restreint ? Selon une autre rumeur, il exigea
des trois médecins qu’il avait convoqués, dont deux des futurs condamnés du
troisième procès de Moscou (Levine et Pletnev), qu’ils signent un acte de décès
affirmant que Nadejda était morte d’une crise d’appendicite. Ils auraient
refusé et l’auraient payé plus tard. Staline a, certes, dans le communiqué
officiel, dissimulé ce suicide qu’il ressentit comme un abandon et un défi,
mais cette histoire est une fable, une de plus.
    Son abattement est tel alors que la mère (ou la sœur) de
Nadejda reste quelques semaines à dormir dans l’appartement du Kremlin. Staline
la quitte en décembre : il l’échange avec l’appartement voisin de
Boukharine, qui occupe la chambre où Nadejda s’est tuée, mais n’y habitera
quasiment jamais. Il s’installe à Zoubalovo puis, à partir de 1934, dans sa
nouvelle villa de Kountsevo qui est à dix minutes du Kremlin.
    Pendant longtemps, d’aucuns ont voulu voir un assassinat
dans le suicide de Nadejda. La blessure à la tempe gauche maquillée plus tard
par une mèche de cheveux habilement placée ne pouvait être provoquée par le
coup de feu d’une gauchère, expliquait-on ; un garde avait même vu Staline
sortir de la chambre de sa femme à quatre heures du matin, après avoir entendu
un coup de feu, etc. Des centaines d’articles accumulent indices imaginaires et
témoignages rocambolesques. Vassili Staline, dans une lettre à la direction du
PCUS du 23 février 1955, lie ainsi la mort de sa mère à l’influence
de Beria sur son père, qu’il n’était pourtant guère en mesure

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