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Staline

Staline

Titel: Staline Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Marie,Jean-Jacques
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adversaires, au
service de la bourgeoisie, sabotent ses projets.
    Du mécontentement verbal à l’attentat, il n’y a qu’un pas. C’est
l’idée que Staline veut imposer. Il fait désormais systématiquement de l’attentat
une pièce centrale des accusations proférées contre tous ceux dont il veut se
débarrasser ; il craint aussi que sa dictature ne suscite la tentation
terroriste dans la jeunesse. Le culte des populistes, qui ont assassiné un tsar
et plusieurs chefs de la police, lui paraît dangereux. Le 25 février 1935,
son nouveau favori, Jdanov, cite en privé la remarque de Staline : « Si
nous formons nos gens par l’étude des populistes, nous allons former des
terroristes [778] . »
Il faut en finir avec l’exaltation des assassins des dignitaires tsaristes.
Jdanov, dans la Pravda du 19 juin 1935, déplore que « notre
jeunesse connaisse Jeliabov, les Ryssakov, Perovskaia [les assassins d’Alexandre II]
mieux que les glorieux militants d’avant-garde et les héros formés par la
classe ouvrière et le parti bolchevik », etc. Le 26 juin, Staline
ferme, bien entendu « à sa propre demande », la Société des anciens
bagnards et déportés politiques, accusée d’être un foyer de
socialistes-révolutionnaires et de mencheviks et de propager les idées
terroristes des populistes ; sa maison d’édition est liquidée et la
parution de sa revue mensuelle, Le Bagne et la déportation, supprimée.
    La défiance à l’égard des « populistes-terroristes »
s’étend à l’activité des bolcheviks avant la révolution. Jdanov cite une
deuxième remarque de Staline : « Du point de vue de l’histoire du
Parti, la période d’avant 1917 relève de la préhistoire [779]  », donc
elle présente peu d’intérêt. Centrer l’étude sur elle au détriment de la
période de liquidation des oppositions et du règne de Staline, précise Jdanov
deux mois plus tard, ne peut qu’affaiblir l’armement idéologique et entraver « le
démasquage des ennemis du peuple ». Le 26 mai, Staline dissout la
Société des vieux bolcheviks, dont les mérites avant la révolution ne pèsent
rien au regard des fautes des – nombreux – opposants, même éphémères.
La dénonciation des populistes, héros d’avant-hier, et des vieux bolcheviks,
héros d’hier, annonce la liquidation de la « vieille garde », dont le
premier procès de Moscou, en août 1936, donnera le signal public.
Iaroslavski pourra ainsi écrire en 1939 : « Les ennemis du Parti et
du pouvoir soviétique se sont nourris aux sources théoriques et aux décisions
tactiques du populisme […]. Ils ont emprunté à l’arsenal du populisme ses
moyens et procédés de lutte, l’utilisation de la terreur individuelle à des
fins de restauration contre-révolutionnaires […]. Ils ont préparé l’assassinat
du chef du prolétariat et de l’ami des travailleurs, Staline [780] . »
    Staline n’omet aucun détail. Lors du banquet rituel donné le
4 mai 1935 en l’honneur de la promotion 35 des académies
militaires, il porte un toast à Boukharine : « Tout le monde l’aime
ici […]. Et gare à quiconque se risquera à remuer le passé ! » Les
invités lèvent leur verre, et applaudissent à tout rompre. Staline mesure ainsi
la popularité de Boukharine, qui ne devine rien de la manœuvre, pas plus que
les assistants. La veuve de Boukharine constatera : « Tout était chez
Staline calculé, chaque pas, que dis-je, chaque centimètre [781] . »
    Le 4 mai 1935, devant les jeunes cadres de l’Armée
rouge, Staline se dégage de la « Iejovchtchina » dans un discours où
il dénonce le désintérêt des cadres du Parti pour les hommes et leur existence,
en évoquant, une fois n’est pas coutume, un souvenir de son exil en Sibérie. Au
printemps, treize gars partirent ramasser des débris d’arbres dans le fleuve en
crue. Ils revinrent le soir au village à douze, et lorsqu’on leur
demanda : « Où est le treizième ? », ils répondirent avec
indifférence : « Le treizième ? Il est resté là-bas. » A
une question de Staline ils répondent, avec la même indifférence : « Il
a dû se noyer ! » Comme l’un d’eux s’esquive pour donner à boire à sa
jument, Staline leur reproche de ménager plus leur bétail que les gens et s’attire
une réponse unanime : « Et pourquoi ménager les gens ? On peut
toujours en faire, des gens ! Mais une jument… Essaie donc de me

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