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Staline

Staline

Titel: Staline Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Marie,Jean-Jacques
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d’hommes,
épuisés et en loques, réussiront à briser l’encerclement. Une semaine après, le
16, Dimitrov assiste à la volée de bois vert qu’il administre à Khrouchtchev.
Une alerte aérienne a obligé dès midi Staline à se réfugier dans l’abri au
sous-sol du Kremlin. Furieux, il téléphone à Khrouchtchev en Ukraine, raille
les promenades de Vorochilov sur le front, et Boudionny qui « se prend
pour un grand capitaine et ne fait rien », puis abreuve Khrouchtchev de
reproches et de menaces ; il lui rappelle tous ses titres et hurle : « Vous
n’avez pas honte ? Vous vous conduisez en petit bourgeois. Qu’est-ce que
vous êtes ? Vous avez livré la moitié de l’Ukraine. Vous vous préparez à
livrer l’autre moitié. La honte. Quelles mesures prenez-vous ? Pourquoi
vous taisez-vous ? […] Ne laissez en aucun cas les Allemands prendre pied
sur la rive gauche du Dniepr. Faites ce qui est nécessaire. Autrement, je vous
le dis calmement, je vous réglerai votre compte [1129] . » Quinze
jours plus tard, il convoque Joukov et Timochenko. Il tient ce dernier pour
responsable de l’échec de Smolensk et décide de le limoger et de le remplacer
par Joukov. Celui-ci prétend avoir alors défendu Timochenko, déclaré que son
limogeage était « injuste et irrationnel », et critiqué « le
changement fréquent de commandants de front [qui] a une fâcheuse influence sur
le cours des opérations [1130]  ».
Staline ne dit mot.
    Son irritabilité se manifeste surtout sur les petits détails
non ou mal réglés. Les généraux apprendront vite à décrypter les signes
avant-coureurs de ses fureurs : lorsque Staline retire la pipe de sa
bouche et l’abandonne sur une table ou un bureau, c’est le signe, dit Joukov,
qu’il perd son sang-froid et le contrôle de lui-même [1131] . Il ne regarde
pas ou à peine les victimes de sa colère. Son regard les esquive. De plus, il s’adresse
souvent à ses divers interlocuteurs comme s’il poursuivait une conversation
interrompue depuis peu avec eux ou d’autres, en leur laissant le soin d’en
retrouver le fil.
    Le rythme de vie qu’il observera chaque jour jusqu’à la fin
de la guerre s’ordonne dès ce moment-là : des journées de 14 à 16, voire
parfois 18 heures, aux horaires très variables. Sa journée peut commencer
à huit heures du matin, à quatre heures de l’après-midi, et se conclure en
conséquence au début ou au milieu de la nuit. Il n’aime pas que les autres dorment
tandis qu’il est éveillé. Une nuit, il téléphone à Khroulev, responsable du « front »
de l’arrière, qui décroche le combiné : « Pourquoi ne dormez-vous pas ?
lui demande Staline. – Excusez-moi, répond son interlocuteur, si vous me
téléphonez, vous considérez donc que je ne dois pas dormir [1132] . » Staline
ne répond rien. Khroulev a réussi son examen.
    Sa concentration sur les questions militaires et
diplomatiques lui laisse moins de temps pour la politique intérieure et pour le
contrôle de la vie intellectuelle, auquel il accordait auparavant, et
consacrera après la guerre, une grande part de son temps. Il confie le contrôle
quotidien des intellectuels à Chtcherbakov, bureaucrate tatillon, ivrogne et
borné, président du Bureau soviétique d’information, mais ne s’en décharge pas
complètement. Il suit ainsi de près l’attribution des prix Staline de
littérature et d’art pendant la guerre et lit les œuvres proposées.
    Dès le début de la guerre, Staline se tourne vers les
démocraties. Le 26 juillet, le congrès américain annule l’application à l’URSS
du Neutrality Act, qui interdisait au gouvernement américain de vendre des
armes aux pays totalitaires. L’URSS est désormais autorisée à en acheter aux
États-Unis contre paiement immédiat, selon le principe cash and carry. Washington ne vend pas à crédit. Roosevelt dépêche à Moscou son conseiller
Harry Hopkins, reçu longuement par Staline les 29 et 30 juillet et le 1 er  août.
Les deux hommes élaborent les premières lignes d’une division du travail qui va
perdurer jusqu’à l’été 1944 : pour combattre Hitler, les États-Unis
fourniront le matériel, l’URSS les hommes, les États-Unis les canons, l’URSS la
chair à canon, cette chair humaine dont elle est si riche et Staline si
dispendieux. Les conditions américaines sont draconiennes. Hopkins déclare à
Staline : « Les décisions sur l’approvisionnement de

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