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Staline

Staline

Titel: Staline Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Marie,Jean-Jacques
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flanqué de Molotov, il reçoit les
métropolites orthodoxes Serge, Alexis et Nicolas, leur annonce des réouvertures
d’églises et leur demande de lui communiquer une liste de prêtres emprisonnés
pour étudier leur réhabilitation et leur libération éventuelle. Les trois
métropolites, méfiants, craignent un piège et se gardent de fournir une telle
liste. L’entrevue aboutit à la décision de créer un Conseil des affaires de l’Église
orthodoxe, effectivement constitué un mois plus tard, et débouche sur la
promesse, qui sera tenue, d’autoriser la réunion du concile des évêques
orthodoxes, chargé d’élire le patriarche de toutes les Russies.
    Au sortir de la réunion, le métropolite Nicolas, « ému
et ébranlé de joie », souligne « l’attention de Iossif
Vissarionovitch envers les besoins de l’Église ». Dans son enthousiasme,
il salue en Staline « le chef très aimé de notre peuple, le génial
commandant en chef de nos armées, désigné par Dieu pour servir glorieusement
notre Patrie en cette année d’épreuves ». Désigné par Dieu ? Mais oui !
Nicolas insiste : « Les croyants russes voient dans le chef suprême
de notre pays le père de notre peuple, que Dieu lui a donné [1218] . » Staline
est donc un don de Dieu. Tous les métropolites ne vont pas aussi loin, mais ils
accablent tous Staline de compliments ampoulés et de souhaits de longue vie. En
1993, un prêtre orthodoxe constatera avec dépit : « Si le Seigneur
avait écouté les prières de nos hiérarques […] la féroce dictature stalinienne
aurait duré jusqu’au Jugement dernier [1219] . »
Dès cet instant, à la fin des banquets qui ponctuent leurs réunions, les
dignitaires de l’Église portent un toast d’abord à Staline, puis au patriarche.
En 1945, le métropolite de Kiev affirmera même que Staline « a créé l’Armée
rouge et pour elle une stratégie et une tactique où l’esprit a dominé la
matière [1220]  ».
Staline, par cette entreprise d’union nationale russe, prépare aussi sa
prochaine rencontre avec Roosevelt et Churchill à Téhéran. Après avoir dissous
le Comintern, il protège l’Église. Roosevelt, le défenseur de la foi, sera
content.
    Georges Alexandrov, qui a remplacé en 1940 Jdanov à la tête
du département d’agit-prop du Comité central, tente d’accentuer et de
formaliser la politique nationaliste de Staline. Dès août 1942, il rédige
une note au Secrétariat du Comité central sur la « déformation de la
politique du Parti dans la nomination, la promotion et la formation des cadres
dirigeants des institutions artistiques [1221]  ».
Deux tableaux en illustrent le sens. Le premier relève que, sur douze fonctions
dirigeantes au Bolchoï, dix sont occupées par des juifs. Le second fait
ressortir que les sept responsables des rubriques littéraires et artistiques
des sept principaux journaux sont juifs. Les mutations, transferts, mises à l’écart
se multiplient dans ces secteurs, au point que, le 13 mai 1943, le
vieux communiste Grinberg dénonce, dans une lettre à Staline, la politique qui
mène des responsables du Parti à « poser tout à fait officiellement le
problème de la "pollution" de l’appareil du Parti par les juifs »
et à mettre en pratique un numerus clausus de fait. Il demande à Staline d’« éclaircir
personnellement [1222]  »
l’affaire. Mais la lettre ne lui parvient pas ; elle est retournée à
Alexandrov, qui se gardera bien d’y répondre.
    Staline, passionné de cinéma, veut voir couronner son
tournant nationaliste par le septième art. Au début de septembre, il reçoit le
scénario de la première partie d’Ivan le Terrible d’Eisenstein. Le 13, il fait
connaître son approbation, dans un court billet condescendant, et exige que le
film soit mis en scène rapidement : « Le scénario n’est pas mauvais.
Le camarade Eisenstein […] ne rend pas mal l’image d’Ivan Grozny comme force
progressiste de son temps, et l’ opritchnina [la garde personnelle d’Ivan]
comme son instrument efficace [1223] . »
Ivan le Terrible est progressiste, car il a décimé la caste nobiliaire des
boyards comme Staline a décimé la vieille garde qui empiétait sur son pouvoir.
C’est un rassembleur de terres russes. Et l’opritchnina annonce modestement le
NKVD et Maliouta Skouratov, son chef, Beria…
    Staline engage alors le troisième acte de son tournant
nationaliste (l’adoption de l’hymne officiel

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