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Survivant d'Auschwitz

Survivant d'Auschwitz

Titel: Survivant d'Auschwitz Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Thomas Gève
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boulangerie, la DAW 5 * ( Deusche Ausrüstungswerke ) et la Union Munitionswerke *. Les esclaves y suaient nuit et jour pour remplir les quotas fixés et, toutes les huit heures, leur production quittait l’atelier par une voie ferrée qui rejoignait la gare, d’où elle partait alimenter la machine de guerre allemande.
    De cette même gare, par cette même voie, arrivait un autre type de matériel, silencieusement déchargé, classé, puis empilé : c’était le continu des valises – désormais orphelines – des nouveaux venus à Birkenau.
    Après quelques semaines d’un travail la plupart du temps absurde, où toute la journée on nous hurlait : « Plus vite ! », je sentis que j’avais atteint la limite de mes efforts possibles. Mes mains étaient pleines d’ampoules, j’avais les pieds en sang et décidai d’aller voir le responsable du recrutement, un détenu chargé de nous répartir (plus ou moins définitivement) dans une soixantaine de kommandos différents.
    Parfaitement conscient qu’un prétendu « bon kommando » ne s’obtenait qu’avec du piston, je gardais tout de même espoir de pouvoir être transféré ailleurs, où le travail serait moins dur.
    « Vous êtes nombreux, tu sais, à vouloir un travail moins dur, répondit-il à ma requête. Ce n’est pas ma faute si tu es jeune. J’aurais pu t’envoyer à l’école des maçons, mais tu y es depuis huit mois, c’est trop tard. Je ne peux rien pour toi. »
    La froide indifférence avec laquelle il repoussa ma requête, alors qu’il aurait facilement pu faire quelque chose pour moi, me déprima profondément. Désespéré, j’allai voir mon doyen de bloc pour lui demander conseil et lui expliquai que je trouvais injuste qu’un jeune, qui sortait à peine de l’hôpital, soit traité avec la même dureté qu’un nouveau venu. Notre « père » au bloc 7a n’avait aucun moyen de peser sur les décisions de recrutement et par ailleurs je savais qu’il détestait le favoritisme. Cependant, j’eus raison de croire en son sens profond de la justice et en sa détermination, car – je ne sais pas comment il s’arrangea – je fus rapidement transféré vers un chantier de construction.
    L’organisation au bloc 7a était restée globalement la même qu’à l’époque où j’étais entré à l’école des maçons : les mêmes cavalcades d’adolescents dans l’escalier pour aller piquer de l’eau aux robinets qui fuyaient dans les toilettes ; les mêmes contrôles pour vérifier si les oreilles et les pieds avaient été lavés ; la même pichenette du chef de chambrée quand on lui présentait le seul pied lavé.
    Mais les visages n’étaient plus les mêmes. Mes camarades n’étaient plus là. Plusieurs sélections étaient passées par là, et les regards désespérés de ceux qui avaient été embarqués dans des camions vers Birkenau, après qu’on avait verrouillé les portes du bloc et procédé à la sélection, continuaient à nous hanter.
    Petit Kurt avait été emmené. Gert le Blond était à l’hôpital. Gert l’Effronté, mon meilleur ami – celui qui s’était toujours efforcé de m’aider –, avait été transféré au bloc des travailleurs agricoles. J’étais désormais le seul Juif allemand, le dernier du Petit-Berlin.
    Ma solitude était grande, car je n’avais plus personne avec qui partager mes soucis et mes peines. Lorsque le désespoir m’envahissait, je relisais les lettres de Maman et ses mots me redonnaient courage. Le printemps renaissait, mais, pour la première fois de ma vie, je n’arrivai pas à m’en réjouir.
    Quand je n’allais pas bien, je trouvai du réconfort en philosophant sur les causes de notre malheur, et mon grand interlocuteur, dans toutes ces longues considérations sur des choses que nous n’avions jamais étudiées à l’école, était mon fidèle Schorsch. Il avait un an de plus que moi, était cultivé, et le seul à respecter mon appétit de connaissances et mon désir de comprendre.
    Schorsch avait les yeux bleus, un nez et une bouche qui le faisaient ressembler à un poisson, et il raisonnait déjà comme un intellectuel. Il avait été adopté par une famille autrichienne et voulait devenir ingénieur. Mais l’arrivée d’Hitler, son compatriote, avait montré ses parents du doigt : ils étaient tsiganes.
    Mon ami me livrait ses réflexions : « Nous, les Tsiganes, nous sommes plus proches des Aryens par nos origines que tous ces bâtards

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