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Survivant d'Auschwitz

Survivant d'Auschwitz

Titel: Survivant d'Auschwitz Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Thomas Gève
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ami Gert l’Effronté, je partis à la recherche de quelque chose. Tous les soirs, nous arpentions le camp pour essayer de retrouver des connaissances. Tels de pauvres mendiants, la seule chose que nous y gagnâmes fut une nouvelle expérience : nous trouvâmes des conseils, rien que des conseils, aussi vagues qu’inutiles.
    Gert l’Effronté connaissait un Berlinois, mécanicien juif, avec qui, paraît-il, on pouvait faire affaire, car il avait des contacts bien placés auprès de civils. Nous pensions qu’il était « riche » et nous essayâmes de gagner son amitié. Nous l’attendions, parfois pendant des heures, devant son bloc, le 22a, et de temps en temps il nous gratifiait du maximum qu’il voulait bien consentir – un bol d’un demi-litre de soupe pour chacun.
    S’il avait été honnête, il nous aurait dit : « Je suis désolé, les gars, mais je ne peux rien pour vous, je ne connais pas vos familles et vous ne pouvez pas me demander d’avoir de l’attachement pour vous. Il n’y a qu’un de vous deux qui soit Berlinois et je ne suis pas responsable de votre situation. Alors, pourquoi devrais-je être tenté de l’alléger ? Nous avons tous notre fardeau à porter. Mes rations supplémentaires, je me les gagne en faisant un trafic dangereux et c’est précisément avec mes bénéfices que je peux continuer à faire des affaires. »
    Il n’était qu’un hypocrite, poli, et sans vergogne, qui préférait nous laisser attendre, jusqu’à ce que nous nous découragions de nous-mêmes. Peut-être était-il un vrai sioniste, comme il le prétendait, peut-être avait-il vraiment les convictions religieuses de son éducation, en tout cas il semblait bien savoir comment le monde fonctionnait, et tout cela se retournait contre nous.
    Nos précieux conseillers de l’école des maçons nous avaient pourtant dit : « Allez voir vos compatriotes, les Juifs allemands », et c’est ce que nous avions fait. Nous n’avions trouvé qu’une vingtaine de pauvres hères, et le seul qui aurait pu nous aider s’avéra impuissant.
    Faute de meilleur mentor, nous partîmes à la recherche du vieux détenu, le criminel allemand, que Keding m’avait présenté. Lorsque je l’eus enfin trouvé, il se réjouit que je sois venu le voir : « Cela ne sert à rien que tu ailles traîner et essayes de mendier, c’est idiot, m’expliqua-t-il. Il faut que tu joues des coudes et que tu saches t’imposer. N’oublie pas : plus ton adversaire est malin, plus il mérite d’être botté. »
    Il s’excusa de ne jamais avoir été capable de faire des affaires, ne survivant que de rations supplémentaires et de paquets qu’il recevait de chez lui, et regretta de ne pas pouvoir m’aider de ce côté-là. Mais il s’étonna de mes vêtements : « Avec des haillons pareils sur les os, tu n’iras pas loin. Tu ressembles à un “Musulman” ! Tiens, prends, me dit-il en me tendant deux bonnes chemises chaudes, c’est ma famille qui me les as envoyées, au moins tu auras l’air plus présentable comme cela. »
    Je l’en remerciai et lui demandai ce que je devais faire si, à la prochaine inspection, on me les confisquait. « Tu diras juste au doyen de bloc que c’est moi qui te les ai données. Il devrait savoir qui je suis », me répondit-il.
    Plusieurs semaines plus tard, lorsque arriva ce que j’avais craint, je préférai me séparer des chemises plutôt que d’attirer l’attention du doyen de bloc : en tant que détenu politique, il aurait vu d’un très mauvais œil le fait que j’aie des relations avec des détenus criminels. De nouveau, je me raccrochais aux conseils de tous ceux qui m’avaient expliqué qu’il ne fallait jamais attirer l’attention. Ceci eut pour conséquence que je n’osai plus revoir mon bienfaiteur, qui m’avait non seulement donné des chemises – désormais perdues – mais un conseil, basé sur un principe essentiel : savoir s’imposer.
    Je continuai à chercher de la nourriture, et allai me poster devant le bloc 1a, celui où le coiffeur du camp, jadis, m’avait dit que je pourrais en trouver. J’y fis la connaissance d’un Juif belge, un petit tailleur malingre, d’une trentaine d’années environ. « Passe nous voir un jour, me dit-il, tu nous parleras un peu de toi. » J’acceptai d’autant plus son invitation que je remarquai que lui et son ami, un Belge lui aussi, vivaient sur un châlit du haut, signe de « richesse ». Je ne manquai

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