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Théodoric le Grand

Théodoric le Grand

Titel: Théodoric le Grand Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Gary Jennings
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aussi resplendissant qu’un solidus nouvellement frappé, avait jusqu’alors été héroïque ; elle était désormais
magistrale. Sa posture et ses gestes avaient acquis de la dignité ; où
qu’il prît place, on l’aurait cru sur un trône. Son front était marqué par la
réflexion la plus profonde, mais les rides plissant le coin de ses yeux
indiquaient une éternelle propension à se réjouir tout en pouvant
instantanément passer de la joie à la gravité la plus farouche…
    Je me rappelais comment, longtemps avant, j’avais eu cette
pensée de regret : « Akh, que ne suis-je une
femme ! » Mais à présent que j’admirais cet homme, plus mûr et plus
ardent encore, je me demandais comment l’imagination débridée de Veleda avait
pu fantasmer sur un baiser ou une étreinte avec le jeune Frido… ou qui que ce
soit d’autre, tant ces gens étaient inférieurs à Théodoric. Quelques jours plus
tôt en effet, j’avais remplacé l’image insignifiante de Tufa, auquel j’étais
obligé de m’accoupler, par celle, purement illusoire, de Frido. J’en venais
presque à me demander désormais si je ne m’étais pas, durant tout ce temps,
servi de l’image de Frido pour masquer celle de Théodoric. L’esprit pouvait-il
s’engager, sans que la volonté y fût pour quoi que ce soit, dans de telles
complexités ?
    Théodoric me couva d’un regard noir et me lança
rudement :
    — Parle ! Peux-tu justifier cette confiscation de
ma prérogative royale de châtier Tufa, niu ? Qu’as-tu à dire pour
atténuer la gravité de ton crime ?
    J’aurais pu suggérer avec une légitime indignation que fort
de mon rang élevé et de l’importante mission qui m’avait été confiée,
j’estimais pouvoir, confronté à des questions lourdes de conséquences, décider
au nom de mon roi, trop éloigné pour le faire en personne. C’est du reste ce
que je fis ; mais écartant l’indignation, j’en fis une plaisanterie.
    — La responsabilité du méfait vous incombe totalement,
Majesté.
    — Que dis-tu ?
    Son regard bleu s’enflamma. Ses mâchoires s’étaient
contractées sous sa barbe et chacun dans la pièce retint sa respiration.
    — J’étais un moins que rien ; vous m’avez nommé herizogo. Je n’étais qu’un obscur parvenu, vous m’avez fait maréchal. Peut-on me
blâmer d’avoir cru que mes crimes devaient égaler l’importance de mon
statut ?
    Tout le monde me regarda effaré. Alors, Théodoric explosa
d’un franc éclat de rire, imité bientôt de tous ses officiers, y compris
l’austère Soas. Ce n’était pas pour rien que comme tous ses sujets, j’adorais
et admirais notre roi. Il était la preuve vivante qu’une nature royale peut
être chaleureuse et cordiale, tout en conservant majesté et puissance.
    —  Akh , fit-il en achevant de rire, je suppose,
Thorn, que je devrais me réjouir que tu ne puisses, à toi seul, nettoyer
l’ensemble de la péninsule italienne de mes opposants ! Enfin, tu m’auras
tout de même laissé le soin de m’occuper personnellement d’Odoacre…
    — Sans compter les légions romaines qui errent encore
çà et là, grogna le général Pitzias d’un ton un peu plus appuyé, qui se voulait
un avertissement.
    Théodoric repoussa la menace d’un mouvement léger de la
main.
    — Çà et là, ja. Ce n’est pas un front uni. Avec
un général défunt et un roi terré dans son trou, ce qui reste de l’armée
romaine doit se demander à quel saint se vouer. Je ne m’attends plus à une
résistance insurmontable. Un peu de nettoyage sera nécessaire en cours de
route, rien de plus.
    Au cours de la discussion qui s’ensuivit, j’appris que la
défaite infligée par Théodoric aux Romains sur l’Addua avait été aussi
calamiteuse que celle du Sontius. Une fois cette armée dispersée, il avait
suffi de quelques coups de bélier aux portes de Mediolanum pour que sa garnison
romaine décide de les ouvrir en signe de reddition. La plus significative des
batailles de ce printemps avait été remportée par les Wisigoths, surgis de
derrière les Alpes. Emmenés par leur général Respa, ils avaient défait un autre
corps d’armée romain tenant Ticinum [106] et s’y trouvaient désormais,
attendant les ordres de Théodoric.
    — Faut-il craindre, demandai-je avec circonspection,
qu’Alaric, roi des Wisigoths, ne réclame sa récompense pour l’aide apportée à
cette conquête ? Exigera-t-il une part du butin, comme la

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