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Un collier pour le diable

Un collier pour le diable

Titel: Un collier pour le diable Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Juliette Benzoni
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une voix qu’il n’eut aucune peine à reconnaître, comment vous sentez-vous ? J’espère que mes gens ont été aussi respectueux que je l’avais ordonné et qu’on ne vous a point maltraité ?
    — Ainsi, c’était vous ! fit-il avec un soupir excédé. Vous n’imaginez pas, j’espère, que vous avez réussi à me faire peur ?
    — Ce n’était pas le but recherché. Je souhaitais seulement vous offrir mes vœux de bonheur, sans témoins, et vous dire combien j’apprécie votre goût. La jeune fille est charmante, absolument ravissante… un peu bécasse peut-être, un peu… paysanne mais charmante ! Il est bien dommage que la nuit de noces soit encore lointaine. La jeune épousée, je le crains, va trouver le temps long. Quant à vous, nous allons faire de notre mieux pour que vous ne souffriez pas trop d’impatience.
    — C’est cela que vous avez trouvé ? C’est cela votre vengeance ? M’écarter de ma femme cette nuit ? fit-il méprisant. Je ne vous fais pas mon compliment. Je suis marié, ma chère, et vous n’y pouvez rien. Quant à calmer ce que vous appelez mes impatiences, il n’y faut pas compter. Vous n’avez pas l’intention de me violer, j’imagine ?
    Elle eut un rire de gorge en forme de roucoulement qui passa comme une râpe sur les nerfs du jeune homme.
    — Cela pourrait être amusant ! D’ailleurs, si je le voulais vraiment… je n’aurais pas besoin de te violer. Je sais si bien comment éveiller ton désir ! Mais, ce soir, je préfère te laisser à tes regrets. Et maintenant, je te souhaite une bonne nuit, mon bel amour, une longue nuit bien reposante.
    Elle avait dû faire un signe car Gilles se sentit soudain soulevé par les épaules tandis que l’on approchait un gobelet de ses lèvres. Il serra les dents. Alors, sans la moindre douceur, deux doigts pincèrent son nez et, bon gré mal gré, il lui fallut bien ouvrir la bouche dans laquelle on fit couler une liqueur sucrée de goût agréable d’ailleurs qu’il avala mécaniquement. Ce n’était certainement pas du poison ainsi qu’il l’avait imaginé tout d’abord. Puis on le reposa sur son lit.
    — Il était bien inutile de te défendre, dit Mme de Balbi en riant. Je n’ai pas du tout l’intention de t’empoisonner. D’abord ce n’est pas du tout mon style et, ensuite, ne t’ai-je pas dit que nous ne nous séparerions définitivement que lorsque je n’aurais plus de goût pour toi ? Ce temps n’est pas encore venu… Tu vas dormir à présent. Demain tu auras encore un peu de cette délicieuse liqueur, après-demain aussi… Sois sans crainte, elle ne te fera aucun mal. Dormir… simplement dormir ! Pauvre petite Madame de Tournemine ! Il va lui falloir conserver sa virginité plus longtemps que prévu…
    Elle s’éloigna en riant et son rire décrut lentement dans les profondeurs de la maison. Un instant Gilles eut envie de lui crier que son absurde vengeance était sans objet, que Judith était bel et bien sa femme mais il se retint pour ne pas risquer de livrer sa petite sirène aux représailles toujours possibles de cette harpie. Et puis, il avait sommeil… tellement… tellement sommeil tout à coup… tellement… sommeil.
     
    Lorsqu’il en émergea après un temps impossible à déterminer mais qui, même dans le profond anéantissement où il avait été plongé, lui avait paru durer interminablement, il ouvrit les yeux sur un décor gris de prison ou de cave et mit quelque temps à recouvrer ses esprits. Les brumes de la drogue dont il avait été gorgé ne se dissipèrent que lentement et il lui fallut un certain temps pour rassembler ses souvenirs. Puis il avait de nouveau retrouvé l’usage de ses yeux.
    Quand il y vit plus clair, il constata que ses poignets et ses chevilles ne portaient plus aucune entrave, qu’il était étendu sur une sorte de paillasse recouverte de peaux de mouton et que le jour entrait dans sa prison par un soupirail devant lequel retombait la verdure d’une végétation. Il était seul…
    Il commença par s’asseoir sur son lit de fortune pour laisser au vertige qui l’avait saisi en se redressant le temps de s’apaiser. Il vit alors qu’un plateau garni d’un poulet fraîchement rôti, d’un pain et d’une bouteille de vin, était posé à terre.
    La faim lui vint à la vue des victuailles. Jamais il ne s’était senti l’estomac aussi creux… Cette chère Anne était décidément pleine d’attentions pour ses prisonniers

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